Question de M. KAROUTCHI Roger (Hauts-de-Seine - Les Républicains) publiée le 04/07/2019

M. Roger Karoutchi attire l'attention de Mme la ministre du travail sur l'externalisation du suivi par Pôle emploi des personnes bénéficiant du chômage tout en ayant un emploi.

En effet, dans un article de presse en date du 24 juin 2019, était dévoilé le fait que la réforme de l'assurance chômage prévoyait d'externaliser le traitement des « permittents », c'est-à-dire de ceux qui alternent période de travail et chômage. Ils seraient 830 000 en France à bénéficier des allocations chômage tout en cumulant un salaire.

Le suivi de ces personnes serait, à partir du 1er janvier, confié à des organismes privés. Par ailleurs, les allocations chuteraient en moyenne de 300 euros par mois, une somme non négligeable pour ces travailleurs précaires.

Or, un rapport de la Cour des comptes estimait en 2014 que les opérateurs privés présentaient de moins bons résultats, dans le traitement des allocataires, que les conseillers de Pôle emploi.

Dans ces conditions, il lui demande quelle est la pertinence d'une telle mesure qui, partant d'une volonté saine de réduction de la dépense publique, pourrait se révéler aussi injuste qu'inefficace.

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Réponse du Ministère du travail publiée le 17/07/2019

Réponse apportée en séance publique le 16/07/2019

M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la presse a annoncé, au mois de juin, que la gestion des 830 000 personnes qui cumulent allocation de chômage et emploi – les « permittents » –, serait externalisée, c'est-à-dire retirée à Pôle emploi pour être confiée, à compter du 1er janvier 2020, à des organismes privés.

Or la Cour des comptes a produit en 2014 un rapport indiquant que, si Pôle emploi n'était pas exempt de défauts, il était plus performant que des organismes privés pour ce type de missions.

Madame la ministre, pouvez-vous confirmer ou infirmer cette information ? Je n'écoute, quant à moi, que le Gouvernement, mais la presse ajoute que cette réforme serait accompagnée d'une baisse moyenne de l'allocation chômage des « permittents » de l'ordre de 300 euros par mois en moyenne.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Monsieur le sénateur Karoutchi, comme vous le savez, tout ce qu'on lit dans la presse n'est pas toujours précis jusque dans les moindres détails (Sourires.).

S'agissant, d'abord, de l'indemnisation, les demandeurs d'emploi qui alternent contrats courts et périodes de chômage ne subiront aucune diminution du capital de droits du fait de la réforme que nous mettons en œuvre, car l'ensemble des droits financiers relevant du chômage sera maintenu.

En revanche, ils ne pourront plus gagner plus grâce au chômage qu'en travaillant, comme cela peut être le cas actuellement, sans que personne l'ait décidé, en raison d'un mode de calcul complexe selon lequel les premiers mois de chômage sont parfois mieux indemnisés que le travail n'était payé les mois précédents. Cette situation, qui va à l'encontre du bon sens n'est, en outre, pas incitative au retour à l'emploi.

En contrepartie, leurs droits seront très allongés dans le temps, ce qui permettra de maintenir le capital de droits des intéressés.

La gestion des personnes qui alternent emploi et chômage est toujours confiée à Pôle emploi et ne sera pas externalisée. Pôle emploi, en revanche, sous-traite déjà, dans différents domaines, une partie des prestations spécialisées à des organismes disposant de compétences particulières. Il peut s'agir, par exemple, de la valorisation de son propre CV ou du recrutement par simulation. Pôle emploi a, certes, vocation à faire, mais également à faire faire, en jouant un rôle de chef d'orchestre.

Cette démarche se justifie, concernant les « permittents », par le fait que ceux-ci peinent souvent à bénéficier de l'accompagnement opérationnel de Pôle emploi, car l'alternance de contrats très courts les place en quelque sorte à disposition des employeurs et les conduit à devoir à tout moment prendre un emploi, rendant aléatoire leur assiduité à un atelier ou à une formation.

Il s'agit donc, non pas de sous-traiter la gestion de ces travailleurs les plus précaires qui alternent chômage et contrats courts, mais de leur offrir un accompagnement qui n'existe pas aujourd'hui, en week-end ou en soirée, afin de leur permettre de bénéficier d'un suivi sur mesure, sous le contrôle de Pôle emploi, sans rien perdre de leur capital de droits. C'est un plus pour eux.

M. le président. Je remercie Mme la ministre de sa présence parmi nous ce matin.

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.

M. Roger Karoutchi. Et nous ? Qui nous remercie de notre présence ? (Sourires.)

Madame la ministre, je vous remercie d'avoir clairement indiqué que ces travailleurs ne perdraient pas de droits. Par ailleurs, la gestion et l'accompagnement sont toujours un peu compliqués, en effet, s'agissant, en particulier, d'une organisation aussi lourde que Pôle emploi.

Il me semble toutefois qu'il est important de rassurer. Ce n'est certes pas parce que la presse annonce une chose qu'elle est vraie, mais beaucoup de gens sont susceptibles de s'inquiéter quant à leur sort après le 1er janvier prochain.

Vos explications sont tout à fait cohérentes, et une communication du Gouvernement clarifiant la situation à l'intention des 830 000 personnes concernées serait de nature à lever ces inquiétudes.

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