Question de M. PINTON Louis (Indre - UMP) publiée le 21/03/2013

M. Louis Pinton interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur certaines situations peu équitables engendrées par le versement des prestations compensatoires fixées à l'occasion de divorces prononcés avant l'adoption des lois n° 2000-596 du 30 juin 2000 et n° 2004-439 du 26 mai 2004 modifiant le régime de ces prestations. La loi n'étant pas rétroactive, les divorcés d'avant 2000 ne peuvent recourir aux possibilités de recours ouvertes par ces deux textes afin d'obtenir soit la suppression des rentes versées à l'ex-conjoint, soit une réduction de leur montant. Dans leur cas, il n'est pas possible de pratiquer une réévaluation de la situation financière des deux anciens conjoints, afin d'intégrer les changements respectifs de revenus, de situation professionnelle et de niveau global de richesse et de les répercuter sur le montant de la rente viagère de prestation compensatoire. Cette rigidité est souvent à l'origine de profondes injustices, celui des deux condamné à payer pouvant connaître une dégradation marquée de sa situation matérielle et financière alors que le bénéficiaire de la rente, le cas échéant, aura enregistré l'évolution inverse. Dans certains cas, le montant total acquitté au titre de la prestation compensatoire par des personnes divorcées et retraitées, donc moins aisées que durant leur période d'activité, atteint des niveaux très élevés, souvent injustifiés au regard des besoins réels et de la situation financière du bénéficiaire de la rente. Aussi lui demande-t-il à travers quel type d'initiative – par exemple une disposition à intégrer à la future loi sur la famille – elle entend remédier à cette distorsion juridique entre divorcés d'avant et d'après 2000, ainsi qu'aux inégalités de traitement et aux injustices manifestes qu'elle engendre.


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Réponse du Ministère de la justice publiée le 22/08/2013

La loi n° 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce et la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce ont profondément assoupli les conditions dans lesquelles les prestations compensatoires versées sous forme de rente peuvent être révisées. Ainsi, la révision, la suspension ou la suppression peuvent être demandées, d'une part, pour toutes rentes, sur le fondement de l'article 276-3 du code civil, en cas de changement important dans la situation de l'une ou l'autre des parties, sans toutefois que la révision puisse avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement et, d'autre part, pour les rentes fixées avant l'année 2000, en application de l'article 33-VI de la loi du 26 mai 2004, lorsque le maintien en l'état de la rente serait de nature à procurer au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil. Pour l'application de l'article 276-3, la jurisprudence est venue préciser la notion de « changement important » dont la réalité relève de l'appréciation souveraine des juges du fond. C'est ainsi que sont notamment pris en compte la nouvelle situation matrimoniale et familiale des parties, tels que le remariage du débiteur ou la naissance d'un nouvel enfant dans son foyer mais aussi le remariage, le pacs ou le concubinage du créancier. Par ailleurs, si la loi ne prévoit pas expressément que la durée et le montant des sommes déjà versées peuvent être pris en compte, parmi d'autres éléments relatifs aux patrimoines des ex-époux, pour caractériser un avantage manifestement excessif, la Cour de cassation l'a d'ores et déjà admis. Il pourrait être envisagé, afin de rendre le dispositif plus lisible, de consacrer cette jurisprudence dans la loi. S'agissant du sort de la rente viagère au décès du débiteur, la loi du 26 mai 2004 a mis fin à la transmissibilité passive de la prestation compensatoire aux héritiers du débiteur décédé : désormais, les héritiers ne sont tenus que dans les limites de l'actif successoral et non plus personnellement. En outre, la prestation compensatoire fixée sous forme de rente est automatiquement convertie en capital à la date du décès, après déduction des pensions de réversion, suivant un mécanisme dont les modalités sont fixées par le décret du 29 octobre 2004.

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