Question de M. PELLEVAT Cyril (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 15/10/2015

M. Cyril Pellevat attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur les conséquences pour les travailleurs frontaliers français de la modification de l'ordonnance fédérale du 19 octobre 1993 relative à l'imposition à la source dans le cadre de l'impôt fédéral direct. Suite à une modification intervenue le 25 février 2013, ce texte prévoit désormais que, dans le barème C, pour déterminer le taux d'imposition, l'employeur suisse doit tenir compte du fait que le conjoint du frontalier perçoit également un revenu de travail au titre d'une activité effectuée en France. Or, comme il ne connaît pas ce revenu, l'employeur suisse détermine le taux d'imposition en tenant compte d'un salaire fictif, calculé sur des bases statistiques identiques à chaque canton. Suite à une question orale sans débat (Assemblée nationale, n° 644) discutée en séance le 6 mai 2014 à l'Assemblée nationale sur ce sujet, le Gouvernement avait indiqué que les autorités suisses s'étaient engagées à réexaminer ce dispositif et qu'à l'issue d'une réunion entre les gouvernements des deux pays le 6 mars 2014, la nécessité de régler les difficultés rencontrées sur le plan fiscal par les travailleurs frontaliers avait été mise en avant. Compte tenu de l'impact financier considérable pour les 90 000 travailleurs frontaliers de Haute-Savoie, il souhaite donc savoir si des avancées ont été obtenues sur ce dossier, afin de prendre en compte la situation réelle des contribuables.

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Réponse du Ministère des finances et des comptes publics publiée le 10/03/2016

La convention fiscale entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966 modifiée attribue le droit d'imposer les rémunérations tirées d'une activité professionnelle salariée à l'État d'exercice de l'activité sous réserve notamment de l'application du régime des travailleurs frontaliers résultant de l'accord du 11 avril 1983. La Suisse est donc fondée à imposer au moyen d'une retenue à la source les salaires perçus par des résidents de France si ceux-ci travaillent dans un canton qui n'est pas partie à l'accord de 1983, comme c'est le cas de Genève, ou s'ils ne remplissent pas les conditions prévues par cet accord. Dès lors que la Suisse dispose du droit d'imposer, la convention fiscale franco-suisse n'a pas d'incidence sur les modalités d'imposition de ces rémunérations par la Suisse, sauf en cas de discrimination à raison de la nationalité. La Suisse est toutefois liée par un accord de libre circulation des personnes signé le 21 juin 1999 avec l'Union européenne et ses États membres. Elle est ainsi tenue d'appliquer les principes dégagés par l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 14 février 1995 (affaire C-279-93, Schumacker), comme l'a rappelé une décision rendue le 26 janvier 2010 par son tribunal fédéral. La Suisse a donc modifié le 25 février 2013 l'ordonnance fédérale sur l'imposition à la source (OIS) afin de supprimer les inégalités de traitement entre les personnes imposées à la source et celles soumises au régime fiscal ordinaire, afin de garantir le respect de ses engagements internationaux. En pratique, elle a fait évoluer le régime d'imposition des travailleurs considérés comme « quasi-résidents » en prévoyant de prendre en compte, le cas échéant, le salaire du conjoint. La mise en œuvre de ces nouvelles dispositions relève des cantons. Ainsi, depuis le 1er janvier 2014, chaque canton a adapté sa législation et prévoit des modalités de prise en compte des revenus du conjoint, lorsque celui-ci exerce une activité lucrative dans un autre État, afin de déterminer le taux de la retenue à la source applicable. Ce dispositif touche notamment des résidents français occupant un emploi salarié en Suisse. Les modalités d'imposition ainsi établies relèvent de la souveraineté fiscale de la Suisse. Cependant, si aucune prise en compte du salaire effectif du conjoint n'est possible, y compris a posteriori, cette règle peut conduire à s'écarter de la situation réelle du contribuable dans un sens défavorable. Le ministre des finances et des comptes publics a écrit à son homologue suisse le 28 novembre 2013 pour souligner la nécessité de faire évoluer cette nouvelle législation. Celui-ci lui a répondu, le 16 décembre suivant, qu'il prenait en considération cette demande. Depuis, un projet de loi fédérale sur la révision de l'imposition à la source du revenu de l'activité lucrative a été déposé, qui prévoit de prendre en compte la rémunération effective du conjoint actif à l'étranger. Ce projet est en cours d'examen au sein des institutions suisses.

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