Question de M. KAROUTCHI Roger (Hauts-de-Seine - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

M. Roger Karoutchi attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la mort de Jérémie Cohen et l'inquiétante augmentation des violences à caractère antisémite en France.

Le 16 février 2022, M. Jérémy Cohen, jeune Français juif et en situation de handicap, décédait suite à une collision avec un tramway de la ligne 1 à Bobigny.

C'est seulement grâce à l'enquête menée par ses parents que la question du caractère antisémite du décès de M. Cohen a fait surface. Sa famille a en effet récolté des preuves, dont la vidéo des derniers instants précédant la collision. Il est ainsi apparu que M. Cohen portait au moment du drame une kippa, et tentait de fuir un groupe d'individus qui venaient de l'agresser.

Si le caractère antisémite de cet acte devait être retenu par le juge d'instruction qui a décidé d'ouvrir une procédure judiciaire, ce drame se rajouterait à la longue liste d'actes antisémites commis en France depuis le début de l'année, au sujet desquels des familles attendent encore justice.

De fait, selon le service de protection de la communauté juive (SPCJ), organisme affilié au conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), une hausse spectaculaire de 75 % des actes antisémites a été constatée en 2021 par rapport à 2020. Parallèlement, les violences physiques ont augmenté de près de 36 % sur la même période.

Il souhaite que toute la lumière soit faite par le Gouvernement sur les circonstances de la mort de M. Jérémy Cohen et espère que les mesures nécessaires seront prises pour contrer la recrudescence des violences à caractère antisémite en France.

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 15/12/2022

La séparation des pouvoirs interdit de donner des instructions ou de commenter une affaire en cours, notamment celle évoquée dans la question du sénateur. Les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer restent particulièrement vigilants à l'égard de l'évolution des faits de délinquance touchant les communautés religieuses et par conséquent la communauté juive. Le suivi statistique et l'analyse de ce phénomène sont assurés au plan national par le service central du renseignement territorial (SCRT). Tout acte pénalement répréhensible impactant ces communautés fait par ailleurs systématiquement l'objet d'une enquête diligentée par les services de police ou de gendarmerie territorialement compétents. S'agissant de la communauté juive, 589 faits ont été recensés au cours de l'année 2021 contre 339 faits en 2020, soit une hausse de 73,5 %. Toutefois, par rapport aux 687 faits recensés en 2019, qui reste l'année de référence d'avant la crise sanitaire, la tendance est à la baisse en 2021 (- 14,2 %). La part des faits antisémites dans le recensement des faits antireligieux effectué par le SCRT a été de 36 % en 2021 alors même qu'il s'agit d'une religion, en nombre de pratiquants, minoritaire sur le territoire national. En 2020, la part des faits antisémites représentait 24 %. En ce qui concerne les cinq premiers mois de l'année 2022, 167 faits antisémites ont été enregistrés contre 259 faits en 2021, ce qui représente une baisse de 35 %. Sur la même période, 106 faits avaient été comptabilisés en 2020 et 460 faits en 2019. Parmi les faits constatés de janvier à mai 2022, 43 % concernent des atteintes aux personnes. Cette proportion s'établissait à 51 % en 2021, 61 % en 2020 et 37 % en 2019. Sur la même période de 2022, la majorité des faits constatés concerne des inscriptions antisémites (43 %) et des propos et gestes menaçants (35 %). Les tracts et courriers représentent 11 % des faits recensés et les dégradations 5 %. Enfin, 9 faits de violences physiques à caractère antisémite ont été relevés sur la période, ce qui représente 5 % du total des faits recensés. Afin de lutter contre cette menace, des instructions sont systématiquement transmises aux services de police et de gendarmerie auxquels il est demandé de porter une attention particulière au traitement des atteintes aux communautés religieuses. En parallèle, et sur un plan préventif, l'État poursuit ses efforts en matière de sécurisation des lieux religieux, via le dispositif « Sentinelle » et la mise en place de patrouilles dynamiques et statiques, composées de policiers ou de gendarmes. Au plan budgétaire, il abonde, chaque année de manière substantielle, le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD programme « K ») et finance, pour une large part, les travaux de sécurisation des sites scolaires, culturels et cultuels exposés à la menace terroriste (dispositifs de vidéoprotection, installation de protections mécaniques, de systèmes d'alarme, de portails, etc.). En 2021, l'enveloppe du programme K s'élevait à 5 millions d'euros. Quatre millions d'euros ont été mobilisés pour financer 103 projets présentés par des associations relevant de la communauté juive aux fins de sécuriser leurs sites. Pour le premier semestre 2022, près de 319 000 euros ont d'ores et déjà été débloqués afin de participer au financement de 6 projets. Par ailleurs, le dialogue mis en place en 2015 au ministère de l'intérieur et des outre-mer avec l'ensemble des représentants de la communauté juive se poursuit sous l'égide de la DPSIS et donne lieu à des échanges constructifs et réguliers. Les services du ministère de l'intérieur et des outre-mer, dont les services opérationnels (DGPN/Préfecture de Police/DGGN) se mobilisent afin de prendre en compte les attentes de la communauté juive, mettent en oeuvre des plans d'action adaptés, en liaison avec les préfets de région et de département compétents. Enfin et de manière récurrente, les fêtes juives font l'objet d'une attention toute particulière de la part du ministère de l'intérieur et des outre-mer. Elles donnent lieu à des instructions spécifiques du ministre adressées aux préfets afin d'accroître la vigilance et la réactivité des forces de sécurité de l'État pour une sécurisation accrue des sites concernés.

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