Question de Mme GIUDICELLI Colette (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 06/06/2013

Mme Colette Giudicelli attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le rapport, présenté par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) le 12 février 2013, intitulé « Lutter contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices ». Ce phénomène est présenté comme un risque sérieux pour les recettes, la souveraineté et l'équité fiscales pour de nombreux pays, auquel le nôtre ne semble pas échapper. À titre d'exemple, à l'heure d'une mondialisation de l'économie toujours plus avancée, les entreprises multinationales pressent les États de coopérer pour élaborer des normes internationales permettant de limiter la double imposition résultant de divergences entre les règles fiscales nationales. D'un autre côté, elles sont promptes à tirer profit de ces différences lorsqu'elles leur donnent la possibilité d'échapper à l'impôt ou de le réduire sensiblement. L'OCDE compte présenter, prochainement, un plan d'action comprenant des mesures de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices. Dans son chapitre 5, le rapport mentionne six domaines dans lesquels les pressions sont les plus fortes : les différences internationales de qualification ; les bénéfices tirés de la fourniture de biens et de services numériques ; divers types de transactions financières intragroupe ; le prix de transfert ; l'efficacité des mesures de lutte contre l'évasion fiscale ; l'existence de régimes préférentiels dommageables. Elle aimerait connaître l'ampleur de ce risque en France, son impact sur les recettes de l'État et savoir quelles mesures sont envisagées pour le contrer et si notre pays est partie prenante, d'une façon ou d'une autre, dans le plan d'action qui va être proposé par l'OCDE.

- page 1688


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 17/10/2013

La lutte contre la fraude et l'évasion fiscales est une priorité pour les pouvoirs publics. À cet égard, de nombreuses mesures législatives viennent d'être adoptées à l'initiative du Gouvernement, notamment à l'occasion du collectif de fin d'année, pour donner des outils renforcés à l'administration fiscale. En premier lieu, le Gouvernement partage la préoccupation de l'auteur concernant l'utilisation de schémas mis en œuvre par les groupes multinationaux qui ont pour effet de soustraire leurs résultats à l'impôt sur les sociétés en France. Face à ces pratiques, l'administration fiscale fait usage d'un arsenal juridique lui permettant de remettre en cause les transferts de bénéfices, d'écarter les montages relevant de l'abus de droit ou encore d'appliquer des dispositifs anti-abus spécifiques. Afin de le rendre plus efficace, le Gouvernement a notamment soumis au Parlement, dès l'été 2012, une mesure législative qui renforce les moyens de l'administration, à travers un renversement de la charge de la preuve pour taxer, sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts, les bénéfices que les entreprises françaises localisent dans des Etats ou territoires situés hors de l'Union européenne où ils sont soumis à des régimes fiscaux privilégiés. S'agissant de l'action des services de contrôle fiscal, ils sont particulièrement mobilisés sur les problématiques de l'évasion fiscale des groupes multinationaux. Ainsi, les rectifications de prix de transfert se sont élevées à 3,5 milliards d'euros en base en 2012. Au plan international, la France joue également un rôle essentiel. Ainsi, avec plusieurs de ses partenaires du G20, elle a pris l'initiative de demander à l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de présenter des propositions afin de lutter, en matière de fiscalité des entreprises, contre l'érosion des assiettes fiscales et les transferts de bénéfices. Un rapport dressant un état des lieux très complet a été soumis aux ministres des finances à l'occasion du sommet de Moscou des 15 et 16 février 2013. À cette occasion, les ministres français, allemands et britanniques ont publiquement rappelé leur détermination pour progresser sur ce dossier. Sur cette base, l'OCDE a présenté le 16 juillet 2013 un plan d'action large et ambitieux comportant 15 axes de travail. La France est fortement impliquée dans les groupes d'experts chargés d'en assurer la traduction concrète. Dans ce cadre, elle plaide en priorité pour que des solutions soient trouvées pour résoudre les phénomènes de double exonération, pour renforcer les mesures anti-abus et pour que les règles soient adaptées afin de mieux appréhender les profits réalisés par le secteur numérique, actuellement sous-taxé. De plus, ainsi que les ministres de l'économie et des finances et délégué au budget l'ont indiqué dans la lettre qu'ils ont adressée le 21 novembre 2012 aux commissaires européens en charge de la fiscalité et du marché intérieur, la France considère que l'Union européenne doit également s'attacher à progresser sur ces problématiques, ce qui suppose que la Commission, comme l'y a invitée le Conseil ECOFIN du 14 mai 2013, amende le droit applicable ou propose de nouvelles actions, notamment dans le secteur du numérique. La France agit enfin pour renforcer les obligations de transparence et promeut activement une plus forte exigence concernant les activités conduites à l'étranger par les filiales des banques et des grandes entreprises. Pour les établissements financiers, ceci se traduira au plan national par de nouvelles obligations dans le cadre de la loi sur la séparation et la régulation des activités bancaires, lesquelles viendront compléter et renforcer l'accord obtenu avec le soutien de la France pour la révision de la directive CRD IV adoptée le 20 juin. Le Gouvernement porte dans les instances internationales (G8, G20) et au Conseil européen la nécessité d'étendre cette approche de transparence aux entreprises multinationales. Ces explications sont de nature à répondre aux préoccupations exprimées, qui constituent autant de priorités pour le Gouvernement.

- page 3020

Page mise à jour le