Question de M. DEMILLY Stéphane (Somme - UC) publiée le 04/08/2022

M. Stéphane Demilly attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le nombre de friches industrielles, ferroviaires et tertiaires en France.
Dans un contexte marqué par la rareté du foncier disponible et par la lutte contre l'artificialisation des sols, la rénovation des friches industrielles représente un intérêt économique, social et environnemental très important pour nos territoires.
On estime entre 90 000 et 150 000 hectares la superficie occupée par les friches industrielles en France, ce qui constitue un vivier de foncier considérable.
Ces sites pourraient être utilisés pour la construction d'équipements ou de logements, sans empiéter sur les espaces naturels, dans le respect des objectifs de maîtrise de l'étalement urbain, de revitalisation urbaine et de limitation de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Cela répond à l'objectif du « Zéro artificialisation nette » (ZAN) fixé par le Gouvernement et inscrit dans la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi climat et résilience).
En France, les friches sont multiples et peuvent revêtir différentes formes : un terrain nu déjà artificialisé, mais qui a perdu son usage, un bâtiment d'habitation à déqualifier ou bien des sites divers (commercial, portuaire, ferroviaire, minier, industriel…).
Les friches ferroviaires sont nombreuses en France, à titre d'exemple, derrière la gare de la ville d'Albert (Hauts-de-France). La SNCF a son rôle à jouer dans la réhabilitation de ces friches, notamment au travers de son établissement SNCF Immobilier.
La question des « friches tertiaires » se pose également, avec la transformation des bureaux vides en logement.
La proportion de bureaux vides a presque doublé depuis le début de la crise du covid-19. Un secteur comme celui de la Défense est passé d'une vacance des espaces de bureaux de 4,7 % en 2019, à 14,3 % aujourd'hui : une réelle désertification.
Mais ce parc immobilier tertiaire nécessite des mises aux normes techniquement complexes et coûteuses, sur le plan de l'accessibilité, de l'isolation thermique, des installations électriques et sanitaires ou encore de l'aménagement intérieur.
La transformation des bureaux en logements pourrait être soutenue au travers de la mise en place de dispositifs fiscaux attractifs pour les ménages, afin de compenser la question de la rentabilité des opérations.
Cela s'inscrit également dans les objectifs de la loi climat et résilience qui veut favoriser la construction ou réhabilitation d'immeubles à usage « réversible ».
Nos territoires doivent pouvoir utiliser leurs friches industrielles, ferroviaires et tertiaires afin d'y développer de nouvelles activités.
Il l'interroge donc afin de savoir si des mesures spécifiques aux friches industrielles, ainsi que des financements de réhabilitation, sont prévus par le Gouvernement.

- page 4143


Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 01/12/2022

La reconversion des friches est l'un des leviers fondamentaux pour atteindre l'objectif de « zéro artificialisation nette des sols », assurer la reconstruction de la ville sur la ville et ainsi limiter l'étalement urbain et la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Pour accompagner cet effort, l'État a mis en place un certain nombre de dispositifs et d'outils. Tout d'abord des actions de connaissance ont été déployées afin de disposer d'un inventaire national des friches. À cet égard, des travaux ont été engagés à partir de 2020 par le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) à la demande du ministère chargé de l'écologie pour constituer un premier inventaire national à travers la base « CartoFriches ». Cette base est alimentée par plusieurs sources nationales (Basol, basias, fichiers fonciers…) et locales (intégration d'observatoires locaux). Le recensement effectué en septembre 2022 grâce à l'outil Cartofriches dénombre d'ores et déjà plus de 7200 sites de friches d'activité pour une surface de plus de 100 000 ha. Par ailleurs, le CEREMA a dénombré 27127 sites qualifiées de « friches de logements », correspondant à une surface de 73 160 ha et à un nombre de logements vacants de 79 090, dont plus de 26 000 logements individuels et plus de 52 000 logements collectifs. D'autres outils numériques ont été développés pour accompagner les porteurs de projet et les collectivités territoriales dans leur stratégie foncière, et la conduite de leurs projets de recyclage. L'outil « Urbanvitaliz » vise à guider dans leurs démarches les porteurs de projets et les collectivités. L'objectif est de les appuyer pour mieux connaître le site de friche urbaine identifié, les acteurs et les outils pour lancer les premières études et diagnostics et enfin les aider dans la recherche de financements. La plate-forme « Aides Territoires » constitue également un appui pour l'identification des aides mobilisables. Pour encourager le recyclage des friches, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) a aussi développé un autre outil, Bénéfriches, qui vise à aider les collectivités et aménageurs à mesurer les retombées économiques, sociales et environnementales de la réhabilitation de friches. La finalité de cet outil est de quantifier les bénéfices socio-économiques et environnementaux d'un projet de recyclage. L'État alloue également des subventions conséquentes en faveur du recyclage des friches dans le cadre du plan France Relance. L'enveloppe dédiée à ce « fonds friches » s'élevait initialement à 300 M€. Elle a été réabondée une première fois de 350 M€ en mai 2021, puis de 100 M€ supplémentaires en janvier 2022 compte tenu du très grand succès des premières éditions de ce fonds friches et des besoins exprimés par les territoires, soit au total 750 M€ sur la période 2021-2022 pour le recyclage des friches en vue de permettre la réalisation de projets d'aménagement et de construction. Les trois premières éditions de ce fonds accompagnent au total 1 382 projets lauréats et permettront de recycler à fin 2024 environ 3 375 ha de friches en générant près de 6 700 000 m2 de surfaces de logements (dont plus d'un tiers de logements sociaux), plus de 4 850 000 m2 de surfaces économiques (bureaux, commerces, industrie…) et plus de 4 079 000 m2 d'équipements publics. Compte tenu du succès de ce fonds et des enjeux liés à la lutte contre l'artificialisation des sols, sa pérennisation a été annoncée dès septembre 2021 par le Président de la République. Ce fonds de recyclage des friches sera intégré au sein du fonds d'accélération de la transition écologique des territoires. De plus, pour favoriser le recyclage de friches, un bonus de constructibilité de 30 % a été introduit par la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (article L. 152-6-2 du code de l'urbanisme), ce qui permet, dans certains cas, de faciliter l'équilibre économique de l'opération et de permettre une plus grande densité des projets réalisés dans des friches. Enfin, cette action se traduit également par l'adoption de nombreuses mesure fiscales ces dernières années en faveur de la sobriété foncière et du recyclage des friches. Tel est le cas en matière de taxe d'aménagement, d'une part, de la faculté pour les conseils départementaux d'utiliser les fonds issus de la part départementale pour acquérir des terrains artificialisés en vue de réaliser des travaux de renaturation et, d'autre part, des exonérations concernant les surfaces de stationnement dites « verticales » ou bien encore dans les situations de reconstruction après sinistre. Des mesures ciblées en matière de fiscalité des plus-values immobilières poursuivent les mêmes objectifs avec par exemple un taux réduit d'impôt sur les sociétés sur le plus-values nettes des cessions de locaux à usage de bureaux, locaux commerciaux, industriels en vue de leur transformation en locaux d'habitation ainsi que le dispositif d'exonération d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux de la plus-value réalisée lors de la cession à des personnes physiques d'un droit de surélévation. De même, en matière de TVA, les dispositifs de taux réduits dans le cadre du logement locatif social ou intermédiaire ont été adaptés afin de favoriser la transformation de locaux affectés à un usage autre que l'habitation pour favoriser leur reconversion en logements. Ce mouvement est encore poursuivi dans le cadre de ce projet loi de finances pour 2023 par lequel le Gouvernement propose notamment d'offrir la faculté aux collectivités locales d'exonérer de la taxe d'aménagement les constructions réalisées sur des sites qui ont fait l'objet d'une opération de dépollution ou d'une renaturation et effectuées dans des conditions permettant la réaffectation des sols à un usage conforme aux règles d'urbanisme applicables sur ces terrains. En outre, au sujet de la transformation des bureaux en logements, la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a introduit une obligation de diagnostic de changement d'usage, de destination en amont de tous travaux de démolition, mais aussi préalablement à tous travaux de construction d'un bâtiment, ce qui vise à favoriser la transformation des bureaux en logements.

- page 6176

Page mise à jour le