Question de M. MONTAUGÉ Franck (Gers - SER) publiée le 06/01/2022

Question posée en séance publique le 05/01/2022

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Franck Montaugé. Dans le cadre du Pacte vert pour l'Europe, dont l'Union européenne va se doter pour répondre aux enjeux de la transition climatique, la taxinomie – ou taxonomie – européenne permet aux différents secteurs économiques d'avoir accès à des taux d'emprunt préférentiels sur les marchés financiers.

Cette taxinomie sera donc un levier structurant pour soutenir les investissements importants qui sont nécessaires pour atteindre nos objectifs de réduction d'émission de gaz à effet de serre de 55 % d'ici à 2030 et de neutralité carbone en 2050.

Pour l'agriculture française, qui aura un rôle majeur à jouer, les enjeux sont considérables pour financer à des coûts minimisés les investissements qui s'inscrivent dans la stratégie dite « de la ferme à la fourchette », laquelle constitue le volet agricole du Pacte vert pour l'Europe.

Monsieur le ministre, alors que la présidence française du Conseil de l'Union européenne s'ouvre, ma question sera triple.

Premièrement, quelle est l'ambition politique de la France en matière de finance durable de l'agriculture ? Allez-vous proposer et négocier des critères auprès de la Commission européenne pour que les investissements des agriculteurs français soient éligibles à cette finance durable ?

Deuxièmement, si tel est le cas, pouvez-vous nous donner des exemples concrets pour que les agriculteurs qui nous écoutent en soient informés ? Quelles filières y auront accès ? Les services environnementaux auxquels je suis attaché seront-ils, par exemple, concernés ?

Troisièmement, le plan stratégique national français, dont nous ne connaissons officiellement pas grand-chose à ce jour, intégrera-t-il ce sujet, qui conditionne en partie la compétitivité durable de l'agriculture française ? Si oui, quel calendrier envisagez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 06/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 05/01/2022

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Franck Montaugé, je répondrai oui de manière globale à l'ensemble de vos questions, parce que, pour nous, la politique agricole européenne doit inclure un volet financier en faveur des transitions, notamment en termes d'investissements – j'insiste sur ce point. J'ai toujours considéré que les transitions ne pouvaient pas se faire par injonction, mais qu'elles devaient être soutenues par des investissements.

Je vais prendre un exemple très concret : le carbone. Dans le cadre du plan stratégique national et de la politique agricole commune, nous mettons d'ores et déjà en œuvre de nombreux outils de financement et d'investissement en faveur des transitions, mais la question du carbone, qui est très intéressante et complexe, va au-delà de cette politique.

Soit nous passons par le schéma habituel de l'injonction, en « ordonnant » à nos agriculteurs de limiter leurs émissions, soit, au contraire, dans l'esprit de ce que vous proposez, monsieur le sénateur, nous créons un cadre pour valoriser le carbone afin que nos agriculteurs s'engagent sur la voie de sa captation. C'est cette seconde solution qui me semble la plus intéressante.

En tout cas, la France s'est fixé trois priorités au niveau européen en ce qui concerne l'agriculture.

Tout d'abord, nous voulons réaffirmer l'engagement politique de l'Union européenne en faveur de l'agriculture. La politique agricole commune a 60 ans et certains États essaient de la remettre en cause. Il nous faut donc créer un momentum politique autour des politiques agricoles. C'est essentiel, parce que la première des souverainetés est de pouvoir nourrir son propre peuple.

Ensuite, nous voulons avancer sur la question de la réciprocité des normes. Plus personne ne peut comprendre que nous importions des produits qui ne respectent pas nos propres normes.

Enfin, nous devons agir sur la question du carbone, ce qui fait écho à votre question. C'est pour moi le point principal sur lequel nous devons agir.

Pour conclure, je veux vous indiquer que le plan stratégique national a été adressé fin décembre à la Commission européenne et qu'il sera publié dans les tout prochains jours.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.

M. Franck Montaugé. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le ministre. Elle est intéressante, mais vous n'avez pas répondu à la question centrale que je vous posais : les investissements des agriculteurs français entreront-ils dans la taxinomie – ou taxonomie – européenne afin d'avoir accès à des prêts bonifiés ? J'ajoute que cette même question concerne d'autres secteurs économiques comme le nucléaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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