Question de M. ALLIZARD Pascal (Calvados - Les Républicains) publiée le 14/05/2020

M. Pascal Allizard attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation à propos des difficultés du secteur laitier.
Il rappelle que le secteur laitier contribue à l'activité économique et agricole dans les territoires ruraux de France, comme c'est le cas dans le Calvados.
Cette filière, comme de nombreuses autres, est actuellement impactée par la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19. Malgré les difficultés, la baisse de la consommation et des exportations, les producteurs ont poursuivi leurs activités dans les exploitations afin de garantir l'approvisionnement des Français en produits laitiers.
Dans ce contexte, plusieurs indicateurs montrent une dégradation du marché tandis que les prix sont toujours loin de couvrir les coûts de production.
Par conséquent, il souhaite connaître les dispositions que le Gouvernement compte prendre pour assurer l'avenir de cette filière importante pour les territoires français et des revenus décents aux agriculteurs. Il souhaite également savoir de quelle manière le Gouvernement envisage d'intervenir en faveur de la mise en œuvre d'un outil européen de régulation du marché du lait, tel le programme de responsabilisation des marchés, comme le suggèrent certaines organisations de producteurs, ou s'il compte soutenir auprès de Bruxelles la proposition d'un fonds collectif de solidarité pour indemniser les producteurs faisant l'effort de réduire leur production laitière, comme le soutient l'interprofession laitière.

- page 2186

Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 13/08/2020

La crise sanitaire actuelle a des impacts importants pour de nombreuses filières agricoles et agroalimentaires. C'est notamment le cas de la filière laitière, et en particulier pour les petites entreprises fromagères, souvent dans des filières sous indication géographique, et les producteurs laitiers fermiers, dont l'activité est si importante pour le patrimoine et l'économie des territoires français. Ces filières font face à des difficultés liées à des pertes de débouchés, compte tenu de la fermeture pendant presque deux mois d'une majorité du secteur de la restauration hors domicile, de celle d'un nombre important de marchés, et de l'orientation des achats alimentaires vers des produits de première nécessité au détriment d'achats festifs par les consommateurs. En outre, la période de forte production laitière (du fait du pic de collecte annuel) a aggravé la situation. Le déconfinement par étapes successives amorcé le 11 mai 2020 doit permettre à ces filières de retrouver progressivement une partie de ces débouchés. Au niveau local, des réorganisations de collecte du lait et de leurs débouchés ont été mises en place pour optimiser les capacités de valorisation du lait, avec notamment la mobilisation de certaines grandes entreprises, en particulier coopératives. Il convient de saluer la solidarité exemplaire qui s'est exercée dans la filière laitière et a permis d'atténuer les difficultés rencontrées par les plus petites entreprises pour lesquelles les alternatives sont réduites. De plus, des efforts ont été entrepris par les enseignes de grande distribution pour maintenir ouverts les rayons à la coupe et préserver la diversité des produits proposés aux consommateurs. Les produits français ont été particulièrement mis en avant. La loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable (EGALIM), a été promulguée le 1er novembre 2018. Les dispositions de cette loi, pleinement en vigueur, depuis un an ont contribué à améliorer les relations commerciales et le niveau du prix du lait payé aux producteurs. Le ministère de l'agriculture veillera à ce qu'il n'y ait pas de retour en arrière sur les progrès obtenus. La filière laitière maille l'ensemble du territoire, avec une production souvent issue de très petites entreprises (TPE) et de petites et moyennes entreprises (PME), dont certaines qui apparaissent durement touchées par la crise. C'est bien pour préserver ce type d'entreprise que le Gouvernement a annoncé des mesures immédiates de soutien, dont peuvent bénéficier les exploitations agricoles et les entreprises de transformation, notamment les TPE et PME. Le détail de ces mesures est disponible sur le site du ministère de l'économie et des finances : www.economie.gouv.fr/coronavirus-soutien-entreprises. Le ministère chargé de l'agriculture a en outre porté au niveau européen la nécessité d'activer des mesures de gestion des marchés, et a mobilisé l'ensemble de ses partenaires européens pour porter conjointement cette demande. Concernant la filière laitière et fromagère, la France a demandé en particulier d'activer une aide financière au stockage privé. La France a jugé également pertinent de déclencher l'article 222 du règlement (UE) n° 1308/2013 portant organisation commune des marchés, qui permet, par dérogation aux règles du droit de la concurrence, aux interprofessions et aux organisations de producteurs de mener des actions concertées en vue de contribuer à la stabilisation des marchés. Pour le secteur laitier, la Commission européenne a entendu les demandes portées par la France. En premier lieu, la Commission européenne a activé pour six mois, de manière rétroactive à compter du 1er avril 2020, l'article 222 pour le lait afin de permettre la planification de la production. Cette activation a permis à l'interprofession laitière nationale de mettre en place sur le mois d'avril 2020 un dispositif de réduction volontaire de la production laitière qui s'avère très proche du dispositif déclenché en 2016 au niveau européen ainsi que de la mesure figurant dans le programme de responsabilisation face au marché (PRM). La Commission a également activé, conformément à la demande de la France, des mesures d'aides au stockage privé pour la poudre de lait écrémé, le beurre et l'ensemble des fromages, sous indication géographique ou non. Ces mesures, adoptées au début du mois de mai 2020, sont pleinement mises en œuvre en France depuis le 12 mai 2020, sous la responsabilité de FranceAgriMer. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation porte un intérêt particulier aux propositions formulées dans le cadre du PRM. Ce programme prévoit notamment, selon la situation des marchés, une réduction volontaire ou obligatoire de la production laitière et un prélèvement sur les producteurs de lait qui dépassent leur référence. Lors de la réforme de la politique agricole commune (PAC) de 2013, des discussions avaient eu lieu sur l'introduction d'un encadrement européen de la production laitière en période de crise, mais aucun consensus politique ne s'était dégagé au conseil agriculture. C'est pourquoi dans le cadre de la réforme en cours de la prochaine PAC, la France, convaincue de la nécessité de disposer d'outils européens de gestion des marchés pour faire face aux aléas des marchés agricoles, porte des demandes d'évolution des outils d'intervention et la mise en place de seuils d'alerte pour une meilleure réactivité et une meilleure efficience de ces outils. Elle porte également l'ajout, dans la réglementation européenne, d'une mesure de réduction volontaire de la production en cas de difficultés sur les marchés, à l'instar de la mesure européenne mise en place en 2016 dans le cadre de la crise laitière. Ces demandes sont en cohérence avec l'esprit du PRM. L'ensemble du Gouvernement reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation pour l'ensemble des filières agricoles et apporter les solutions appropriées le plus rapidement possible. La propagation mondiale du covid-19 engendre une situation inédite avec un double défi, sanitaire et économique, auquel il convient de faire face collectivement.

- page 3579

Page mise à jour le