Question de M. LENOIR Jean-Claude (Orne - UMP) publiée le 24/11/2011

M. Jean-Claude Lenoir attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative sur les problèmes qui se posent dans certains établissements pour pourvoir au remplacement des enseignants absents. C'est le cas en particulier au Lycée Napoléon de L'Aigle, dans l'Orne, où le professeur de français d'une classe de première L est absent depuis plus d'un mois. Aucun remplaçant n'est apparemment disponible pour le remplacer. Or, la classe concernée était déjà restée sans professeur de Français l'an dernier pendant plusieurs mois. Cette situation est d'autant plus préjudiciable pour ces lycéens qu'il s'agit d'une discipline essentielle en perspective des épreuves du baccalauréat qu'ils doivent passer cette année. Compte tenu des dispositions qui ont été prises pour faciliter le remplacement des enseignants absents, il s'étonne qu'aucun remplaçant ne puisse intervenir dans cet établissement et le remercie de bien vouloir tout mettre en oeuvre pour qu'une solution soit trouvée dans les meilleurs délais.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative publiée le 11/01/2012

Réponse apportée en séance publique le 10/01/2012

M. Jean-Claude Lenoir. Même si la question que je comptais poser à M. le ministre de l'éducation nationale, que je remercie d'être présent, a déjà obtenu une réponse sur le fond - nous avons d'ailleurs eu de nombreux échanges à ce sujet -, certains aspects du problème méritent d'être abordés de manière plus large en séance publique.

Au lycée Napoléon de L'Aigle, dans l'Orne, un professeur de lettres a été longuement malade lors de l'année scolaire précédente, puis à nouveau peu après la rentrée de cette année. Les parents et les élèves que j'ai rencontrés étaient désemparés devant cette absence prolongée, car l'enseignement du français est très important pour les lycéens, surtout dans la filière littéraire. J'ai été particulièrement sensible à leur désarroi.

Je le dis tout de suite : les services de l'académie de Caen se sont immédiatement mobilisés. Mme la rectrice a ainsi entrepris de nombreuses démarches pour essayer de trouver un remplaçant. Au sein même de l'établissement, plusieurs enseignants ont même pallié cette absence en assurant, dans l'intérêt des élèves, une partie des heures que leur collègue aurait dû dispenser.

Ce problème a finalement pu être réglé d'une manière qui semble satisfaisante : une enseignante, qui prévoyait initialement de devenir professeur des écoles, a suivi une formation accélérée qui lui a permis d'occuper ce poste. Dans ces conditions, pourquoi revenir sur le sujet, pourrait-on me demander ? Je le fais afin d'aborder deux problèmes de portée générale.

Le premier problème, que j'ai constaté à l'occasion de cette affaire, est qu'il est devenu extrêmement difficile de trouver des enseignants pour les matières littéraires. Ces dernières attirent beaucoup moins les jeunes. Il en va de même, paraît-il, des mathématiques. Or la défense de la langue française, notre patrimoine, justifie son enseignement du plus jeune âge jusqu'au lycée. Je vous invite donc, monsieur le ministre, ainsi que l'ensemble des parlementaires à réfléchir sur ce point.

Le second problème, qui m'est apparu lors de nos échanges - je vous remercie d'ailleurs d'avoir suivi cette affaire et de m'avoir tenu informé par écrit et par téléphone -, est que, selon la réponse préparée par vos services, il est difficile de trouver des remplaçants acceptant de se rendre dans l'Orne, notamment à L'Aigle.

En découvrant cette réponse, j'ai été interloqué. En tant qu'élu de l'Orne, j'ai du mal à admettre ce type de discours, d'autant que L'Aigle est une ville relativement proche de Paris, correctement desservie et dans laquelle on vit bien. Je n'ose donc imaginer la réaction de certains enseignants lorsqu'on leur propose de s'installer dans des territoires moins attrayants. Je ne veux pas parler, monsieur le ministre, d'un département que vous connaissez bien, mais les habitants d'autres départements pourraient se sentir concernés.

En définitive, je souhaite que la question de l'enseignement des lettres et celle du remplacement des professeurs absents, qui demeure préoccupante, reçoivent des réponses satisfaisantes. Je suis persuadé que vous trouverez des solutions à la fois positives et rassurantes. D'une façon générale, je souhaite que la question de l'attractivité de nos territoires pour les candidats à des postes d'enseignant soit examinée dans des conditions différentes de celles qui étaient décrites dans le courrier que vos services m'ont adressé.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez à propos du remplacement des enseignants absents. Cette question très importante, si elle n'est pas nouvelle dans notre système éducatif, appelait de notre part des réponses nouvelles.

Les chiffres en témoignent, les moyens consacrés aux remplacements dans l'éducation nationale sont très significatifs.

Ainsi, dans le premier degré, 8 % des emplois d'enseignants sont affectés au remplacement, ce qui correspond à 27 000 remplaçants et permet de couvrir environ 90 % des absences de courte comme de longue durée.

Dans le second degré, les moyens de remplacement sont stables en nombre mais plus diversifiés. Il y a non seulement des titulaires de zone de remplacement, qui, comme leur nom l'indique, sont des titulaires, mais aussi des contractuels en contrat à durée indéterminée, en contrat à durée déterminée et des vacations.

Grâce à ce dispositif, 96 % des absences sont aujourd'hui remplacées. Certes, 4 % ne le sont pas, ce qui est encore trop, même si c'est le niveau le plus bas depuis 1995. C'est pourquoi je mène en la matière un combat permanent. J'ai ainsi voulu l'année dernière renforcer la souplesse du système de remplacement. J'ai donc demandé que le délai de carence, qui conduisait le plus souvent à ne remplacer que les absences supérieures à quatorze jours, soit supprimé. Dès le premier jour d'absence, le chef d'établissement intervient.

J'ai également tenu à assouplir, en levant les barrières administratives, les relations inter-académies. Le fait que les titulaires de zone de remplacement soient affectés par académie avait en effet pu conduire à quelques bizarreries, avec des titulaires disponibles dans une académie et des postes vacants dans une autre.

S'agissant de l'académie dont relève votre département, vous avez évoqué la question de l'attractivité des postes, question qui ne me semble pas concerner exclusivement l'éducation nationale, comme j'ai pu le constater, étant moi-même élu dans un département rural où tant les recrutements dans le domaine privé que les mutations des personnels de l'État présentent parfois des difficultés.

C'est notre rôle de renforcer l'attractivité des postes concernés, mais je tiens à souligner que les enseignants qui les occupent sont en général très satisfaits de participer à un système éducatif de proximité et de qualité au service de nos concitoyens. Aussi, s'il y a eu à cet égard une maladresse dans le courrier qui vous a été adressé, je m'en excuse auprès de vous.

Vous m'interpellez sur le cas particulier du lycée Napoléon de L'Aigle, où, comme vous l'avez très justement indiqué, une absence est restée pendant trop longtemps non remplacée. Nous avons cependant trouvé une solution provisoire, puis, dès le 5 décembre, le remplacement est devenu effectif, et cela de façon tout à fait satisfaisante, avec l'arrivée d'un professeur dédié.

Vous avez également évoqué la question de l'attractivité du métier d'enseignant. Vous avez rappelé que, non seulement dans le domaine des lettres, mais aussi dans le domaine des sciences, nous avions des difficultés à pourvoir les postes. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de revaloriser sensiblement la rémunération de nos enseignants en début de carrière, ce que le non-remplacement nous a permis de faire. Je rappelle que le 1er février, dans quelques jours donc, la barre symbolique des 2 000 euros sur la première fiche de paie des enseignants sera franchie. Cela représente 18 % de plus qu'au mois de janvier 2007 et donc un effort considérable dans un contexte très difficile.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, je vous remercie à nouveau d'avoir pris la peine de vous déplacer au Sénat pour me répondre directement et personnellement.

J'ai entendu avec beaucoup d'intérêt les réponses que vous m'avez apportées, en particulier sur la façon dont les remplaçants pourront être mobilisés grâce, d'une part, à la suppression du délai de carence - devoir laisser passer quatorze jours avant d'entreprendre un remplacement de poste constituait en effet un vrai problème - et, d'autre part, à la « prospection » désormais possible auprès des académies voisines.

En vous remerciant donc et en vous assurant qu'il n'y a pas de malentendu au sujet de la lettre que vous m'avez envoyée, je terminerai en soulignant simplement qu'il nous appartient en effet d'œuvrer à l'attractivité de nos territoires.

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