Question de M. DASSAULT Serge (Essonne - UMP) publiée le 09/11/2012

Question posée en séance publique le 08/11/2012

Concerne le thème : La dépense publique

M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, dans la situation financière critique où nous sommes – la croissance est loin d'être assurée et les prévisions de recettes budgétaires sont très optimistes –, vous augmentez les impôts pour financer des dépenses nouvelles qui ne sont pas nécessaires, à seule fin de satisfaire vos électeurs.

De plus, en augmentant les dépenses, vous alertez les agences de notation, qui vous ont placé sous haute surveillance, car vous faites le contraire de ce qu'il faudrait faire, c'est-à-dire baisser les dépenses et les impôts !

Une fois que notre note aura été dégradée et que les taux d'intérêt appliqués à notre dette auront augmenté, vous ne pourrez plus emprunter 160 milliards par an, sinon à des conditions exorbitantes : la France, à l'instar de la Grèce ou de l'Espagne, se trouvera alors en cessation de paiement. Le risque est énorme, et il n'est pas raisonnable de le courir.

La croissance sera faible, car elle dépend de la production et du niveau des exportations, ainsi que de l'euro, qui devrait être dévalué, car il est trop fort par rapport au dollar, ce qui réduit notre compétitivité.

Les 35 heures, que vous refusez d'abroger, vous coûtent, à cause des allégements de charges, 21 milliards d'euros par an, ce qui n'est tout de même pas rien !

M. Ronan Kerdraon. Vous avez eu le temps de les supprimer !

M. Jean-Vincent Placé. Vous avez eu dix ans pour le faire !

M. Serge Dassault. Cela grève nos coûts de production, car on ne travaille pas assez : c'est en France que l'on travaille le moins ! Il est d'ailleurs anormal que le rapport Gallois n'en tienne aucun compte.

En relevant l'ISF et la taxation des plus-values, vous découragez les créateurs d'entreprise et les investisseurs, qui préfèrent partir plutôt que perdre leur patrimoine. Ils investissent dorénavant en Grande-Bretagne ou en Belgique, ce qui accroît le chômage en France.

M. Jean-Louis Carrère. Parlez-nous de vos avions !

M. Serge Dassault. Pour réduire les dépenses, il faut commencer par ne pas les augmenter ! Vouloir couvrir les dépenses nouvelles en accroissant les impôts est une lourde erreur, qui ne peut que concourir à aggraver le chômage.

Il aurait été tellement plus facile de ne pas embaucher 60 000 nouveaux fonctionnaires, que vous devrez payer pendant soixante ans, retraite comprise, de ne pas relever le SMIC, de ne pas augmenter l'allocation de rentrée scolaire, de ne pas revenir à la retraite à 60 ans, de ne pas créer des emplois d'avenir non marchands qui ne serviront à rien, bref de ne pas distribuer tous ces cadeaux…

M. Ronan Kerdraon. Ce ne sont pas des cadeaux aux riches !

M. Serge Dassault. Vous maintenez des dépenses fiscales liées aux aides à l'emploi à hauteur de 10 milliards d'euros et vous octroyez 3 milliards d'euros d'exonérations ciblées.

M. Guy Fischer. Vous vivez de l'argent public !

M. Serge Dassault. L'urgence absolue est d'éviter une dégradation de notre notation et une augmentation des taux d'intérêt appliqués à notre dette souveraine. Il faut tout faire, dans un esprit de solidarité nationale, pour que cela n'arrive pas.

M. Éric Bocquet. La question !

M. Serge Dassault. Surtout, il faut atteindre l'objectif de 3 % de déficit en 2013.

Monsieur le ministre, avez-vous conscience du risque que nous courons ? Renoncerez-vous un jour à vos mesures idéologiques, comme les 35 heures et l'ISF,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Louis Carrère. C'est long !

M. Serge Dassault. … pour en adopter d'autres, plus réalistes, qui seules permettraient le redressement de la France, dans une perspective d'union nationale si nécessaire ?

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Réponse du Ministère chargé du budget publiée le 09/11/2012

Réponse apportée en séance publique le 08/11/2012

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le sénateur, il est évidemment toujours plus difficile de répondre à un reproche que de le formuler ! Je vais néanmoins essayer de le faire de la manière la plus précise possible.

Nous sommes, comme vous, extrêmement sensibles au risque d'augmentation des taux d'intérêt de la dette de notre pays ; nous faisons d'ailleurs tout pour l'écarter, avec un certain succès pour l'instant, les taux d'intérêt auxquels notre pays emprunte n'ayant jamais été aussi bas.

Par ailleurs, vous craignez une dégradation de la note de la France. Je me permets de vous rappeler qu'une telle dégradation s'est produite dans le passé : elle fut le fait d'une seule agence de notation et intervint sous un gouvernement précédent, auquel vous n'avez pas dû manquer, à l'époque, d'adresser de vifs reproches, tels que ceux que vous m'adressez aujourd'hui...

Si nous bénéficions à l'heure actuelle de taux d'intérêt bas, cela tient à deux raisons essentielles.

D'une part, les investisseurs ne peuvent, dans la zone euro, se tourner que vers deux pays suffisamment sûrs : l'Allemagne et la France. Nous bénéficions d'un avantage comparatif par rapport à d'autres pays de la zone euro.

D'autre part, la crédibilité de nos politiques budgétaires et financières est reconnue par le FMI lui-même, comme en témoigne une déclaration récente. Je comprends qu'il soit un peu difficile, pour des parlementaires de l'opposition, de nous accorder le même crédit qu'un organisme international, peut-être plus enclin à l'objectivité, mais telle est la réalité...

Concernant les critiques que vous avez pu formuler sur les 35 heures, permettez-moi de vous rappeler, monsieur le sénateur, que c'est en 2007, donc sous l'empire d'une majorité à laquelle vous apparteniez, que ce dispositif a été généralisé à toutes les entreprises, c'est-à-dire à celles de moins de vingt salariés, pour la simple raison que votre politique des heures supplémentaires entrait en jeu à partir de la trente-cinquième heure travaillée.

À cet égard, il est d'ailleurs assez paradoxal de défendre à la fois le recours aux heures supplémentaires et la suppression des 35 heures : si vous voulez des heures supplémentaires, il faut les 35 heures !

M. Jean-Jacques Mirassou. Et voilà, jolie démonstration !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il faut choisir !

Vous m'avez adressé d'autres critiques concernant l'ISF, les prélèvements obligatoires, les aides à l'emploi. Dans l'urgence, il est impossible de procéder aux suppressions d'emplois que vous appelez de vos vœux : cela ne peut se faire, vous le savez, qu'en début d'année, dans le cadre d'un projet de loi de finances initiale, certainement pas dans celui d'un projet de loi de finances rectificative.

Toutefois, je le répète, il y aura bien, l'an prochain, 2 317 suppressions de postes au sein de l'appareil d'État et 1 303 chez les opérateurs. J'espère que ces éléments au moins sont de nature à vous rassurer ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Jean-Louis Carrère. Très bien, monsieur le ministre !

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour la réplique.

M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, cher ami, pourrais-je même dire (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.), ce n'est pas parce qu'une mauvaise politique a été menée dans le passé qu'il faut continuer à en parler aujourd'hui : c'est vous qui êtes désormais au pouvoir, il vous revient de faire mieux.

Les taux d'intérêt sont bas, certes, mais il ne faut pas croire au père Noël : ils vont malheureusement augmenter, parce que vous ne tiendrez pas l'objectif de 3 % de déficit en 2013.

M. Jean-Jacques Mirassou. Quelle obsession !

M. Serge Dassault. En effet, vous n'aurez pas les recettes nécessaires, tandis que vous devrez supporter des dépenses supplémentaires.

Donnons-nous rendez-vous dans quelques mois pour en reparler. Ce que je vous dis, c'est pour le bien de la France ! Nous sommes prêts à travailler avec vous pour son avenir ! (Mlle Sophie Joissains et M. Alain Richard applaudissent.)

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