Question de Mme FILLEUL Martine (Nord - SOCR) publiée le 02/04/2020

Mme Martine Filleul interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur le risque de précarisation des infirmiers libéraux, compte tenu de la récente réforme de la tarification et des conséquences pour les patients.
La mise en application du bilan de soins infirmiers (BSI) qui remplace la démarche de soins infirmiers (DSI) a débuté le 1er janvier 2020 et sera généralisée progressivement jusqu'au 1er janvier 2023. Le 29 mars 2019, l'avenant n° 6 à la convention nationale des infirmiers libéraux a été signé en ce sens.

Les infirmiers libéraux sont rémunérés selon un forfait journalier qui se répartit en trois niveaux : léger, intermédiaire et lourd. Le forfait lourd ne s'élève qu'à 28,70 euros par jour contre 31,80 euros par jour pour la part maximale du forfait d'actes de soins infirmiers (AIS), alors même que ce dernier n'a pas été revalorisé depuis plus de dix ans en dépit de l'augmentation des charges. Par ailleurs, l'algorithme géré par la caisse national d'assurance maladie (CNAM) qui classe la prise en charge du patient dans l'une de ces trois catégories est source d'inquiétude pour ces professionnels : des patients qui, dans l'ancien système, auraient nécessité une prise en charge lourde se voient dans le nouveau classement passer dans le forfait intermédiaire. Les infirmiers redoutent un nivellement par le bas des prises en charge des patients.

Ensuite, l'indemnité kilométrique a été limitée à 299 kilomètres par jour à un taux plein de 0,5 euros par kilomètre, avec un abattement de 50 % entre 300 et 400 kilomètres par jour, et de 100 % au-delà. L'isolement des patients dans des zones rurales peu denses et mal desservies aboutit à imposer aux infirmiers libéraux une prise en charge quasi gracieuse de ces patients, les indemnités kilométriques ne couvrant pas les frais réels de déplacement.
Cet écart de rémunération de 3,10 euros par jour et par patient combiné à la limitation du nombre de kilomètres facturables peut aboutir à une baisse de 10 % à 15 % du chiffre d'affaires des infirmiers libéraux.

À cela s'ajoutent d'autres problématiques : insuffisance des critères de majoration, absence des soins de nuit entre 23 heures et 5 heures ou du dimanche ; le versement entier du forfait BSI à un seul infirmier…

Ce n'est pas non plus sans conséquence pour les patients, puisque les infirmiers vont devoir essayer de diminuer le temps qu'ils accordent à chacun d'entre eux car le temps nécessaire pour réaliser l'acte n'est plus pris en compte. Cette logique de rentabilité pourra conduire les infirmiers, contre l'éthique même de leur profession, à délaisser certains patients qui ne sont pas « rentables » et à abandonner leur rôle de créateur de lien social qui est important a fortiori dans les zones rurales.

Face aux difficultés d'accès aux soins adaptés pour les personnes dépendantes, isolées ou en situation de handicap, et alors que cette profession est en première ligne dans la lutte contre l'épidémie du coronavirus, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour répondre à cette situation.

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Transmise au Ministère de la santé et de la prévention


La question est caduque

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