Question de Mme NOËL Sylviane (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 19/01/2023

Mme Sylviane Noël attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation que traversent les infirmiers libéraux de Haute-Savoie suite à une décision de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de modifier les modalités de remboursement de leurs indemnités kilométriques.

Si les infirmiers libéraux exerçant en zone urbaine ne sont globalement pas impactés, ceux exerçant en zone rurale et de montagne sont particulièrement pénalisés.

En effet, sur une même journée de soins, la différence entre le nouvel accord et l'ancien mode de calcul est stupéfiante : sur la commune de Passy la perte de revenus s'élève à 23 %, au Grand-Bornand à 15,3 % et à Taninges à 22,6 % !

Le manque à gagner est réel et se produit dans un contexte d'inflation fort qui touche particulièrement les carburants qui ont augmenté de 30 % alors que le coût du kilomètre montagne, lui, est passé de 50 à 51 centimes, soit 2 % d'augmentation seulement!

De plus, il convient également de rappeler que cette profession n'a pas connu de revalorisation de ses actes depuis 2009 ! Ainsi, depuis près de 15 ans, une prise de sang est toujours rémunérée 6,08 € bruts, soit un peu plus de 3 euros réellement dans leur poche déduction faite de leurs charges.

L'accord mis en œuvre en novembre 2022 constitue la goutte d'eau qui fait s'exprimer toute la lassitude et le manque de reconnaissance de toute une profession dans notre département qui, trop longtemps, est restée silencieuse.

Dans nos communes rurales, ces femmes et ces hommes sont le premier rempart lorsqu'un patient sort de l'hôpital.

Dans un contexte où l'hôpital public ne garde que très peu de temps les malades, où ces derniers ne peuvent rentrer chez eux qu'à condition d'être médicalement accompagnés, les infirmiers libéraux sont nécessaires au maintien à domicile et participent au désengorgement de notre système de santé.

Les infirmiers libéraux ont toujours répondu présents. Avant, pendant et après le covid, même malades, la continuité des soins a toujours été assurée avec détermination et peu de moyens.
Au regard du risque réel et inacceptable de diminution de l'offre de soins en montagne, elle lui demande que le Gouvernement intervienne pour corriger cette situation particulièrement injuste.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports publiée le 10/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 09/02/2023

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, auteure de la question n° 362, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Sylviane Noël. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la situation que traversent les infirmiers libéraux, à la suite d'une décision de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Haute-Savoie de modifier les modalités de remboursement de leurs indemnités kilométriques depuis le mois de novembre dernier, ce qui pénalise fortement les professionnels exerçant en zones rurales et de montagne.

En effet, dans ces secteurs parfois éloignés et difficiles d'accès, qui sont escarpés et enneigés une bonne partie de l'année, le rythme de visite des patients est fortement différent de l'exercice en milieu urbain et en fond de vallée. Ces contraintes doivent être prises en compte dans le calcul des compensations kilométriques, faute de quoi le manque à gagner pour les infirmières est inévitable.

Ainsi, la différence entre le nouveau et l'ancien mode de calcul est stupéfiante. À titre d'exemple, sur la commune de Passy, la perte de revenus s'élève à 23 % ; au Grand-Bornand, à 15 % ; et à Taninges, à 22,6 %. Le manque à gagner est réel et se produit dans un contexte de forte inflation, qui touche particulièrement les carburants.

Ces infirmiers libéraux réalisent au quotidien un travail exceptionnel, au plus près des patients et des territoires, permettant le maintien à domicile des malades. Leur action contribue ainsi au désengorgement de nos établissements de santé, fortement embolisés par une pénurie de personnel inédite.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour remédier à cette injustice ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Madame la sénatrice Noël, je vous réponds au nom du ministre de la santé François Braun.

Le coût des transports est au cœur des préoccupations de nos concitoyens. C'est particulièrement vrai pour un certain nombre de professionnels, dont les infirmiers libéraux, qui se rendent au domicile des patients.

En 2019, les partenaires conventionnels avaient convenu d'un abattement du tarif du remboursement des indemnités kilométriques, au regard de la distance journalière facturée par l'infirmier.

Cette nouvelle disposition importante permet de limiter les indus et de laisser la possibilité de facturer « en étoile », c'est-à-dire sans mesurer à chaque fois la distance entre le domicile du patient et le cabinet de l'infirmier.

Dans un esprit de souplesse, la possibilité d'adapter les modalités de facturation aux spécificités locales avait été laissée.

Le nouvel accord de la CPAM de Haute-Savoie met en place des règles plus avantageuses : prise en compte des kilomètres effectués au sein d'une même commune, à partir de 1,5 kilomètre, qui n'étaient auparavant pas indemnisés ; valorisation des indemnités au titre de la « zone montagne » étendue à l'ensemble du territoire de la Haute-Savoie.

De manière plus globale, le Gouvernement soutient l'implication des infirmiers libéraux dans la prise en charge des patients à domicile.

L'avenant du mois de janvier dernier prévoit un doublement des nouvelles rémunérations sur le bilan de soins infirmiers pour la période allant jusqu'à 2024, soit plus de 200 millions d'euros.

Ces mesures s'ajoutent aux dispositions de l'avenant de 2019, qui améliore la prise en charge et l'accès aux soins des patients.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 confie de nouvelles missions aux infirmiers, comme l'élargissement de leurs compétences vaccinales ou une expérimentation pour la réalisation des certificats de décès, ce qui est de nature également à améliorer leur pouvoir d'achat.

Sur la question des indemnités en particulier, et pour prendre en compte des situations locales, nous sommes prêts, avec François Braun, à examiner chaque situation avec vous dans les prochaines semaines.

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour la réplique.

Mme Sylviane Noël. J'entends votre réponse, monsieur le ministre. Mais, sur le terrain, les infirmières ont une tout autre vision de ce qui se passe : 14,28 euros pour vingt-quatre visites, soit 60 centimes en moyenne d'indemnités horokilométriques montagne par visite. Voilà la réalité de ce qu'elles vivent dans certains secteurs de Haute-Savoie.

Croyez-moi, à ce niveau-là de revenus, on ne peut pas survivre. Ce genre d'économies de bouts de chandelle ne nous mènera malheureusement à rien. Il faudra alors hospitaliser de nouveau certains patients, qui ne pourront plus être maintenus à domicile. Au final, cela nous coûtera beaucoup plus cher et risque d'accroître la pénurie en matière d'offre de soins dans certains secteurs. Il est donc urgent d'agir.

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