Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - SOC) publiée le 21/02/2008

M. Philippe Madrelle appelle l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi sur l'avenir de l'usine de transmissions automatiques de Ford Aquitaine Industrie située à Blanquefort en Gironde. La fermeture programmée d'ici 2010 de ce site va entraîner la suppression de 1600 emplois. A l'automne 2005, il avait alors interpellé le Gouvernement sur, d'une part, les conséquences dramatiques des plans sociaux à répétition, et d'autre part, sur l'urgente nécessité de nouveaux projets d'investissement destinés à sauver ce site industriel. Il lui rappelle que les collectivités et l'intersyndicale de FAI ont obtenu la nomination d'un interlocuteur unique. Lors des comités de pilotage, la direction n'a toujours pas apporté de réponse concrète aux différentes propositions avancées. Compte tenu de la volonté "d'implication ministérielle" manifestée lors de la réunion des comités de pilotage, il lui demande de bien vouloir lui préciser le contenu des différentes pistes de réindustrialisation et de diversification du site Ford. Il s'agit d'éviter un réel gâchis humain et économique pour la Gironde et l'Aquitaine !

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services publiée le 26/03/2008

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2008

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 172, adressée à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

M. Philippe Madrelle. Monsieur le secrétaire d'État, à l'automne 2005, j'avais interpellé ici-même le Gouvernement sur l'état de gravité de la situation de l'usine Ford Aquitaine Industrie. Votre prédécesseur, M. François Loos, m'avait répondu ceci : « la pérennité du site de Ford Aquitaine Industrie à Blanquefort ne nous semble menacée ni à court terme ni à moyen terme ». Hélas ! ce n'était pas une vision prémonitoire.

La fermeture programmée d'ici à 2010 du site de production de l'usine de transmissions automatiques de Ford Aquitaine Industrie à Blanquefort entraînera la suppression de 1 800 emplois. Au-delà de l'emploi, cette situation aura des conséquences sur tout un environnement économique et social : 15 000 emplois induits vont être touchés, et de nombreuses communes seront privées des retombées de la taxe professionnelle. Ainsi, si Ford fermait, le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle perdrait une ressource de 9 millions d'euros, ce qui entraînerait une perte sèche, notamment pour les communes défavorisées.

Depuis le début de l'année, les organisations syndicales ont imaginé diverses formes d'actions de communication afin de sensibiliser la population des communes girondines aux conséquences dramatiques de la fermeture du site, pourtant particulièrement bien noté. L'organisation de forums avec les élus, le blocage du site avec paralysie de la production et les « opérations escargot » sur la rocade bordelaise constituent autant d'exemples illustrant la farouche et bien compréhensible détermination des salariés, qui ne peuvent se résoudre à la fermeture de ce site et à l'indifférence des dirigeants de Ford quant à l'élaboration de solutions alternatives.

La nomination récente d'un médiateur a contraint la direction à ouvrir des négociations salariales portant notamment sur le fameux contrat de garantie, c'est-à-dire l'indemnité minimale susceptible d'être versée aux salariés contraints de quitter l'usine.

Demain, 26 mars, M. John Fleming, PDG de Ford Europe, doit recevoir à Cologne une délégation de l'Intersyndicale. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, le désespoir et l'attente des salariés : ils ont du mal à admettre que la direction de leur entreprise soit prête à prendre en charge les 700 millions d'euros du plan de fermeture alors que l'investissement massif dans un nouveau produit serait d'un moindre coût.

Les syndicats ont travaillé et ont avancé des propositions alternatives illustrées par la proposition de création d'un pôle de recherche pour les véhicules hybrides essence-électrique. Il s'agit d'éviter une véritable catastrophe économique et sociale pour l'Aquitaine.

Si des investissements ne sont pas décidés très rapidement, les risques en matière d'emploi et de fermeture de cette entreprise seront encore plus grands. Or, les pistes de diversification sont aujourd'hui extrêmement faibles. Ainsi, une hypothèse reposant sur la construction d'éoliennes ne représente que de 100 à 200 emplois ; c'est dire que nous sommes loin du compte !

Monsieur le secrétaire d'État, qu'entend faire le Gouvernement pour mettre Ford face à ses responsabilités ? Avez-vous l'intention de prévoir un dispositif spécifique tant pour Blanquefort que pour l'ensemble de la Gironde en vue de répondre aux divers sinistres tels que Ford Aquitaine Industries, Solectron et First Metal ? Le département de la Gironde, malheureusement en voie de désindustrialisation, a besoin d'une politique ambitieuse.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Monsieur le sénateur, la perspective de fermeture du site de Ford Aquitaine suscite l'inquiétude légitime des salariés et de l'ensemble des acteurs locaux, et appelle une mobilisation forte des pouvoirs publics à laquelle, sachez-le, le Gouvernement est disposé.

La mise en place, sous l'égide du préfet, d'un groupe de travail technique animé par la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, la DRIRE, rassemblant les représentants de Ford, des salariés et des partenaires locaux, a constitué une première étape, laquelle a toutefois montré ses limites.

Le 5 février dernier, Mme Christine Lagarde a réuni le PDG de Ford Europe et les principaux élus du bassin pour faire le point. Au cours de cette réunion, elle a demandé à Ford de se mobiliser pour trouver des solutions permettant à l'usine de conserver des activités dans le domaine automobile et de s'impliquer dans la recherche de solutions de diversification susceptibles de s'implanter et de se développer sur le site.

Elle a également souhaité que Ford désigne, au sein de la direction du groupe, un représentant de haut niveau qui puisse examiner avec l'ensemble des parties les différentes perspectives envisageables pour assurer l'avenir du site.

Au terme de cet entretien, le PDG de Ford Europe a confirmé que le groupe s'investirait très activement dans la recherche d'une solution acceptable. Il a confié à M. Kevin Benett, directeur au sein de Ford Europe, la mission d'être son représentant pour ce dossier.

Pour sa part, Mme Christine Lagarde a chargé M. Emmanuel Caquot, ingénieur général des télécommunications, chef de service à la direction générale des entreprises, d'assurer le rôle de chef de file des services de l'État. Elle a demandé à ses services de s'impliquer très activement dans ce dossier, sous la coordination de M. Emmanuel Caquot.

Ainsi, l'Agence française des investissements internationaux, l'AFII, se mobilise actuellement afin de contribuer à susciter tant l'intérêt des acteurs de la filière automobile que des offres de leur part. Dans le même temps, les services du ministère déploient tous leurs efforts pour faire émerger des solutions de diversification et pour participer à l'analyse de ces dernières.

Je me félicite de la relance, sous la médiation du directeur départemental du travail, du dialogue social entre les dirigeants de l'usine et les représentants des organisations syndicales.

En effet, nous veillerons à ce que le groupe Ford respecte les engagements pris au début du mois de février, engagements qui trouvent une première concrétisation dans la présence régulière de M. Benett sur le site et dans la décision de Ford de faire appel au cabinet Oneida, spécialisé dans la réindustrialisation des sites. Mme Christine Lagarde présidera le 17 avril prochain le prochain comité de pilotage afin de s'assurer par elle-même de l'avancement du dossier.

J'ai eu, voilà quelques instants, M. Emmanuel Caquot au téléphone. Il m'a indiqué que M. Benett serait reçu aujourd'hui même à Bercy.

Les services de la direction générale de l'industrie comme le cabinet du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi ont l'intention de continuer à entretenir des discussions très serrées avec la personnalité désignée par le président de Ford Europe pour le représenter.

Loin de dire que les choses sont simples, je comprends et je partage tout à fait votre émotion, votre inquiétude et votre implication dans ce dossier.

Les pouvoirs publics - je peux vous l'assurer - joueront leur rôle, comme ils ont commencé à le faire. Ils continueront durant toute cette période à se mobiliser activement sur ce dossier pour tenter de trouver des solutions de diversification qui manquent malheureusement aujourd'hui encore.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je ne doute pas de votre volonté en la matière, mais vous comprenez, je pense, les inquiétudes, la détresse, voire la colère des salariés de Ford.

Depuis 2002, les collectivités locales, le maire de Blanquefort, le président de la communauté urbaine, Vincent Feltesse, le président du conseil régional, Alain Rousset, le maire de Bordeaux, Alain Juppé, et moi-même n'avons de cesse d'interpeller l'État et ses représentants quant à l'épée de Damoclès qui plane sur cette entreprise.

Beaucoup de temps a été perdu ! C'est, vous le comprenez, une véritable catastrophe humaine et économique pour la Gironde.

J'espère donc que des solutions pourront être trouvées très prochainement.

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