Question de M. ADNOT Philippe (Aube - NI) publiée le 21/02/2014

Question posée en séance publique le 20/02/2014

M. Philippe Adnot. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Elle concerne le possible défaut de cohérence entre les conditions de financement du très haut débit par le Fonds national pour la société numérique et la politique de maîtrise de la dépense publique.

Au moment où la Cour des comptes, dans son rapport annuel, nous rappelle à juste titre, par la voix de son président, l'urgence qu'il y a à maîtriser la dépense publique, où le Président de la République réunit un deuxième conseil stratégique de la dépense publique – c'était lundi dernier –, où le Gouvernement s'apprête à baisser de 1,5 milliard d'euros supplémentaires ses dotations aux collectivités locales, est-il normal que, au niveau des préfectures de région, on incite les départements à s'endetter et à investir sans compter dans du réseau FTTH – la fibre à domicile – qui ne sera pas activé ?

Je m'explique. Dans tous les départements, les opérateurs vont investir à titre privé dans les zones d'appel à manifestation d'intérêt d'investissement, dites zones AMII, pour installer le très haut débit en zone urbaine. Dans les autres zones, qui n'intéressent pas les opérateurs, le département rédige un schéma directeur territorial d'aménagement numérique, ou SDTAN, et, bien souvent, propose une montée en débit de collecte par l'équipement des nœuds de raccordement d'abonnés, les NRA, et des sous-répartiteurs, ce qui peut permettre ultérieurement, à plus long terme, de donner accès à la fibre aux particuliers, le tout d'une manière cohérente et financièrement soutenable.

Les opérateurs nous indiquent par ailleurs qu'ils n'interviendront pas avant cinq ans dans les zones à faible population, et ne le feront de toute façon que dans celles qui représentent au moins 20 000, voire 30 000 prises.

Dans ces conditions, comment comprendre la position des préfets de région, qui imposent des schémas comprenant dès maintenant des réseaux FTTH alors même que ceux-ci ne seront pas activés à court terme et représentent donc une dépense publique inefficace ?

Madame la ministre, je connais le pragmatisme de vos services et j'ai entendu vos dernières prises de position. J'aimerais connaître votre sentiment sur le sujet et savoir quelles chances ont les élus de faire aboutir des dossiers raisonnables. Ou bien faut-il faire fi des déclarations relatives à la maîtrise des dépenses publiques et laisser filer l'endettement des collectivités locales, au risque d'être finalement dans l'incapacité de respecter les engagements qui ont été pris ?

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Réponse du Ministère chargé des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique publiée le 21/02/2014

Réponse apportée en séance publique le 20/02/2014

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, il ne faut pas avoir une vision caricaturale du plan France Très Haut Débit. En particulier, il ne faut pas opposer les dépenses d'investissement, qui sont importantes pour l'avenir de notre pays et la compétitivité de notre économie, et les dépenses de fonctionnement, sur lesquelles nous pouvons faire un certain nombre d'efforts dans le cadre d'une réflexion collective ; et c'est l'ancienne magistrate de la Cour des comptes qui vous parle.

La volonté de maîtriser la dépense publique est tout à fait compatible avec le refus d'hypothéquer l'avenir en réduisant les dépenses d'investissement. Je pense que personne ici ne considère que l'investissement dans les réseaux à très haut débit - la fibre, par exemple - soit une dépense inutile. Je ne citerai qu'un chiffre pour illustrer mon propos : 1 euro investi dans les réseaux à très haut débit produit 6 euros de PIB, de manière directe ou indirecte, en emplois ou en valeur ajoutée induite.

Nous devons réfléchir collectivement à la manière dont nous souhaitons réaliser ces investissements. C'est précisément ce qu'a fait ce gouvernement, au contraire du précédent, qui avait annoncé un certain nombre d'intentions mais ne s'était pas donné les moyens, tant humains que financiers, de les traduire en actes. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. C'est la faute à Sarko !

M. Didier Guillaume. Eh oui, exactement !

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Je vous rappelle qu'aucun membre du précédent gouvernement ne s'occupait du déploiement du très haut débit.

C'est le gouvernement actuel qui a créé une mission France Très Haut Débit, avec des équivalents temps plein en nombre suffisant. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) C'est le gouvernement actuel qui affectera 3,3 milliards d'euros sur les dix prochaines années à la réalisation des investissements en matière de très haut débit ; il apportera ainsi 50 % des subventions publiques nécessaires au déploiement du très haut débit.

Vous avez raison, les régions et les départements devront, eux aussi, assurer une partie du financement. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de mettre en place un système de financement reposant sur des prêts de la Caisse des dépôts et consignations extrêmement avantageux, avec des maturités extrêmement longues - de vingt à quarante ans - et des taux d'intérêt extrêmement faibles, puisqu'ils correspondent au taux du livret A plus cent points de base, c'est-à-dire plus 1 %. Ces dispositions visent à garantir un financement pérenne du plan France Très Haut Débit.

Je suis convaincue que, lorsque vous êtes auprès de nos concitoyens, ils vous disent tous combien ils sont impatients de bénéficier du très haut débit. Je crois que nous pouvons être d'accord sur le fait que c'est ce gouvernement qui a mis toutes les chances de son côté pour réussir à réaliser ces investissements d'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. Alain Gournac. Il est formidable, ce gouvernement !

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