Question de Mme DEROMEDI Jacky (Français établis hors de France - Les Républicains) publiée le 26/11/2020

Mme Jacky Deromedi attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés rencontrées par nos compatriotes expatriés en matière de signatures d'actes notariés, particulièrement en matière de contrats de mariage et de successions. Les difficultés de communication ou la désorganisation de services notariaux dans certains pays leur rendent ces formalités très compliquées. Le décret n° 2020-1422 du 20 novembre 2020 sur la procuration notariée à distance, pour utile qu'il soit, ne permet pas de répondre complètement aux difficultés évoquées particulièrement en période de pandémie alors que les frontières sont parfois bloquées et que la circulation des personnes dans certains pays est limitée. Il lui demande, en conséquence, de bien vouloir lui faire connaître s'il est envisagé d'instaurer la signature authentique à distance.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 16/12/2020

Réponse apportée en séance publique le 15/12/2020

Mme le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, auteur de la question n° 1390, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Jacky Deromedi. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés que rencontrent nos compatriotes expatriés en matière d'actes notariés à distance.

En effet, la suppression des fonctions notariales des agents diplomatiques et consulaires a mis nos concitoyens en difficulté.

Un décret du 20 novembre dernier a pérennisé le régime des procurations notariées à distance. Il permettra de réaliser une partie des actes notariés à distance, en donnant procuration pour être représenté à une signature, en particulier en matière de transactions immobilières, qu'il s'agisse de vente, d'achat, ou de partage.

Mais nos compatriotes expatriés souhaitent que soit autorisée la signature authentique à distance. Lorsqu'ils se marient à l'étranger, il est important qu'ils aient la possibilité d'établir des contrats de mariage. Il en est de même en matière de successions ; celles-ci ne peuvent être définitivement réglées à distance.

Nos compatriotes sont confinés dans beaucoup de pays, ou ne peuvent se déplacer en raison de leurs contraintes sanitaires et professionnelles, ou tout simplement du coût que ces déplacements représentent.

Bien évidemment la situation sanitaire aggrave encore ces difficultés tout en augmentant ce besoin, en particulier lorsque l'un de leurs proches décède en France et qu'il faut régler la succession.

J'avais fait adopter deux fois une telle possibilité par le Sénat, sans opposition du Gouvernement, le 19 mai dernier au sein de la proposition de loi relative aux Français établis hors de France, de M. Bruno Retailleau, dont j'étais rapporteur, puis lors de la discussion de la loi du 14 novembre 2020 de prorogation de l'état d'urgence.

Le président du Conseil supérieur du notariat m'a informée que les trois quarts des offices de France disposent de dispositifs de visioconférence totalement sécurisés permettant d'effectuer ces opérations à distance. Bien entendu, une certaine prudence s'impose, puisqu'il s'agit d'un système nouveau, mais ne peut-on imaginer au moins une expérimentation en visioconférence ?

Une autre solution a été envisagée : il s'agit de conventions de coopération entre institutions notariales françaises et étrangères et de conventions sur la reconnaissance mutuelle des actes authentiques. Le Gouvernement entend-il les favoriser pour aider efficacement nos compatriotes expatriés ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Deromedi, permettez-moi de vous répondre au nom de M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, qui est retenu et m'a demandé de le représenter pour répondre à votre question.

Vous évoquez le sujet important des actes notariés à l'étranger. La volonté du Gouvernement en la matière est de garantir le bon fonctionnement, mais surtout la sécurité des échanges qui peuvent être requis.

Comme vous l'avez rappelé en détail, jusque tout récemment, les actes notariés devaient être signés avec la présence physique des parties à l'acte devant un notaire. Le décret du 20 novembre 2020 permet de désigner à distance un mandataire pour conclure un acte authentique notarié, ce qui poursuit l'adaptation du service public notarial à l'ère du numérique et permet de prendre divers engagements sous ces nouvelles formes adaptées aux échanges numériques.

Il est donc désormais possible de signer à distance une procuration, notamment à un clerc de l'étude, pour conclure toutes sortes d'opérations notariées sans avoir à se déplacer.

Dans le contexte de la crise sanitaire, ce décret permet la poursuite de l'activité notariale. La fermeture des frontières ne fait donc plus obstacle à l'établissement des actes notariés. Ce décret est aussi important pour les Français établis à l'étranger qui font face à la fermeture progressive des attributions notariales dans les ambassades et les consulats.

Le Gouvernement a fait le choix, dans un premier temps, de circonscrire ce dispositif pérenne aux seules procurations notariées, afin de garantir l'équilibre que j'évoquais, entre la sécurité des échanges et le bon fonctionnement du dispositif.

Si cette expérience s'avère satisfaisante lors de son évaluation, l'extension à d'autres actes notariés pourra être envisagée.

Mme le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour la réplique.

Mme Jacky Deromedi. Madame la ministre, je suis vraiment désolée, mais ce n'est vraiment pas ainsi qu'il convient d'agir. Une procuration ne permet pas de signer un contrat de mariage : il faut que les deux personnes soient présentes. Il en est de même pour un testament : il faut que le testateur soit présent devant un notaire. Ce service était mis à disposition de nos compatriotes par les postes diplomatiques il y a encore quelques années ; ce n'est plus le cas. Dès lors que le Conseil supérieur du notariat est prêt à s'engager dans une expérimentation, je ne vois pas pourquoi on leur refuse cette possibilité.

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