Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - UMP) publiée le 18/10/2012

M. Daniel Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la situation de la filière tabacole française et sur les inquiétudes des producteurs de la Charente-Maritime, dans un contexte de diminution des aides européennes.

Afin de maintenir un haut niveau de qualité des produits et malgré le découplage des aides communautaires, l'avenir de la filière nécessitait une amélioration de la productivité du secteur au travers de la modernisation et de la revalorisation des prix commerciaux négociés entre les producteurs et les industriels. Dans le cadre du programme de développement rural hexagonal (mesures 121C2 et 121C6) les exploitations agricoles et les CUMA peuvent bénéficier d'aides à l'investissement afin d'accroître la compétitivité des exploitations. De même, pour optimiser les fonds alloués au financement des investissements a été mis en place un dispositif d'« aide aux investissements pour les exploitations et CUMA tabacoles » financé par FranceAgrimer et le FEADER (mesure 144), les régions pouvant utiliser les fonds FEADER pour le financement de cette dernière, ainsi que pour l'ensemble des mesures du programme de développement rural hexagonal. Les producteurs ont donc investi dans l'esprit du développement durable, soit pour des installations de séchage aux copeaux de bois, soit pour des fours de séchage plus performants afin de maîtriser les coûts ou pour des installations de goutte à goutte. Or il semblerait que dans la région Poitou-Charentes les planteurs qui pouvaient bénéficier, lorsque le montant des aides baissait de plus 25 % d'une aide substantielle de 9 000€/exploitation sur 3 ans, n'aient pas eu accès à ces mesures. Force est de constater que les dispositifs d'aides aux producteurs font état de dysfonctionnements sur le terrain, depuis la réforme à mi-parcours de la PAC, mettant ainsi en difficulté les planteurs de tabac, qui doivent faire face aux hausses de prix de l'énergie et du coût de la main d'œuvre. Le sud de la Charente-Maritime est particulièrement concerné.

En conséquence, il lui demande quelles mesures il compte mettre en œuvre pour accompagner les producteurs de tabac, dont certains ont d'importantes difficultés de trésorerie, pouvant impacter la pérennité de leurs exploitations.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 20/02/2013

Réponse apportée en séance publique le 19/02/2013

M. Daniel Laurent. Monsieur le ministre, je souhaite vous faire part des préoccupations des producteurs de la filière tabacole de France, plus particulièrement de mon département de la Charente-Maritime, dans un contexte de diminution des aides européennes.

Afin de maintenir un haut niveau de qualité des produits et malgré le découplage des aides communautaires, l'avenir de la filière nécessitait une amélioration de la productivité du secteur, au travers de la modernisation et de la revalorisation des prix commerciaux négociés entre les producteurs et les industriels.

Dans le cadre du programme de développement rural hexagonal - plus précisément de ses mesures 121 C2 et 121 C6 -, les exploitations agricoles et les coopératives d'utilisation du matériel agricole, les CUMA, peuvent bénéficier d'aides à l'investissement, afin d'accroître la compétitivité des exploitations.

De même, pour optimiser les fonds alloués au financement des investissements, a été mis en place un dispositif d'aide aux investissements pour les exploitations et CUMA tabacoles, financé par FranceAgriMer et le Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER : il s'agit de la mesure 144 du programme de développement rural hexagonal. Les régions peuvent utiliser les fonds FEADER pour le financement de cette mesure, ainsi que pour l'ensemble des autres mesures du programme.

Les producteurs ont donc investi, dans l'esprit du développement durable, soit pour des installations de séchage aux copeaux de bois, soit pour des fours de séchage plus performants, afin de maîtriser les coûts, ou pour des installations de goutte à goutte.

Or il semblerait que, dans la région Poitou-Charentes, les planteurs, qui, lorsque le montant des aides baissait de plus de 25 %, pouvaient bénéficier d'une aide substantielle de 9 000 euros par exploitation sur trois ans, n'aient pas eu accès à ces mesures.

Force est de constater que, depuis la réforme à mi-parcours de la politique agricole commune, la PAC, les dispositifs d'aides aux producteurs font l'objet de dysfonctionnements sur les territoires, mettant en difficulté les planteurs de tabac, qui doivent faire face aux hausses de prix de l'énergie et du coût de la main-d'œuvre.

Le sud de la Charente-Maritime est particulièrement concerné, d'autant que les deux dernières campagnes ont causé des pertes importantes, consécutives aux conditions climatiques, pesant ainsi lourdement sur la caisse d'assurance des producteurs. Les coopératives Poitou-Tabac et Périgord-Tabac sont confrontées à une diminution de surface et de volumes récoltés. Quant au nombre de producteurs, il est passé de 121 en 2010 à 80 en 2012.

Par ailleurs, au-delà des efforts de productivité que pourraient assurer les producteurs, le marché de la matière première qu'est le tabac est complètement déséquilibré sur le plan international. La France et l'Europe se trouvent confrontées à la concurrence directe des pays émergents, et ce depuis l'arrêt des soutiens directs dans le cadre de la PAC, à partir de la campagne 2010.

Les négociations menées par la Fédération nationale des producteurs de tabac, en relation avec la FNSEA, ont permis de débloquer 18 millions d'euros pour les campagnes 2011 et 2012. Les producteurs ont pu retrouver un meilleur équilibre de leur compte de résultat du fait de cette prime à la qualité.

Or, cette décision ne vaut que pour deux ans. Il est donc impératif de la reconduire dans le cadre de la nouvelle réforme de la PAC 2014-2020. Précisons que, si les dispositifs budgétaires ne sont pas définis dans les délais utiles pour mettre en œuvre la nouvelle PAC en 2014, il convient qu'une enveloppe de 9 millions d'euros supplémentaires soit reconduite en 2014 pour préserver la prime à la qualité.

En conséquence, monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour accompagner les producteurs de tabac, dont certains sont confrontés à d'importantes difficultés de trésorerie pouvant affecter la pérennité de leurs exploitations ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Monsieur le sénateur, vous le savez, trois aides publiques existent aujourd'hui en faveur du tabac.

La première est une aide aux investissements pour les exploitations et les CUMA tabacoles, dispositif du plan de développement rural hexagonal, financé par FranceAgriMer - à hauteur de 1,4 million d'euros -, par les régions françaises et par le FEADER, pour les années 2011-2013.

Dans le cadre de ce dispositif, FranceAgriMer prévoit une enveloppe de 500 000 euros pour 2013, dans un contexte budgétaire que je n'ai pas besoin de rappeler. Le conseil régional de Poitou-Charentes a ouvert, via FranceAgriMer, une enveloppe de 228 000 euros couvrant l'ensemble des projets prévus. Plus de 85 % de ces crédits avaient été engagés au 30 novembre 2012 et, au regard des compléments de projets portés par les professionnels, l'ensemble des crédits prévus par la région seront utilisés.

La deuxième aide porte sur la restructuration des exploitations tabacoles, mesure liée, en particulier, à un cofinancement du FEADER. Le programme prévoit une aide de près de 9 000 euros par exploitation pour les années 2011 à 2013. Ce dispositif spécifique, qui s'adressait à un certain nombre d'exploitations, n'a pas été ouvert par le conseil régional de Poitou-Charentes.

Enfin, une troisième aide, « à la qualité du tabac », au titre de l'article 68 du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009, permet de procéder à des modulations. Cette aide s'élève à 9 millions d'euros par an pour les années 2012 et 2013. Elle a été mise à la disposition de la France : pour 2012, un acompte de 50 % du montant provisoire de l'aide a été versé au cours des mois de décembre et de janvier derniers.

Je suis particulièrement attentif à ce que ces aides puissent être mises en œuvre. En effet, dans un contexte de négociation de la réforme de la politique agricole commune et de pressions exercées sur le tabac au nom d'impératifs sanitaires - vous les connaissez, monsieur le sénateur -, nous devons faire en sorte que la filière tabacole puisse s'adapter et, surtout, se spécialiser dans une production de qualité. Je suis parfaitement d'accord sur ce point.

Dans le même temps, dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune et des discussions qui la précéderont, nous devons aussi anticiper un certain nombre de mesures, en particulier la fin, programmée par la Commission européenne, du fameux article 68 et des aides à la qualité.

Ensemble, nous devons donc être clairement tournés vers l'aide à la filière tabacole, pour permettre à cette dernière de s'adapter rapidement.

La réforme de la PAC prendra peut-être un peu plus de temps que prévu : monsieur le sénateur, profitons de ces délais pour assurer ce que vous appelez de vos vœux ! Profitons-en pour donner à la filière la capacité d'améliorer ses qualités et pour faire en sorte que la restructuration en cours tienne compte de la situation actuelle des producteurs de tabac en France, en particulier dans la région Poitou-Charentes.

M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse encourageante.

Sachez que je veillerai à ce que votre défense de la filière tabacole soit la plus opérationnelle possible. En effet, si, comme vous l'avez très justement déclaré, le tabac peut voir sa consommation décriée, il crée aussi des emplois en milieu rural, pour des personnes qui ne trouvaient pas de travail.

Il faut donc défendre cette filière importante, dont vous avez vu qu'elle est dès à présent en grande difficulté, de nombreuses exploitations ayant déjà disparu.

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