Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 07/12/2017

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les manquements de l'éducation à la sexualité.
L'article 22 de la loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception prévoit trois séances annuelles entre la classe de cours préparatoire (CP) et la classe de terminale, afin de dispenser « une information et une éducation à la sexualité ». Pourtant le rapport annuel consacré aux droits de l'enfant, rendu public le 20 novembre 2017 par le défenseur des droits et la défenseure des enfants, constate, dans une partie intitulée « Suivi de la mise en œuvre de l'éducation à la sexualité », que ces séances ne sont pas systématiquement organisées, s'appuyant sur une enquête réalisée auprès de 3000 établissements scolaires par le haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE - « Rapport relatif à l'éducation à la sexualité : Répondre aux attentes des jeunes, construire une société d'égalité femmes-hommes » du 15 juin 2016). Le HCE y relève des progrès notables pour l'accès à la contraception et l'usage du préservatif lors des premiers rapports, tandis que les choses évoluent peu en ce qui concerne les stéréotypes sexistes, notamment liés à la sexualité. Or ces idées reçues ont de graves conséquences en matière de discriminations et de violences sexistes : 7,5 % des filles déclarent avoir été victimes, à l'école, de voyeurisme, de caresses ou de baisers forcés et une jeune femme de moins de vingt ans sur dix déclare avoir été agressée sexuellement au cours de sa vie. Les réseaux sociaux démultiplient le phénomène, au point qu'une collégienne sur cinq a souffert de cyberviolence. Malheureusement, quand l'application de la loi est effective, les séances d'éducation sexuelle se bornent trop souvent à des questions anatomiques et biologiques. En revanche, les stéréotypes sexuels, les questions de violences faites aux femmes et d'orientation sexuelle sont peu abordés. Les jeunes risquent alors de rechercher des réponses, qui seront plus ou moins erronées, via internet, d'autres médias ou même la pornographie. Compte tenu des enjeux en matière de santé, d'éducation, de citoyenneté et d'égalité entre les hommes et les femmes, il souhaiterait savoir s'il compte faire suite aux recommandations du défenseur des droits et de la défenseure des enfants d'adopter une approche globale de l'éducation à la sexualité en milieu scolaire et de mieux former et choisir les intervenants.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 12/04/2018

L'école a la responsabilité particulière, en liaison étroite avec la famille, de veiller à la santé des jeunes qui lui sont confiés et de favoriser leur développement personnel, leur bien-être et le développement de leurs compétences psychosociales. En milieu scolaire, la promotion de la santé participe à la réussite éducative et au bien-être des personnels et des élèves, en assurant à ces derniers, tout au long de leur scolarité, une éducation à la santé, en articulation avec les enseignements, adaptée à la fois à leurs attentes et à leurs besoins ainsi qu'aux enjeux actuels de santé publique. La promotion de la santé en milieu scolaire s'appuie sur la mise en œuvre du parcours éducatif de santé, défini à l'article L. 541-1 du code de l'éducation. Cette démarche individuelle et collective permet de structurer et de mettre en cohérence les dispositifs qui concernent à la fois la protection de la santé des élèves, les activités éducatives liées à la prévention des conduites à risques et les activités pédagogiques mises en place dans les enseignements disciplinaires et interdisciplinaires. L'éducation à la sexualité s'inscrit dans cette démarche globale de promotion de la santé. Inscrite dans le code de l'éducation (articles L. 121-1 et L. 312-16), l'éducation à la sexualité est rendue obligatoire aux trois niveaux de scolarité : école, collège et lycée, à raison d'au moins trois séances annuelles et par groupe d'âge homogène. L'éducation à la sexualité en milieu scolaire vise à : apporter aux élèves des informations objectives et des connaissances scientifiques ; permettre une meilleure perception des risques - grossesses précoces, infections sexuellement transmissibles, sida - et favoriser des comportements de prévention ; informer sur les ressources d'information, d'aide et de soutien dans et à l'extérieur de l'établissement ; faire connaître aux élèves les dimensions relationnelle, juridique, sociale et éthique de la sexualité ; acquérir une culture de respect fondée sur l'égalité entre les sexes et la lutte contre les discriminations ; accompagner leur réflexion sur le rapport à l'autre, les règles de vie en commun, le sens et le respect de la loi. Cette question ne doit donc pas être uniquement abordée sous l'angle de la santé, mais également par celui de la prévention, de l'apprentissage de la responsabilité, du respect mutuel et de la lutte contre les stéréotypes. La circulaire n°  2003-027 du 17 février 2003 précise les modalités de sa mise en œuvre, dans les premier et second degrés, ancrée à la fois dans les enseignements et dans la vie scolaire. Dans le cadre du parcours éducatif de santé de l'élève, il est possible de travailler par une approche disciplinaire et interdisciplinaire l'éducation à la sexualité : éduquer, en développant des compétences disciplinaires, des compétences psycho-sociales appliquées aux domaines de l'égalité filles/garçons, de la sexualité et du bien-être, ces trois domaines étant étroitement liés ; prévenir les comportements à risque (VIH-sida, grossesses précoces, …), les violences sexuelles, les discriminations sexistes et homophobes, le harcèlement et le cyberharcèlement à travers des actions qui promeuvent une égalité garçons/filles, une égalité entre les orientations et les identités sexuelles, la lutte contre les stéréotypes, le bien-être physique et psychologique et qui renforcent l'estime de soi ; protéger, en permettant à chaque élève de se projeter dans le futur et d'adopter des comportements favorables à leur santé mais également de leur proposer des ressources et réflexions qui leur permettront de s'épanouir personnellement et de savoir où trouver de manière autonome l'aide dont ils pourraient avoir besoin dans et hors l'établissement. Un comité de pilotage national est constitué, avec pour mission de concevoir un parcours de formation présentiel et distanciel en éducation à la sexualité ainsi que de suivre la mise en œuvre du dispositif en académie par les équipes académiques de pilotage qui ont été désignées par les recteurs d'académie. Ces dernières sont en charge de porter le dossier « éducation à la sexualité » en académie et d'accompagner les projets d'établissement et d'école sur le sujet. En formation initiale, dans les ESPE, l'éducation à la sexualité est abordée dans le cadre de modules consacrés à l'éducation à la santé, un des objets transversaux mentionnés dans les textes réglementaires portant cadrage de la formation. Elle peut aussi être mise en lien dans son entrée citoyenneté avec les modules relatifs aux relations entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes, la mobilisation contre les stéréotypes, notamment sexistes, et les discriminations. Un dispositif de formation continue mis en place depuis 1995 permet de disposer d'un réseau pluricatégoriel de formateurs de formateurs et de personnels intervenant auprès des élèves. Les formateurs de formateurs organisent et animent des stages dans chaque académie en vue de former des équipes d'intervenants volontaires dans les établissements pour développer des actions d'éducation à la sexualité auprès des élèves. Les académies, dans le cadre de leur plan académique de formation (PAF), proposent des formations sur l'éducation à la sexualité. Elles s'adressent au personnel pédagogique du premier et second degré, au personnel éducatif et au personnel administratif, technique, social et de santé. Ces formations peuvent être ouvertes à des partenaires extérieurs amenés à intervenir ensuite en établissement. À l'échelle nationale, depuis 2013, un séminaire annuel de formation réunit les équipes académiques de pilotage en éducation à la sexualité (2013, 2014, 2015, 2017) ou les formateurs en éducation à la sexualité (2016). Afin d'accompagner les équipes sur ce sujet, un portail consacré à cette thématique a été ouvert sur Eduscol en novembre 2016 et propose des informations et des ressources sur le sujet : http://eduscol.education.fr/pid23366/education-a-la-sexualite.html. Des fiches ressources, des fiches d'activités ainsi que des guides thématiques (guide de l'intervenant, guide pour prévenir, repérer et agir face aux comportements sexistes et violences sexuelles, etc.) sont notamment mis à disposition sur ces pages. À l'école primaire, les temps consacrés à l'éducation à la sexualité incombent au professeur des écoles. Ces temps doivent être identifiés comme tels dans l'organisation de la classe et être intégrés aux enseignements. Ils sont adaptés aux opportunités fournies par la vie de la classe ou de l'école. Au collège et au lycée, les séances sont organisées en articulation avec les programmes. Elles sont prises en charge par une équipe de personnes volontaires, composée d'enseignants et de personnels d'éducation, sociaux et de santé formés, si nécessaire en collaboration avec des intervenants extérieurs agréés. Les interventions devant les élèves s'effectuent en binôme. Il s'agit de travailler avec les élèves dans une démarche fondée sur la confiance dans leurs capacités, visant à développer l'estime de soi et l'aptitude à faire des choix personnels. L'éducation à la sexualité prend la forme d'une invitation au dialogue et non d'un discours sur la sexualité. L'éducation à la sexualité doit être portée collectivement et les comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté, qu'ils soient d'établissement, départementaux ou académiques sont les instances d'organisation des actions en éducation à la sexualité. Ils viennent définir et impulser les projets, permettent le déploiement des alliances éducatives et les inscrivent dans un cadre global de promotion de la santé et de formation du citoyen.

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