Question de M. RAINAUD Marcel (Aude - SOC) publiée le 29/11/2012

M. Marcel Rainaud attire l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur les conséquences d'une mesure proposée par le rapport Gallois : le passage du taux de TVA intermédiaire de 7 % à 10 %.

En effet, si cette mesure devait concerner le secteur HLM elle constituerait sans nul doute un handicap supplémentaire pour atteindre l'objectif de 150 000 nouveaux logements sociaux voulu par le Gouvernement.

L'impact avait déjà été lourd lors du passage du taux de TVA de 5,5 % à 7 % pour les opérations réalisées dans le secteur du logement social, et l'Union sociale pour l'habitat avait estimé à 225 millions d'euros par an l'augmentation des dépenses suite à ce changement de taux. Les conséquences se sont traduites par la difficulté à monter des opérations nouvelles de constructions par les organismes sociaux, et par une augmentation des loyers pour les occupants.

Le logement social devrait être un service de première nécessité comme le considère le Gouvernement qui en fait une priorité absolue. Il souhaiterait savoir si elle serait prête à faire rétablir le taux de TVA à 5 % pour les opérations réalisées dans le secteur HLM qui permettrait de dégager 270 millions d'euros. En ce qui concerne la proposition du rapport Gallois, il lui demande de bien vouloir lui indiquer sa position.

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Transmise au Ministère chargé du budget


Réponse du Ministère des droits des femmes publiée le 30/01/2013

Réponse apportée en séance publique le 29/01/2013

M. Marcel Rainaud. La politique du logement est l'un des grands chantiers de la République. Nous devons garantir un toit de grande qualité pour tous.

Le logement étant considéré comme une priorité nationale, des mesures fortes ont été prises, telles que la cession du foncier public avec une forte décote pouvant aller jusqu'à la gratuité ou le renforcement des obligations en matière de construction de logements sociaux.

Aujourd'hui, les objectifs de construction sont ambitieux : 150 000 logements locatifs sociaux, 40 000 logements locatifs privés, 310 000 mises en chantier. Une telle ambition est incontournable si l'on veut répondre aux attentes d'une population en mal de logements.

Madame la ministre, lors de la discussion du projet de loi de finances, nous avons voté une augmentation de près de 20 % des financements consacrés au logement et à l'égalité des territoires.

Nous changeons d'époque : alors que le logement social était le grand oublié des années de gouvernement de droite, il donne aujourd'hui à lui seul sa portée concrète à la notion d'intérêt général.

La politique du logement social est en effet une politique d'intérêt général qui participe à la santé économique du pays, chaque euro investi pour la construction ou la réhabilitation créant de l'emploi non délocalisable, aussi bien dans le secteur du BTP qu'au sein des organismes sociaux. Elle contribue à la solidarité et à la cohésion sociale en amortissant les effets de la crise. Sans elle, 11 millions de personnes ne pourraient se loger correctement dans les conditions actuelles du marché.

M. Roland Courteau. En effet !

M. Marcel Rainaud. Économiquement, elle n'a pas d'incidence sur notre déficit, l'endettement étant porté par les organismes et remboursé grâce aux loyers versés.

En dehors des subventions diverses, son financement repose essentiellement sur deux piliers principaux : les prêts de la Caisse des dépôts et consignations constitués à partir de la collecte du livret A ou du livret de développement durable et un taux réduit de TVA.

Je suis conscient des réalités économiques de notre pays et de l'ampleur de nos déficits, mais le rapport Gallois s'est peut-être trompé de cible en proposant de relever le taux réduit de la TVA.

En 2012, le passage du taux réduit de TVA de 5,5 % à 7 % pour les opérations réalisées dans le secteur du logement social s'est traduit, selon l'Union sociale pour l'habitat, par un accroissement des dépenses du secteur HLM de 225 millions d'euros.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Marcel Rainaud. Les collectivités territoriales ont compensé et les bailleurs ont pris sur leurs fonds propres pour assurer 100 000 mises en chantier. Ils ont dû augmenter les loyers pour pouvoir faire face, mais, aujourd'hui, ils ne peuvent plus recourir à ce moyen.

Dès lors, vous comprendrez que l'annonce du passage du taux réduit de TVA de 7 % à 10 % constituera un nouvel handicap pour la réalisation de 150 000 logements sociaux et une lourde menace pour 20 000 emplois du secteur du BTP.

Le logement étant un bien de première nécessité, le taux de TVA s'appliquant au logement social pourrait être ramené à 5 %, ce qui permettrait de dégager 270 millions d'euros pour la concrétisation des projets du Gouvernement.

Ma question est simple, madame la ministre : dans quelque temps, quand vous aurez effectué le bilan de nos décisions, pourra-t-on espérer un retour au taux de 5 % pour le logement social ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Comme vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, le projet de loi de finances rectificative pour 2012 du 29 décembre dernier a porté à 10 % le taux de TVA applicable aux opérations réalisées dans le secteur du logement social à compter du 1er janvier 2014.

Comme vous, le Gouvernement juge indispensable d'améliorer l'accès de nos concitoyens au logement social. Ainsi, je vous confirme sa détermination pleine et entière à poursuivre sa politique ambitieuse de production de logements sociaux, d'une part en libérant du foncier, d'autre part en soutenant les acteurs de ce secteur, notamment grâce aux fonds collectés à la suite du relèvement du plafond du livret A, porté à 22 950 euros depuis le 1er janvier 2013.

En outre, je vous rappelle que, à ce stade, le passage de 7 % à 10 % du taux de TVA applicable aux opérations réalisées dans le secteur du logement social est assorti de mesures dérogatoires extrêmement favorables, prenant en compte les caractéristiques spécifiques de ce secteur.

Ainsi, les opérations engagées avant le 1er janvier 2014 demeureront soumises dans leur ensemble au taux réduit de 7 % lorsqu'une décision de financement de l'État ou, à défaut, la signature d'une convention avec le représentant de l'État dans le département sera intervenue avant le 1er janvier 2014. Vous conviendrez que cela aura pour effet d'inciter à la production de logements sociaux, ce que nous souhaitons tous.

Appliquer un taux réduit de TVA de 5 % à ce secteur d'activité, comme vous le suggérez, entraînerait une perte budgétaire de 420 millions d'euros en année pleine. Dans la situation actuelle, le financement d'un tel effort supplémentaire en faveur du logement social exigerait de prendre ailleurs des mesures compensatoires.

Conformément à l'engagement pris par le Gouvernement, une discussion aura lieu, dans les prochains mois, sur l'évolution éventuelle des secteurs soumis aux différents taux de TVA, dans le respect de deux principes : d'une part, la prise en compte de l'ensemble des impacts fiscaux subis par le secteur, en particulier en comparant l'incidence des hausses de TVA au bénéfice tiré par celui-ci de l'application du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ; d'autre part, la préservation des ressources globales de TVA attendues par l'État, dont nous avons grand besoin pour mener à bien nos politiques.

C'est dans ce cadre précis que devra être étudiée la possibilité d'une évolution du taux de TVA applicable au secteur du logement social.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rainaud.

M. Marcel Rainaud. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Je comprends que la réflexion sur ce sujet n'est pas encore totalement finalisée et qu'un grand débat nous attend.

Je voudrais simplement insister sur la situation dans laquelle se trouvent les bailleurs sociaux et les fédérations du bâtiment, qui lancent d'ailleurs une campagne nationale de revendication contre le relèvement du taux de TVA applicable. Ces acteurs sont suspendus aux arbitrages du ministre du budget. Ils veulent bien participer à la mise en œuvre de la politique que vous définissez, sachant que le logement est vertueux, qu'il relance l'économie, crée des emplois et fait naître les conditions de la cohésion sociale, mais il faut que les arbitrages le leur permettent.

Nous faisons tous le même constat : des millions de Français attendent de nous que nous prenions les bonnes décisions. Je resterai particulièrement attentif à l'évolution de ce débat, mais je suis sûr, madame la ministre, qu'il ira dans le bon sens !

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