Question de Mme VOYNET Dominique (Seine-Saint-Denis - SOC-R) publiée le 24/06/2011

Question posée en séance publique le 23/06/2011

Mme Dominique Voynet. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Plus de trois mois après le tremblement de terre et le tsunami qui ont ravagé le nord-est du Japon, la situation reste plus que critique à Fukushima. Des dizaines de milliers de familles ont été évacuées, une radioactivité importante continue de s'échapper des centrales endommagées. Jusqu'à quand ? Personne n'ose hasarder une réponse. De plus, les installations de pompage et de décontamination de l'eau hautement radioactive contenue dans les enceintes des réacteurs n'ont pu fonctionner que quelques heures. Une seule chose est sûre : l'accident est au moins aussi grave que celui de Tchernobyl.

Quelques jours après ces événements terribles, qui venaient de frapper un pays considéré comme l'un des plus exigeants en matière de sécurité nucléaire, un pays avec lequel nos propres autorités de sûreté entretenaient des liens étroits de coopération, et alors que les experts indépendants à travers le monde et les sites Internet spécialisés considéraient comme probable la fonte des cœurs de plusieurs réacteurs, on dénonçait ici les écologistes, accusés de vouloir « instrumentaliser » ce drame, on jugeait inutile de « sonner le tocsin ».

Et pourtant ! Deux mois et demi plus tard, à quelques heures d'une visite d'experts de l'Agence internationale de l'énergie atomique, l'AIEA, le patron de TEPCO devait finalement avouer que les cœurs de trois réacteurs avaient fondu dès les premiers jours de l'accident.

Ce qui me préoccupe en cet instant, c'est bien sûr la politique énergétique de mon pays et la probabilité presque certaine d'un accident majeur, en France ou en Europe, bien établie par Bernard Laponche et Benjamin Dessus, dont je vous encourage à lire les écrits. Mais c'est aussi l'idée que, une fois de plus, on nous ait, on vous ait menti, une idée qui vient fatalement à l'esprit dès que l'on examine la séquence des événements.

Le 24 mars dernier, Nicolas Sarkozy fut le premier chef d'État se rendre au Japon – ce qui fut salué à juste titre –, accompagné de la ministre de l'écologie et de la fine fleur des experts nucléaires français : Bernard Bigot, administrateur général du Commissariat à l'énergie atomique, Jacques Repussard, directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, Philippe Jamet, commissaire de l'Autorité de sûreté nucléaire, sans oublier, bien sûr, les équipes d'AREVA.

Qu'a dit Naoto Kan au président Sarkozy ? La vérité ? Si c'est le cas, comment se fait-il que nous n'en ayons rien su ? Se serait-il moqué de nous ? Si ce n'est pas le cas, se serait on moquait de lui ? A-t-il demandé et reçu des excuses ?

Pour tirer les leçons de cette séquence de demi-vérités et de grossiers mensonges, d'omissions et de dissimulations, il faut répondre à la question : qui a menti ? TEPCO a-t-il menti au gouvernement japonais ? Le Premier ministre japonais a-t-il menti au Président français ? Les autorités de sûreté et les entreprises japonaises ont-elles menti à leurs homologues français ? Ou bien tous ont-ils menti, convaincus qu'ils étaient que la vérité pouvait avoir des conséquences dramatiques pour l'industrie nucléaire mondiale ?

La transparence n'est pas une option ! Elle est une exigence prioritaire des peuples, ici comme en Italie, en Suisse ou en Allemagne, ici comme au Japon. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Ministère du budget, des comptes publics , de la fonction publique et de la réforme de l'État publiée le 24/06/2011

Réponse apportée en séance publique le 23/06/2011

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, je vous prie à mon tour de bien vouloir excuser Éric Besson ; cela a été rappelé, il est actuellement au Bourget pour défendre le développement de l'industrie aéronautique de notre pays. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Je vous répondrai sans me limiter à la question que vous posez sur le déplacement du Président de la République au Japon et sur le choix du nucléaire, que vous contestez. Il s'agit là de l'un de vos engagements politiques et non de ceux qui construisent la ligne de ce Gouvernement.

Mme Dominique Voynet. Ce n'est pas la question !

M. François Baroin, ministre. La France ne remettra pas en cause sa politique nucléaire pour de très nombreuses raisons. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Raymonde Le Texier. Ce n'est pas la question !

M. Jean-Marc Todeschini. La question, c'est celle de la transparence !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Répondez à la question, pour une fois !

M. François Baroin, ministre. La première est que le nucléaire nous a assuré l'indépendance. Vous le savez, en additionnant production nucléaire et production hydraulique, nous satisfaisons 90 % de nos besoins en électricité ; c'est un élément important.

Pour autant, le développement des énergies renouvelables dans les dix à quinze années à venir fait partie d'une stratégie globale.

M. Jean-Pierre Michel. Blablabla !

M. François Baroin, ministre. J'en viens à la transparence en matière de sécurité nucléaire.

Quatre jours après le drame de Fukushima, le Premier ministre français a saisi l'Autorité de sûreté nucléaire ainsi que le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, afin qu'ait lieu une revue objective et détaillée de la réalité des dispositifs de sécurité sur les centrales nucléaires établies sur notre territoire.

L'Autorité de sûreté nucléaire dira d'ici la fin de l'année quels éléments qu'il conviendra de prendre compte pour garantir encore mieux la sécurité de nos installations. Je rappelle que les standards français de sécurité sont parmi les plus exigeants en la matière.

Cependant, nous n'avons pas attendu les résultats des travaux de cette autorité administrative indépendante puisque, dans le cadre de la visite décennale de la centrale de Fessenheim, il a été décidé de réaliser des travaux d'amélioration et de renforcement de la sûreté sur le réacteur n° 1. Autrement dit, le Gouvernement n'attend pas les résultats prévus pour la fin de l'année et investit dès à présent pour garantir la durée de vie de cette centrale.

M. Paul Raoult. Enfumage !

M. David Assouline. Répondez donc à la question !

M. François Baroin, ministre. Voilà le choix stratégique français. Voilà les modalités et les priorités affirmées en matière de sûreté nucléaire. Pour le reste, je vous laisse le soin de poursuivre vos idées. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. David Assouline. Le reste, c'est ça la question !

M. Roland Courteau. Il faudra la reposer !

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