Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - Socialiste et républicain) publiée le 12/10/2017

M. Philippe Madrelle attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports sur le problème récurrent de la saturation et de la paralysie du trafic routier sur la rocade bordelaise. Il souligne que, dès 1989, il avait lancé cette idée de grand contournement et qu'en 1995 il avait fait réaliser une étude de faisabilité confirmée en 2001 par le contrat de plan. Il rappelle la position de Bordeaux qui occupe un point essentiel du dispositif autoroutier français et européen. L'augmentation du trafic de fret et du trafic de transit conjuguée aux conséquences économiques et environnementales de l'allongement des durées quotidiennes de déplacement exige la réalisation urgente du grand contournement autoroutier de Bordeaux. Au moment où le président de la métropole bordelaise relance l'urgence d'une telle réalisation, il lui demande de bien vouloir lui préciser quel sera l'engagement de l'État.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire publiée le 22/11/2017

Réponse apportée en séance publique le 21/11/2017

M. Philippe Madrelle. Au mois de janvier, à cette même tribune, j'interpellais le prédécesseur de Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, sur le problème récurrent de la saturation et de la paralysie du trafic routier sur la rocade bordelaise, qui cumule les déplacements quotidiens des habitants de la métropole et le passage d'un trafic de transit français et européen.

Les chiffres, qui ne cessent d'augmenter, sont éloquents et suffisent à traduire cette réalité, qui empoisonne le quotidien de milliers d'automobilistes : plus de 100 000 véhicules circulent chaque sur le pont d'Aquitaine, et plus de 140 000 sur la rocade est. La rocade bordelaise supporte des trafics moyens hors du commun, de l'ordre de 265 000 véhicules par jour. Chaque automobiliste communautaire doit consacrer 1 heure 20 à ses déplacements quotidiens. Il faut savoir que, de janvier à septembre, la circulation a augmenté de 2,5 % sur l'intrarocade rive droite et que, sur l'intrarocade Bordeaux-Nord, le trafic a progressé de plus de 3,3 %. En cinq ans, le trafic des poids lourds a crû de plus de 12 %.

Une telle saturation du trafic se traduit d'ores et déjà par le gaspillage d'au moins 60 000 heures, perdues quotidiennement sur la rocade, et, au-delà, par des conséquences économiques et environnementales dont je chiffre le coût à près de 1 million d'euros par jour.

Quotidiennement, le point noir routier de Bordeaux est cité sur toutes les radios. Plus de 3,5 millions de déplacements sont effectués quotidiennement à l'intérieur de l'agglomération bordelaise et les projections les plus sérieuses annoncent une progression effrayante, à hauteur de plus de 2 millions, du nombre de ces déplacements, ce qui fait craindre le pire.

On aurait pu espérer que les travaux d'élargissement de la moitié sud de la rocade ouest, ainsi que les travaux concernant la moitié nord de la rocade ouest, permettraient de fluidifier le trafic, mais force est de constater qu'il n'en est rien.

En 1989, alors président du conseil départemental, j'avais émis l'idée de réaliser un grand contournement autoroutier, projet qui a été abandonné à cause des conclusions du Grenelle de l'environnement. Au moment où le président de la métropole bordelaise, Alain Juppé, pointe la nécessité urgente de réaliser une telle infrastructure, je souhaiterais, madame la secrétaire d'État, connaître les intentions du Gouvernement au sujet de la construction de ce contournement autoroutier.

La création d'une telle infrastructure est vitale pour l'agglomération bordelaise, comme le fut, pour d'autres territoires, celle du pont de Normandie, du viaduc de Millau, de la dernière ceinture autoroutière lyonnaise ou du doublement de l'autoroute A9 de Montpellier, dont plus personne ne conteste l'utilité.

Classée troisième agglomération la plus congestionnée de France, la métropole bordelaise risque l'asphyxie. Le paradoxe est que l'on peut désormais rejoindre Paris en deux heures, alors que l'on peut mettre deux heures pour faire quinze kilomètres sur la rocade. Vous comprendrez, madame la secrétaire d'État, qu'il y a véritablement urgence.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur, je vous réponds au nom d'Élisabeth Borne, ministre chargé des transports, qui n'a malheureusement pas pu être présente aujourd'hui.

Le Gouvernement est sensible à la problématique de la congestion du trafic sur la rocade bordelaise, qui combine un trafic local, largement majoritaire, et un trafic de transit. Comme vous le soulignez, un grand contournement autoroutier avait été envisagé, voilà plus d'une dizaine d'années, afin d'écarter le trafic de transit de cet itinéraire. Il s'agissait d'une infrastructure autoroutière d'une centaine de kilomètres en tracé neuf, d'un coût estimé à plus de 1 milliard d'euros.

Conformément aux orientations du Grenelle de l'environnement, ce projet a été abandonné en 2008. Il ne répondait pas à une nécessité de sécurité ou d'utilité collective et présentait un impact non négligeable sur l'environnement.

De nouvelles propositions de contournement de Bordeaux ont été émises récemment par la métropole. Elles concernent la création d'un barreau autoroutier entre les autoroutes A62 et A89, à l'est du département de la Gironde. Elles sont actuellement étudiées par le Conseil d'orientation des infrastructures, qui est chargé, dans le cadre des assises de la mobilité, de proposer au Gouvernement une loi de programmation de nos infrastructures de transport, financièrement équilibrée, à un horizon de cinq ans.

L'État est conscient des problèmes de congestion que rencontrent quotidiennement les usagers de la rocade bordelaise. C'est pourquoi, depuis 2009, il s'est fortement engagé aux côtés de la métropole pour son élargissement à deux fois trois voies, afin de la sécuriser et de diminuer les temps de parcours.

Les résultats sont très positifs : les trafics sur la rocade ont été fluidifiés et les voiries urbaines délestées. Mais soyez assuré, monsieur le sénateur, que le Gouvernement restera vigilant s'agissant du traitement de ces nœuds de congestion routière qui se développent autour des métropoles françaises et pénalisent fortement la vie quotidienne des Français.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Je ne suis pas convaincu. Hier soir, j'ai reçu, avec mes collègues sénateurs du département, un certain nombre de maires de Gironde qui se disent prêts à monter au créneau.

La situation est très difficile. On constate une véritable thrombose sur le pont d'Aquitaine. Si je suis intervenu de nouveau sur cette question récurrente, c'est qu'il y a une réelle exaspération des utilisateurs quotidiens de cette rocade. À mon sens, il s'agit d'une véritable gabegie économique. La colère gronde. Le quotidien Sud-Ouest s'en fait l'écho très régulièrement.

Lors de la récente visite du Premier ministre, M. Édouard Philippe, à Bordeaux, Alain Juppé et moi-même sommes intervenus vigoureusement pour appeler l'attention sur cette réalité qui empoisonne la vie des Girondins. Vous le voyez, cette question transcende les idéologies et les étiquettes politiques. J'ai d'ailleurs lu récemment dans Sud-Ouest les déclarations d'un responsable économique éminent, ne partageant certainement pas mes orientations politiques, qui regrette que le projet du grand contournement de Bordeaux, que j'avais lancé il y a bien longtemps, ait avorté.

Vous avez évoqué un coût de 1 milliard d'euros, mais le problème du financement d'une telle infrastructure peut être réglé par l'attribution d'une concession à une société autoroutière. En 1989, je m'en souviens, quatre ou cinq grandes sociétés étaient dans les starting-blocks. Ainsi, on solliciterait non pas les contribuables, mais les utilisateurs.

Madame la secrétaire d'État, je lance un cri d'alarme. Je suis heureux qu'Alain Juppé, maire de Bordeaux, partage ma conviction. Je vous assure qu'il y a un vrai problème. Je le répète, il faut maintenant deux heures pour aller de Bordeaux à Paris, et parfois davantage pour faire quinze kilomètres sur la rocade. C'est une gabegie insupportable !

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