Question de M. MIZZON Jean-Marie (Moselle - UC) publiée le 14/07/2022

M. Jean-Marie Mizzon interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'accessibilité au numérique qui devrait être la règle pour tous.
Or, force est de constater que c'est loin d'être le cas dans notre pays où les inégalités face au numérique frappent en particulier les personnes en situation de handicap, c'est-à-dire près de 12 millions de personnes, ce qui est particulièrement inacceptable.
Cette situation est notamment dénoncée, et à juste titre, avec force par l'association Valentin Haüy, créée en 1889, reconnue d'utilité publique en 1891 et dont la vocation est d'aider les aveugles et les malvoyants à sortir de leur isolement et de leur apporter les moyens de mener une vie normale.
Une société inclusive se construit effectivement avec toutes et tous, aveugles et malvoyants compris.
Citoyens à part entière, ils devraient, par conséquent, comme tout un chacun, pouvoir procéder à un achat, entreprendre une démarche administrative ou encore bénéficier d'une consultation médicale à distance sans l'aide d'une personne voyante.
Pourtant, contre toute attente, alors qu'Internet se veut un outil d'inclusion sociale et d'autonomie, il n'en n'est rien pour près de 2 millions de déficients visuels pour lesquels 90 % des sites Internet restent inaccessibles.
À titre indicatif, sur les 250 démarches administratives les plus utilisées par les Français, dont beaucoup sont essentielles pour vivre en citoyen autonome, seules 15 % respectent les normes d'accessibilité.
Dans ces conditions, et afin de concrétiser l'obligation légale de rendre accessibles les services de communication au public en ligne aux personnes en situation de handicap, il lui demande s'il entend, par exemple, mettre en place une autorité de contrôle avec pouvoir de sanction spécifique pour faire en sorte que l'accessibilité ne soit pas un vain mot ou encore conditionner l'octroi d'aides publiques et l'accès aux marchés publics à une démarche inclusive et enfin développer une filière des métiers de l'accessibilité du numérique.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 27/07/2023

1. Un engagement fort du gouvernement pour l'accessibilité numérique : Le Gouvernement a annoncé de objectifs précis pour une politique d'accessibilité numérique (i) dans le décret n°2019-768 du 24 juillet 2019 portant obligation aux organismes assujettis de produire et publier un schéma pluriannuel de mise en accessibilité - une amende administrative de 20 000euros par site non conforme est également prévue et (ii) lors de la Conférence nationale du Handicap du 11 février 2020 au cours de laquelle le gouvernement s'est engagé à mettre en conformité les 15 sites gouvernementaux les plus fréquentés ainsi qu'au moins 80% des 250 démarches administratives en lignes les plus utilisées, et ce d'ici 2022 [1]. Afin que ces objectifs soient atteints, les ministres, secrétaires d'État et secrétaires généraux des ministères sont invités à saisir leurs directions pour mettre en oeuvre les engagements du Gouvernement concernant les services numériques de leur périmètre, mobilisation incluant les opérateurs publics sous leur tutelle. En 2019, le Gouvernement avait ainsi lancé l'observatoire des démarches en ligne avec pour objectif de numériser les 250 démarches les plus utilisées par les Français. Cette promesse a été tenue avec une numérisation désormais systématique des démarches administratives, à l'exception de quelques démarches particulièrement sensibles nécessitant un niveau de sécurité renforcé encore indisponible. Par ailleurs, une circulaire de la ministre de la transformation et de la fonction publique et de la secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées du 17 septembre 2020 a confié au Service d'information du Gouvernement le suivi de la mise en conformité des 15 sites gouvernementaux les plus fréquentés [le SIG a mis en place un programme'Top53'pour assurer le suivi, doté d'une enveloppe de 10Meuros] et à la Direction interministérielle du numérique (DINUM) celui des250 démarches administratives les plus utilisées. Ainsi tous les sites internet, intranet et extranet des collectivités et organismes publics créés avant le 23 septembre 2018 doivent être accessibles aux personnes handicapées et l'obligation s'étend au 23 juin 2021 aux applications mobiles, progiciels et mobiliers urbains numériques, comme les distributeurs de titres de transport. La circulaire prévoit aussi qu'aucun site de l'État nouveau ou refondu ne soit autorisé s'il n'atteint pas 75% de niveau de conformité au référentiel général d'amélioration de l'accessibilité (RGAA). La 6e Conférence nationale du handicap (CNH), le 26 avril 2023, sous l'autorité du Président de la République, a été l'occasion pour le Gouvernement de réaffirmer les objectifs et les obligations de la loi du 11 février 2005 en matière d'accessibilité, en associant l'État et les associations de collectivités dans une démarche au niveau local. Concernant le numérique, le Président s'est engagé à rendre 100 % des services publics numériques essentiels accessibles d'ici décembre 2025, en phase avec les exigences de la transposition dans le droit national de la directive européenne pour l'accessibilité des biens et des services. Aujourd'hui, la moitié des 250 démarches administratives les plus utilisées par les Français sont accessibles. Un plan de rattrapage a été annoncé lors de la CNH pour garantir, d'ici à 3 ans, l'accessibilité des démarches et sites Internet publics et l'intégralité de ces parcours. Pour faire pleinement respecter les obligations d'accessibilité et accompagner cettetransformation une enveloppe de 1,5 milliard d'euros sur 5 ans est mobilisée sur les trois versants de l'accessibilité. Sur cette base, l'État et les collectivités poursuivront leurs démarches en vue de rendre possible la mise en accessibilité de l'ensemble de leurs établissements recevant du public ainsi que de l'ensemble des démarches numériques de services publics d'ici 2027. Lors du 7ème comité interministériel à la transformation publique tenu le 9 mai 2023, une nouvelle version de l'observatoire de la qualité des démarches essentielles a été validée et sera donc prochainement déployée avec : Une actualisation des services suivis ; Une possibilité pour les interlocuteurs du service public de proximité (agents France services, accompagnants sociaux, médiateurs numériques) de faire part des difficultés persistantes rencontrées lors de la réalisation de démarches en ligne ; Des indicateurs de qualité des démarches renforcés (note de satisfaction usagers, sécurisation de la démarche, accessibilité aux personnes en situation de handicap, « dites-le nous une fois »). Pour l'ensemble de ces actions, un accompagnement méthodologique et financier au travers du guichet dédié du Fonds de Transformation de l'Action Publique sera proposé aux ministères et aux opérateurs par la DINUM. Un guichet FTAP, ouvert en 2023, doté de 2Meuros destiné aux ministères et à leurs opérateurs a été mis en place pour accélérer leur mise en accessibilité. 2. Le rôle d'expertise et de conseil de la DINUM sur le référentiel général d'amélioration de l'accessibilité : Pour faciliter la mise en oeuvre de l'accessibilité numérique, la DINUM édite depuis 2009 le RGAA, créé pour mettre en oeuvre l'article 47 de la loi handicap de 2005 et son décret d'application actualisé en 2019. Il fait régulièrement l'objet de nouvelles versions et mises à jour pour s'adapter aux évolutions du Web mais aussi aux changements de normes et réglementations. La version 4 du RGAA a été arrêtée conjointement par la circulaire du 17 septembre 2019. Elle est structurée en 2 parties. La première présente les obligations à respecter : elle s'adresse aux juristes, aux référents accessibilité numérique, aux managers et à tous les professionnels du web et de l'accessibilité. La deuxième contient une liste de critères pour vérifier la conformité d'une page web : elle s'adresse aux auditeurs RGAA. Pour conserver une correspondance la plus correcte possible avec les normes européenne et internationale de référence en accessibilité numérique, une version 4.1 du RGAA a été publiée le 16 février 2021. La DINUM a par ailleurs construit un outil d'audit d'accessibilité « Ara », basé sur la dernière version du référentiel général d'amélioration de l'accessibilité (RGAA 4.1) et qui permet, pour les administrations volontaires de : (i) procéder à un audit rapide de leurs démarches (25 critères audités), (ii) poursuivre par un audit complémentaire (50 critères audités) ; (iii) faire un audit complet, dit de conformité (106 critères) puis de (iv) générer un rapport d'audit et une déclaration d'accessibilité. 3. Une amélioration constante de l'accessibilité numérique, boostée notamment par les financements du plan de relance : En octobre 2020, l'observatoire de la qualité des démarches en ligne montrait que seules 11% des 250 démarches en ligne les plus utilisées par les Français étaient accessibles aux publics porteurs de handicaps [i.e 11% des démarches du « TOP250 » atteignent un taux de conformité à l'accessibilité supérieur à 75%], contre 20% en octobre 2021, 37% en janvier 2022 et 43% en octobre 2022. Parmi ces démarches figurent : « gérer mon prélèvement à la source » ou encore « déclaration de loyer pour l'aide au logement ». L'accompagnement proposé par la DINUM aux ministères et opérateurs de l'État porte ses fruits : (i) le recrutement et déploiement au sein des ministères d'experts en design, développement, accessibilité et recherche utilisateur apporte des résultats concrets et (ii) la sensibilisation et les formations gratuites au design et à l'accessibilité numérique proposées aux ministères. Dans le cadre du plan France Relance, une enveloppe de 32Meuros est dédiée à la dématérialisation des démarches administratives de l'État. En s'inspirant des dispositifs mis en place par le ministère de la Transformation et de la Fonction Publique (EIG et Startups d'Etat), des experts en mode commando (développeurs, designers, data-scientists, juristes, etc) sont déployés au sein des administrations porteuses des démarches de l'observatoire pour améliorer leur expérience et atteindre les objectifs fixés à 2022 [i.e la dématérialisation de toutes les démarches recensées et leur montée en qualité sur les 7 critères de l'observatoire : amélioration du design (UX), qualité de l'assistance aux utilisateurs, vélocité et réactivité de l'application, accessibilité aux personnes en situation de handicap, accès via un terminal mobile (smartphone / tablette), raccordement FranceConnect, Dites-le-nous une fois]. Un guichet a été ouvert pour orienter les administrations vers les dispositifs les plus pertinents et leur proposer un cofinancement égal à 75% du coût du projet. Il s'effectuera soit via la mise à disposition de prestations (designers, développeurs, juristes, chercheurs usagers, rédacteurs UX, mentors en management produit), soit via la mise à disposition de ressources financières. Plus de 50 projets ont bénéficié de ce financement. Dans le cadre de sa nouvelle feuille de route, la DINUM proposera aux ministères, de manière pérenne - i.e hors plan de relance, un accompagnement par la « brigade d'intervention numérique ». Cette brigade regroupera l'ensemble des expertises de la direction (accessibilité, cloud, UX, devops, écoconception etc.) et permettra de projeter, sur des durées courtes, des experts dans les ministères demandeurs pour les accompagner dans leur transformation. [1] conformité à hauteur de 75% du RGAA

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