Question de M. COURTOIS Jean-Patrick (Saône-et-Loire - UMP) publiée le 16/07/2009

M. Jean-Patrick Courtois attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la création d'agences techniques départementales (ATD) par les collectivités départementales, notamment en Saône-et-Loire.

Les départements se positionnent comme partenaires des communes et des intercommunalités dans l'exercice de leurs compétences, conformément aux articles L. 3233-1 et L. 5511-1 du code général des collectivités territoriales qui précisent que cette assistance peut-être technique, juridique ou financière.
Le département apporte donc son soutien par le biais d'attribution de subventions et d'aides financières.
Toutefois, les conventions d'accompagnement départementales précisent que les projets portés dans le cadre d'une maîtrise d'ouvrage déléguée seront exclus du bénéfice des aides, comme l'illustre en Saône-et-Loire le règlement d'intervention de la convention départementale d'accompagnement des intercommunalités, dans son dernier alinéa de la partie 4 relative aux « modalités générales d'intervention ».

Cette mesure vise à exclure du bénéfice des aides départementales les délégataires de maîtrise d'ouvrage, tels que les sociétés d'aménagement.
Il est donc à craindre que la collectivité départementale conditionne, dans les faits, son aide aux dossiers préparés et établis par l'ATD sans oublier le risque de voir s'installer une véritable obligation de recours à l'ATD, pour bénéficier des aides de la collectivité départementale.
À terme, une réelle tutelle de fait sur les communes et intercommunalités pourrait s'instaurer par le département, ce qui serait contraire au principe de libre administration des collectivités locales.

Sur le plan structurel, la mise en œuvre de ces ATD mobilise d'importantes ressources financières, humaines et matérielles qui ne cesseront de s'accroître et grèveront à terme les budgets départementaux.
Par ailleurs, elles viennent souvent concurrencer des structures existantes tels que les sociétés d'économie mixte, les conseils libéraux, les bureaux d'études, les agences de développement, les architectes… proposant les mêmes services d'ingénierie de l'aménagement et de maîtrise d'ouvrage déléguée et dont la diversité reste l'une des garanties fondamentales de la liberté de choix des élus.

C'est pourquoi il lui demande dans quelle mesure il serait possible de limiter les effets de cette tutelle de fait, afin de garantir la liberté du maire dans l'exercice de sa compétence générale.

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Transmise au Ministère chargé des collectivités territoriales


Réponse du Ministère chargé des collectivités territoriales publiée le 02/06/2011

L'article L. 3233-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit que le département apporte aux communes qui le demandent son soutien à l'exercice de leurs compétences. L'article L. 5511-1 du CGCT dispose en outre que seuls sont destinataires de l'aide du département les communes et établissements publics intercommunaux du département. L'aide prend la forme d'une assistance d'ordre technique, juridique ou financier. Il ressort en outre de l'article L. 3233-1 du CGCT que les communes et les établissements publics intercommunaux ne sont pas contraints de recourir aux services de l'agence technique départementale. Ces prestations entrant dans le champ concurrentiel, les contrats entre personnes publiques sont soumis au code des marchés publics. Cependant, le droit et la jurisprudence communautaires apportent des tempéraments, avec l'émergence du régime des prestations intégrées ou « in house ». La jurisprudence communautaire (notamment CJCE, 18 novembre 1999, Teckal, aff. C-107/98) a défini deux conditions cumulatives : le contrôle exercé par le département sur l'agence doit être analogue à celui exercé sur ses propres services ; l'agence doit réaliser l'essentiel de son activité pour la ou les collectivités qui le détiennent. Concernant le cas particulier de l'agence technique départementale citée par l'auteur de la question, il peut être noté que : dans le cadre budgétaire défini pour l'agence technique départementale, aucun budget de subvention directe ne semble prévu. Seule est envisagée l'assistance d'experts sur les points technique, juridique, administratif et financier. Elle peut également faire office d'assistance à maîtrise d'ouvrage en phase préopérationnelle, cette charge incombant ensuite à l'assistance à maitrise d'ouvrage désignée par le maitre d'oeuvre ; l'assistance à maîtrise d'ouvrage fournie est gratuite. Si tel n'était pas le cas, il y aurait lieu de procéder à une mise en concurrence et à un marché public conformément à l'article 1er du code des marchés publics. Il va de soi que l'attribution des aides du département ne saurait être subordonnée au recours à une mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage de l'agence technique départementale. Enfin, la liberté du commerce et de l'industrie reste un principe fondamental. Dans sa jurisprudence du 30 mai 1930, chambre syndicale de commerce en détail de la ville de Nevers, le Conseil d'État considère que l'intervention des pouvoirs publics dans un domaine relevant de l'initiative privée ne se justifie que s'il existe « en raison des circonstances particulières de temps et de lieu, un intérêt public » comme par exemple une carence de l'initiative privée. Ainsi, les entités publiques ne peuvent intervenir dans le domaine de l'initiative privée ou concourir à un marché public que dans la limite de leur compétence et si leur intervention n'a pas pour effet de fausser le libre jeu de la concurrence avec les autres opérateurs économiques (Conseil d'État, 31 mai 2006, Ordre des avocats au barreau de Paris). Il s'entend donc que les agences techniques départementales doivent respecter ces principes.

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