Question de M. GATTOLIN André (Hauts-de-Seine - LaREM) publiée le 14/11/2019

Question posée en séance publique le 13/11/2019

M. André Gattolin. Ma question s'adresse au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Hier, la Commission européenne, après plus de six mois d'enquête approfondie, a transmis aux autorités du Cambodge un rapport préliminaire aux termes duquel à défaut d'une réponse rapide et appropriée de son gouvernement, le Cambodge pourrait voir le système de préférence commerciale dit « Tout sauf les armes » dont il bénéficie suspendu en février prochain.

Cette procédure de la Commission constitue une première dans le cadre de ce mécanisme d'aide au développement, que nous tenons ici à saluer. Elle intervient en raison de violations réitérées des engagements pris par ce pays en matière de respect des droits humains et des droits des travailleurs par le régime de M. Hun Sen, au pouvoir depuis plus de trente-quatre ans.

Deux ans après la dissolution du principal parti d'opposition et à la suite des élections de juillet de l'an passé, amplement contestées par la communauté internationale, le régime en place connaît une inquiétante dérive autoritaire qui contrevient au processus de démocratisation auquel il avait pourtant souscrit au travers des accords de Paris en 1991, après la chute du régime des Khmers rouges.

Avant-hier, sous la pression, les autorités cambodgiennes ont levé la mesure de résidence surveillée de l'un des leaders de l'opposition, M. Kem Sokha, tandis que M. Sam Rainsy, président en exil du Parti du sauvetage national du Cambodge, a été reçu hier et ce matin même avec beaucoup de bienveillance par les autorités de la Malaisie et de l'Indonésie.

Monsieur le ministre, au-delà de la juste initiative de la Commission européenne, n'est-ce pas pour la France le moment opportun de jouer un rôle actif pour tenter de ramener le Cambodge dans la voie de la démocratisation, en conformité avec les engagements de notre pays qui, je le rappelle, présida avec l'Indonésie à la signature des accords de Paris en 1991 ? (Applaudissements sur des travées du groupe LaREM.)


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 14/11/2019

Réponse apportée en séance publique le 13/11/2019

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur André Gattolin, je connais votre attachement à la défense des libertés et de la démocratie au Cambodge et la constance de vos positions sur ce sujet.

Comme vous, nous sommes préoccupés par la situation. Vous l'avez rappelé, les élections législatives de 2018 ne se sont pas déroulées dans de bonnes conditions. Un parti d'opposition, le Parti du salut national du Cambodge, a été dissous et son leader mis en prison.

Il est clair que nous ne pouvons pas rester inertes. Avec les Européens, nous avons donc déclenché une enquête qui nous permettra de prendre un certain nombre de décisions, notamment de lever des préférences commerciales. En effet, l'Europe, ce n'est pas seulement un marché ; ce sont aussi des valeurs ! Qui veut exporter en Europe doit respecter les droits sociaux, les droits des travailleurs et se conformer aux valeurs démocratiques fondamentales.

Je me réjouis que ce langage de fermeté ait produit quelques premiers résultats, puisque M. Kem Sokha a bénéficié d'un assouplissement de ses conditions de détention : il est désormais libre de circuler sur le territoire sous contrôle judiciaire. Ce geste était nécessaire, mais il n'est pas suffisant. Nous attendons du Gouvernement cambodgien qu'il engage un véritable dialogue pour reprendre de manière crédible le chemin de la démocratisation. Si nous ne constatons pas de progrès, nous serons amenés, en février prochain, à suspendre un certain nombre de préférences commerciales. Nous demeurons vigilants. (Applaudissements sur des travées du groupe LaREM.)

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