Question de M. BAS Philippe (Manche - UMP) publiée le 19/12/2013

M. Philippe Bas appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la situation des producteurs de légumes qui souffrent depuis plus de dix ans des pratiques anticoncurrentielles de leurs voisins européens.

La mise en place d'un marché unique, sans harmonisation sociale européenne, révèle un dumping social qui freine la compétitivité des entreprises françaises.

La réunion des ministres européens du travail, le 15 octobre 2013, sur la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, dite directive « détachement », a mis en évidence des abus importants sur l'utilisation de la main d'œuvre détachée mais n'a pas permis de trouver un compromis pour corriger ces pratiques.

Dans ce contexte, les distorsions entre États membres de l'Union européenne perdurent.

Alors que les surfaces cultivées de légumes ont diminué d'un tiers en quinze ans, il lui demande quelles sont les actions qu'entend mener le Gouvernement pour harmoniser le coût du travail au niveau européen et ainsi lutter contre le dumping social.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 06/02/2014

Le gouvernement français attache la plus grande importance à ce que le différentiel de coût de la main-d'œuvre entre les États de l'Union européenne dans le secteur agricole, et notamment dans les productions légumières, ne résulte pas de pratiques non conformes au droit communautaire, au regard notamment du principe de concurrence loyale et du respect des droits des travailleurs dans le cadre des détachements de salariés et de l'application des législations nationales en matière de salaire minimum. Dans cette perspective, la France soutient la démarche que la Commission européenne a engagée, avec l'ensemble des États membres et en concertation avec les partenaires sociaux, afin que soit complété le cadre juridique communautaire, et notamment la directive 96/71 CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services ainsi que la directive 2008/104 CE du 19 novembre 2008 relative au travail intérimaire. La proposition de directive élaborée à cet effet par la Commission européenne vise à renforcer l'effectivité de la mise en œuvre de la directive de 1996. Ce texte propose différentes mesures destinées à permettre une information plus précise et plus accessible des acteurs du détachement, à préciser les critères du détachement et à faciliter le contrôle et les sanctions des entreprises qui ne respectent pas les droits des salariés détachés et les règles encadrant la prestation de service transnationale. Le gouvernement français se félicite de l'accord intervenu le 9 décembre 2013 au conseil des ministres de l'Union européenne chargés de l'emploi et de la politique sociale sur une « orientation générale » relative à la proposition de directive, laquelle permettra d'imposer des règles dans les pays qui en étaient dépourvus. S'agissant notamment de l'article 9 relatif aux exigences administratives et aux mesures nationales de contrôle, qui figurent parmi les principaux éléments de la proposition, le texte approuvé par le conseil établit un équilibre entre la nécessité d'assurer, d'une part la sécurité juridique et la transparence aux prestataires de services, d'autre part le respect de la compétence des États membres. Il a ainsi été obtenu que soit garanti aux services le maintien de leurs pouvoirs de contrôle actuels, par une liste ouverte, fixée par les législations nationales, de documents exigibles en cas de contrôle. La directive n'impose en effet qu'un socle minimal auquel les États pourront ajouter d'autres documents en fonction de leurs modes de fonctionnement. Le respect des principes communautaires de proportionnalité et de nécessité assurera la sécurité juridique du dispositif, par l'information de la Commission européenne et des autres États membres sur les documents exigibles dans chaque pays. Cette réforme, visant à préserver l'équilibre entre la libre prestation de services et la protection des droits des salariés, devra garantir aux entreprises des conditions de concurrence plus équitables sur le territoire national et européen, par la convergence sociale dont le Président de la République a réaffirmé la nécessité dans sa proposition de gouvernement économique pour l'Europe. La question du différentiel du coût de la main-d'œuvre dans le secteur agricole avec l'Allemagne, notre premier partenaire commercial, devrait pour sa part être appelée à évoluer. Le gouvernement allemand s'est en effet déclaré favorable à l'instauration de salaires minima par branches, y compris pour les entreprises sous-traitantes. Ainsi les industriels de la viande et les organisations syndicales du secteur ont-ils conclu le 13 janvier 2014 un accord sur la mise en place d'un salaire minimum dans ce secteur d'activité. Par ailleurs, les partis politiques représentés au sein du gouvernement allemand ont convenu de l'instauration d'un salaire minimum généralisé. Les facteurs d'innovation, le financement et l'investissement des entreprises, la formation sont trois axes forts de soutien à la compétitivité. Les mesures annoncées dans le cadre du pacte national pour la compétitivité, la croissance et l'emploi visent à traiter toutes ces dimensions. Il en est de même de l'allégement des charges sur le travail, notamment des cotisations de prestations familiales, qui sera mis en œuvre dans le cadre du pacte de responsabilité annoncé par le Président de la République lors de son allocution du 31 décembre 2013 et précisé lors de sa conférence de presse du 14 janvier 2014. Ce pacte, qui sera discuté avec l'ensemble des partenaires sociaux, doit permettre d'accélérer la restauration de la compétitivité de l'ensemble de l'économie française au service de la création d'emplois.

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