Question de M. GRIGNON Francis (Bas-Rhin - UMP) publiée le 03/11/2011

M. Francis Grignon attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur le projet d'arrêté sur les mâchefers d'usines d'incinération d'ordures ménagères qui est actuellement en cours de discussion.

Les entreprises travaillent sur la base de la circulaire de 1994 qui définit les conditions strictes de réutilisation des mâchefers provenant d'usines d'incinération. Ainsi, l'utilisation du mâchefer sur de nombreux chantiers a permis d'économiser l'utilisation de granulats naturels et, de ce fait, de générer des économies conséquentes. Or, le projet d'arrêté qui est en cours d'élaboration prévoit de rendre certains seuils encore plus drastiques. Les aménagements de mise en conformité des installations auront une incidence financière pouvant s'élever à plusieurs centaines de millions d'euros au plan national. Ainsi, plus de la moitié des usines d'incinération des ordures ménagères françaises ne produiront plus de mâchefers valorisables dès l'entrée en vigueur de cet arrêté. En outre, il semblerait que l'élaboration de cet arrêté ait été faite sans que les acteurs aient été consultés ou aient eu le temps d'émettre leurs remarques. Il lui demande donc quelles sont les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour préserver cette filière.

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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement publiée le 21/12/2011

Réponse apportée en séance publique le 20/12/2011

M. Francis Grignon. Madame la ministre, ayant rédigé ma question, qui porte sur les inquiétudes que suscite l'arrêté du 18 novembre 2011 sur les mâchefers d'usines d'incinération d'ordures ménagères, avant la publication dudit arrêté, je me suis permis de la faire un peu évoluer.

Les entreprises travaillent sur la base de la circulaire de 1994, qui définit les conditions strictes de réutilisation des mâchefers provenant d'usines d'incinération. Ainsi, l'utilisation du mâchefer sur de nombreux chantiers a permis d'économiser l'utilisation de granulats naturels et a de ce fait engendré d'importantes économies.

Or, l'arrêté du 18 novembre 2011 prévoit de rendre certains seuils encore plus drastiques.

Les aménagements de mise en conformité des installations auront une incidence financière pouvant s'élever à plusieurs centaines de millions d'euros à l'échelle nationale. Ainsi, plus de la moitié des usines d'incinération des ordures ménagères françaises ne produiront plus de mâchefers valorisables dès l'entrée en vigueur de cet arrêté. Il ne restera donc que la mise en décharge pour le traitement de ces mâchefers.

Or l'Europe a décidé de la création d'une société européenne du recyclage en adoptant la directive relative aux déchets du 19 novembre 2008. Celle-ci a été transposée en droit français par l'ordonnance du 17 décembre 2010, qui reconnaît formellement la possibilité de transformer des déchets en produits.

Le tout nouvel arrêté ne veut pas prendre en compte cette évolution : il maintient le statut de déchets pour les graves de mâchefers sortant d'une installation de maturation et de transformation, c'est-à-dire après un recyclage qui est justement le garant de la transformation d'un déchet en produit.

Je souhaiterais donc savoir, madame la ministre, si le Gouvernement entend faire évoluer cet arrêté, en particulier s'agissant de la mise en application de ces dispositions au 1er juillet 2012, ce qui paraît un peu précipité.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur Grignon, l'arrêté ministériel relatif au recyclage en technique routière des mâchefers d'incinération de déchets non dangereux a été publié, vous l'avez souligné, très récemment.

Ce texte résulte de l'engagement n° 264 du Grenelle de l'environnement et des travaux menés depuis par plusieurs groupes de travail sur cette thématique depuis 2009. À ces travaux ont notamment été associés des représentants des syndicats professionnels de l'incinération et des travaux publics, des représentants des collectivités territoriales, lesquelles sont évidemment concernées, et des représentants des associations de protection de l'environnement.

Au-delà des travaux conduits dans ce cadre, l'arrêté ministériel précité a fait l'objet d'une nouvelle concertation auprès du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques et de la Commission consultative d'évaluation des normes, en octobre et novembre 2011, afin de veiller à ne pas alourdir inutilement la réglementation.

Les seuils de qualité des mâchefers destinés au recyclage en technique routière sont issus d'essais, d'études et de modélisations conduits sur la base d'hypothèses raisonnablement conservatrices au regard des usages prévus. Ils sont cohérents avec les critères de qualité mentionnés dans le guide sur l'acceptabilité de matériaux alternatifs en technique routière qui a été publié par le SETRA, le service d'études sur les transports, les routes et leurs aménagements.

Les mâchefers sont des résidus solides de l'incinération et leur potentiel polluant dépend notamment de la qualité des déchets entrant dans l'installation et des conditions de leur combustion. Compte tenu des travaux de mise en conformité des incinérateurs réalisés depuis 2005, il semble, et c'est important, que les dispositions fixées par l'arrêté précité n'appellent pas de nouveau investissements.

En revanche, la mise en place de filière de gestion des déchets dites « à responsabilité élargie des producteurs », telle que la filière sur les déchets diffus spécifiques, et le renforcement de la performance de la filière relative aux piles et accumulateurs doivent conduire à détourner des déchets qui peuvent souiller, aujourd'hui encore, la fraction résiduelle des déchets ménagers reçus dans les incinérateurs.

Le dispositif, qui prévoit par ailleurs l'apport d'un soutien financier non négligeable aux collectivités, permet de prévenir la production de mâchefers comportant une charge polluante incompatible avec leur valorisation. C'est donc dans son ensemble qu'il est vertueux, et non pas seulement dans certains de ses volets.

Enfin, compte tenu des enjeux attachés à la valorisation des déchets non dangereux notamment en technique routière, l'arrêté ministériel du 18 novembre 2011 porte les mesures réglementaires et opposables qui permettent de garantir un haut niveau de protection de l'environnement et de la santé humaine pour autant que les critères qu'il fixe et les usages qu'il autorise soient satisfaits par les opérateurs concernés.

J'estime donc que le dispositif est aujourd'hui assez complet, mais il est possible, compte tenu de sa mise en place récente, qu'il soit réévalué d'ici à quelques mois.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. J'ai bien évidemment confiance, madame la ministre, en toutes les précisions que vous nous apportez sur ce sujet technique très complexe et je vous remercie de votre réponse.

Je souhaite simplement qu'il n'y ait pas trop d'incidences sur les finances des collectivités locales, qui sont parties prenantes en la matière et qui sont, elles aussi, touchées par les difficultés économiques actuelles. Je suivrai donc avec beaucoup d'attention les effets de la mise en œuvre de l'arrêté.

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