Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 19/01/2023

Mme Dominique Estrosi Sassone attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la prise en charge de la télésurveillance des patients porteurs de moniteurs cardiaques implantables.

L'article 36 de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 a instauré le principe des expérimentations de télémédecine avec son programme d'expérimentations de télémédecine pour l'amélioration des parcours en santé (ETAPES). Prolongé par la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, il cible cinq pathologies (insuffisances cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance respiratoire, diabète, prothèses cardiaques implantables). Au vu des innovations en santé qui existent aujourd'hui, ce cadre est restrictif en ce qu'il exclut de nombreuses pathologies qui disposent pourtant de dispositifs médicaux permettant une surveillance continue.

C'est le cas des moniteurs cardiaques implantables (MCI), dispositifs médicaux à visée diagnostique dont sont porteurs 35 000 patients en France. Ces patients ont une activité cardiaque surveillée en continu faisant suite soit à des syncopes inexpliquées récidivantes, soit à un accident ischémique cérébral (AIC) cryptogénique. Pour ces deux indications, la découverte d'un trouble du rythme conduira habituellement à la mise en place d'un traitement adapté qui permettra d'éviter les récidives d'accident vasculaire cérébral (AVC) ou de syncopes. Outre leur intérêt clinique en matière de prévention, les MCI démontrent un intérêt organisationnel, reconnu par la haute autorité de santé (HAS), en faveur d'une amélioration du parcours patient. Ils permettent non seulement de passer d'une pose en séjour hospitalier à une pose en ambulatoire, mais également d'un suivi conventionnel en présence du patient à un suivi à distance par télésurveillance. Ces deux évolutions sont aujourd'hui difficilement réalisables puisque les établissements ne sont pas incités à développer la pratique ambulatoire et que les professionnels ne sont pas rémunérés pour le suivi par télésurveillance.

Alors que la généralisation de la télésurveillance était initialement prévue par la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, au plus tard le 1er juillet 2022, puis reportée au 1er juillet 2023, les perspectives de la prise en charge du suivi par télésurveillance des patients porteurs de MCI semblent encore éloignées. D'une part, le cadre juridique permettant le passage effectif dans le droit commun de la prise en charge de la télésurveillance n'existe toujours pas, faute de textes réglementaires afférents. D'autre part, les autorités ne donnent pas de signal ni de calendrier sur leur volonté de donner accès à la télésurveillance pour les pathologies autres que celles couvertes par le programme dérogatoire et temporaire ETAPES. Enfin, la prise en charge pour une nouvelle pathologie nécessite au préalable l'élaboration par la HAS d'un référentiel fixant les exigences techniques et organisationnelles attendues.

Elle souhaite l'alerter sur la perte de chance que cette situation provoque aux patients porteurs de MCI et elle souhaiterait également savoir quelles mesures il entend prendre afin d'y remédier et prendre en charge le télésuivi des patient porteurs de MCI pour assurer une organisation pérenne autour de la prévention des récidives d'AVC et des syncopes inexpliquées.

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Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 20/07/2023

La télésanté constitue une opportunité majeure pour l'organisation de notre système de santé et pour l'amélioration de l'accès aux soins, particulièrement dans les territoires à faible densité médicale. La pratique des actes médicaux de téléconsultation et de téléexpertise sont désormais encadrés par un cadre légal et réglementaire, tandis que les conditions de remboursement sont fixées par voie conventionnelle entre l'Assurance maladie et les médecins libéraux depuis 2018. Concernant l'accès à la télésurveillance pour le plus grand nombre, l'article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a acté l'entrée dans le droit commun de cette pratique après la phase d'expérimentation ETAPES dont la fin de phase de transition sera effective au 1er juillet 2023. Deux décrets publiés le 31 décembre 2022 au journal officiel ont permis l'entrée en vigueur au 1er janvier 2023 de ce modèle de droit commun spécifique à la télésurveillance. Ce nouveau cadre associe la rémunération du suivi médical réalisé à distance par une équipe soignante et celle de la mise à disposition par l'exploitant du dispositif médical numérique (DMN) utilisé. Ainsi, le premier décret (n° 2022-1767) porte sur les modalités d'évaluation et d'inscription au remboursement de la télésurveillance et le second (n° 2022-1769) sur la déclaration des activités de télésurveillance des équipes soignantes aux Agences régionales de santé (ARS). Par ailleurs, et afin d'éviter toute rupture de suivi médical entre la fin d'ETAPES et la généralisation du droit commun, une phase de transition est en cours avec des conditions de prise en charge définies. Ainsi, tout patient bénéficiant de télésurveillance est assuré d'être pris en charge sans discontinuité ou modification, l'opérateur et l'exploitant du DMN étant quant à eux garantis de continuer à être rémunérés. La Haute autorité de santé (HAS) a d'ores et déjà publié les 5 référentiels encadrant les indications retenues dans ETAPES (insuffisance cardiaque, insuffisance respiratoire, insuffisance rénale, diabète, prothèses cardiaques implantables) qui seront très prochainement publiés par arrêté pour permettre la bascule effective à l'été. Concernant la prise en charge de la télésurveillance dans le cadre d'une nouvelle indication non comprise dans les 5 actuelles, il est possible, depuis la publication des décrets, pour tout industriel d'accéder au marché des DMN pris en charge par l'Assurance maladie en déposant une demande de certification auprès de l'Agence du numérique en santé puis un dossier auprès de la HAS. Cette dernière pourra ainsi évaluer la place de tout nouveau type de DMN dans le parcours de soin de la pathologie concernée par le biais de sa Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDIMTS). Ce processus est indispensable pour garantir la qualité et la sécurité des solutions de télésurveillance proposées aux patients et prises en charge par l'Assurance maladie, et représente un impératif réglementaire. Concernant les moniteurs cardiaques iImplantables (MCI) à visée diagnostique exclusive, l'examen par le CNEDIMTS de la candidature d'un industriel en faisant la demande dans cette nouvelle indication devrait être facilité par l'existence du rapport déjà rendu par la HAS le 11 mars 2021 et par l'ouverture de la possibilité de prise en charge anticipée dite « PECAN » permettant d'accélérer les prises en charge anticipées de dispositifs médicaux numériques.

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