Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 26/01/2023

M. Sebastien Pla souhaite rappeler l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la question n°26287 du 20/01/2022 par laquelle il l'interpelle au sujet de la tribune signée par près de 3 000 magistrats et une centaine de greffiers, qui s'alarment de la dégradation de leurs conditions de travail, et pointent que l'institution judiciaire est à bout de souffle et ne leur permet plus d'exercer des missions de service public dans des conditions acceptables pour les justiciables. Il lui expose que cette souffrance au travail des magistrats, relayée le 10 janvier 2022, lors de l'audience solennelle de rentrée de la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire français par le procureur général près la Cour de cassation, ne peut davantage être ignorée.
Audiences surchargées, arrêts maladie qui se multiplient parmi le personnel judiciaire, audiences classées sans suite ou encore traitement des affaires de divorce « en quinze minutes » sans pouvoir donner la parole aux parties sont le quotidien de ces agents du service public de la justice. Il souligne que ces professionnels sont unanimes dans toutes les juridictions à dénoncer une vision gestionnaire et comptable plutôt que de moyens, et réfutent l'idée d'une justice qui n'écoute pas, « une justice qui maltraite les justiciables, mais également ceux qui œuvrent à son fonctionnement ». Les magistrats estiment être dès lors placés face à un « dilemme intenable : juger vite mais mal, ou juger bien dans des délais inacceptables ».
Il lui demande donc de bien vouloir répondre aux tensions présentes dans le monde judiciaire et lui indiquer les pistes qu'il entend suivre car manifestement les 650 magistrats et 850 greffiers supplémentaires affectés durant le quinquennat et l'augmentation récente du budget de la justice n'ont pas suffi à apaiser la souffrance de ces professionnels.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 06/04/2023

Avec une enveloppe budgétaire sans précédent de 9,6 milliards d'euros, le ministère de la Justice bénéficiera en 2023 d'une nouvelle augmentation de +8 % de son budget suivant les deux précédentes hausses de +8% déjà accordées en 2022 et 2021. Ce sont ainsi 710 millions d'euros supplémentaires qui viendront abonder en 2023 le service public de la Justice. Ce sont en effet 2 milliards d'euros de crédits supplémentaires qui ont été accordés sur trois budgets consécutifs, passant ainsi de 7,6 milliards d'euros en 2021 à 9,6 milliards d'euros en 2023, soit une hausse inédite de +26% du budget de la justice en trois ans et de plus de 40% depuis 2017. Dans la continuité des conclusions des États généraux de la Justice, ces moyens permettront de renforcer les effectifs, les conditions de travail des agents et la qualité du service rendu, mais également, de poursuivre les chantiers déjà amorcés, notamment les programmes immobiliers judiciaires et pénitentiaires initiés par le Président de la République, et le développement des projets numériques. La justice ne pouvant fonctionner sans des femmes et des hommes œuvrant quotidiennement à son service, ce sont 10 000 emplois supplémentaires qui seront créés d'ici 2027, soit une hausse de 11% en cinq ans, au service, entre autres, du renfort des effectifs en juridictions, de l'armement des nouveaux établissements pénitentiaires et des services de la protection judiciaire de la jeunesse. Le ministère de la Justice bénéficiera de la création de 1 500 postes de magistrats et de 1 500 postes de greffiers. Le projet de loi de programmation et d'orientation du ministère de la justice aura pour ambition de porter le budget de la justice à environ 11 milliards d'euros d'ici 2027. Cela représentera un effort cumulé de plus de 7,5 milliards d'euros sur cinq ans. Dès 2023, première année de ce nouveau quinquennal budgétaire, la création nette de 208 postes de magistrats a ainsi d'ores et déjà été confirmée, outre la création de 300 emplois de juristes assistants et 20 emplois d'assistants spécialisés. S'il est difficile de rattraper en quelques mois des décennies d'insuffisance, les recrutements de magistrats connaîtront une augmentation historique grâce à 470 postes offerts aux auditeurs de justice et 80 postes offerts au concours complémentaire pour l'année 2023. Les emplois de contractuels ont quant à eux été pérennisés. En outre  au-delà des effectifs de magistrats, les juridictions sont soutenues dans leur capacité de jugement par le renforcement de l'équipe autour du magistrat. Ainsi de très nombreux recrutements ont été effectués au cours de cette année 2022 et ce sont désormais 141 assistants spécialisés et 935 juristes assistants (fonctions créées en 2016) qui sont en poste au sein des juridictions au 1er janvier 2023. Ces moyens supplémentaires ont d'ores et déja permis de réduire les stocks d'affaires à juger et dans les délais de traitement. A titre d'exemple, les stocks civils ont diminué de 15 à 25 % selon les matières et les juridictions depuis le 1er janvier 2021. L'octroi de moyens supplémentaires aux magistrats est donc au cœur des préoccupations du ministère de la Justice, qui par ailleurs, achève actuellement une réflexion d'envergure entamée dans le cadre des États généraux de la justice quant à l'évaluation de la charge de travail, aux fins de répartir ces nouveaux moyens de manière optimale. S'agissant des personnels de greffe, chaque année, la circulaire de localisation des emplois constitue le cadre annuel opérationnel pour les effectifs des juridictions. Les travaux sur la localisation des emplois 2022 ont eu pour objectif de répondre aux besoins les plus prioritaires des juridictions en maintenant l'accent sur l'accompagnement des juridictions JIRS et des juridictions identifiées comme particulièrement en tension en métropole et en outre-mer. C'est dans cette perspective que la direction des services judiciaires s'efforce de répartir au mieux les effectifs sur l'ensemble du territoire, tout en tenant compte des spécificités de chaque ressort. 

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