Question de M. RALITE Jack (Seine-Saint-Denis - CRC-SPG) publiée le 28/11/2008

Question posée en séance publique le 27/11/2008

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, les députés discutent le projet de loi sur le service public de l'audiovisuel, « historique », dit M. Sarkozy, son auteur, illuminé un certain 8 janvier, et qui, depuis, en direct ou par intermédiaires éblouis, fait tout pour être le berger de la jouissance et de l'éducation du peuple. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste. – Protestations sur les travées de l'UMP.) La première confiée à la télévision commerciale de son ami Bouygues régalé ; la seconde à ce qui restera de la télévision publique dont il nommera et révoquera le président muselé.

Cela nous vaut d'écoper les paroles d'or de M. Copé, qui fabriquent du plomb.

M. Jean-Pierre Godefroy. Excellent !

M. Jack Ralite. Après les démissions des élus de l'opposition de sa commission, le rejet roboratif du représentant de la BBC, huit professionnels, qui en étaient, écrivent : « Ce groupe de télévision, indispensable à la bonne marche de la Cité, va être amputé. Il va devoir vivre avec des béquilles. »

On discute avec ce projet, comme aux états généraux de la presse, et dans le débat sur la recherche et l'éducation, de pensée, de création, d'information, d'innovation, de désirs, de leur besoin de liberté, de pluralisme, d'indépendance. Sur ces dimensions capitales de la vie nationale, qui, bafouées, transformeraient notre République en démocratie au plafond bas, on nous oblige à un demi-débat d'urgence pour attacher le peuple au quotidien, rêvant qu'il renonce à l'usage de sa volonté.

« L'homme symbolise comme il respire. ». Vous trafiquez le monde des symboles, la fabrication de l'imaginaire populaire, selon la maxime « on noue les bœufs par les cornes et les hommes par le langage ».

Je pose la question du financement du service public. L'État répond toujours « nous compenserons ». Je n'en crois rien, les services publics, qu'il s'agisse des hôpitaux, de la poste ou de l'éducation nationale, étant sacrifiés par la révision générale des politiques publiques, ou RGPP.

Mais je rêve d'être convaincu, aimant la télévision qui concerne 98 % des Français. J'aimerais avoir de vrais chiffres, n'oubliant pas la compensation en programmes du temps libéré par la publicité, le montant des indispensables crédits de développement, notamment pour les nouvelles technologies, les engagements de Bruxelles sur les taxations de Bouygues et des fournisseurs d'accès à internet, les FAI. Et pas sur un an mais sur dix, comme à la BBC, pour garantir, pérenniser dignement la vie de l'audiovisuel public.

M. le président. Il ne vous reste que quinze secondes, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Sueur. Mais c'est intéressant !

M. Alain Gournac. La question !

M. Jack Ralite. Autrement, je serai tenté de croire, non pas Mme Albanel qui nous dit qu'aucun emploi ne sera touché, mais plutôt le ventriloque du projet, M. Lefebvre (M. Jean-Pierre Michel applaudit), qui, annonçant 2 000 licenciements – ajoutons-y les emplois externes induits –, provoque la légitime colère de l'intersyndicale de France Télévisions, que notre commission des affaires culturelles a reçue hier avec beaucoup d'intérêt.

M. le président. Posez votre question, mon cher collègue !

M. Jack Ralite. Démontrez-nous, monsieur le Premier ministre,…

M. René-Pierre Signé. Il n'est pas là !

M. Jack Ralite. …que la suppression de la publicité qui pollue ne va pas se transformer en absence de publicité qui tue le service public ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Louis Carrère. C'est Joe Dalton ! (Sourires.)


Réponse du Secrétariat d'État aux Relations avec le Parlement publiée le 28/11/2008

Réponse apportée en séance publique le 27/11/2008

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Ralite, tout d'abord, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Albanel, qui défend en ce moment même le texte sur l'audiovisuel à l'Assemblée nationale.

M. Didier Boulaud. Elle va avoir du mal !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. La somme de 450 millions d'euros que l'État s'est engagé à compenser pour la suppression de la publicité est déjà inscrite dans le budget voté par l'Assemblée nationale pour 2009.

M. David Assouline. Cela ne suffit pas !

Mme Raymonde Le Texier. La commission Copé avait parlé de 650 millions d'euros !

M. Bernard Piras. L'État ne respecte pas ses engagements !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Elle figure également dans le texte actuellement débattu à l'Assemblée nationale et qui viendra en discussion devant le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

D'ailleurs, la somme en question n'a pas été estimée par l'État ni par M. Eric Woerth. C'est la direction de France Télévisions elle-même qui l'a arrêtée.

M. Bernard Piras. Cette somme est insuffisante !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Si le groupe France Télévisions évalue le manque à gagner résultant de la suppression de la publicité à 450 millions d'euros et que l'État s'engage à compenser cette somme, nous sommes à l'équilibre. Cessez d'imaginer que l'État a pris l'initiative de faire une évaluation, qui ne correspondrait pas à celle de France Télévisions !

Monsieur Ralite, je sais, même si je n'y étais pas, qu'en 1968, c'est la gauche qui avait déposé une motion de censure quand un gouvernement de droite a voulu introduire la publicité à la télévision. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Bernard Piras. C'était il y a quarante ans !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes vraiment trop drôle, monsieur le secrétaire d'État ! Vous faites rire tout le monde !

Mme Catherine Tasca. Il n'y avait pas de télévision privée en 1968 !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. La gauche est donc mal placée pour venir nous reprocher de penser que France Télévisions et le service public peuvent se dispenser de publicité ; je pense qu'en la matière il faut choisir !

La vérité est simple : nous voulons un service public de qualité qui ne soit plus tenu par l'audimat, un service public…

M. Bernard Piras. Tenu par l'Élysée !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. ...où l'on retrouve du bon théâtre, du bon cinéma, de bonnes émissions culturelles.

Mme Raymonde Le Texier. Des programmes choisis par vous !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que du bon qui ne coûte rien !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Eh bien, regardez ce que nous allons faire ensemble, avec l'entreprise unique de France Télévisions, avec le futur président.

M. Yannick Bodin. Vous croyez au père Noël !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Vous ressassez qu'il sera « désigné par l'État », ce dont je ne disconviens pas. Puis-je vous rappeler, même si vous n'avez pas voté la révision constitutionnelle, que les commissions parlementaires vont dorénavant avoir à s'exprimer sur cette désignation. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. David Assouline. Avec quels pouvoirs ?

M. Bernard Piras. C'est une plaisanterie !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Un nouveau pouvoir pour le Parlement dont vous ne voulez peut-être pas mais qui sera un plus !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous plaisantez !

M. Bernard Piras. On en reparlera !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. En réalité, nous allons mettre en place une télévision de qualité, dont le service public ne sera plus un service sous la dépendance de l'audimat. J'en suis certain, monsieur Ralite, cette télévision vous conviendra parfaitement lorsque vous la regarderez ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On craint l'eau froide !

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