Question de Mme HARRIBEY Laurence (Gironde - SER) publiée le 23/02/2023

Mme Laurence Harribey attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la fixation du prix des médicaments qui doit tenir compte de l'impératif de sécurité d'approvisionnement du marché français.

Les entreprises produisant sur notre territoire des médicaments matures, dont le brevet est tombé dans le domaine public, rencontrent actuellement d'énormes difficultés. L'inflation qui accroît le coût des intrants et de l'énergie, couplée à une réglementation toujours plus contraignante, renchérit considérablement les coûts de production.

En parallèle, le prix de ces médicaments est fixé dans le cadre d'un accord avec le comité économique des produits de santé (CEPS). On observe que chaque année, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, les budgets couvrant l'achat de ces médicaments matures sont revus à la baisse.

Dans ce contexte, la situation financière de ces entreprises est de plus en plus précaire. Or, de ces entreprises produisant des médicaments sur le territoire national dépend notre souveraineté sanitaire. En dépend également l'accès aux médicaments pour nos concitoyens, notamment lorsqu'un pays comme la Chine décide de restreindre ses exportations pour faire face à ses propres besoins.

La loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 prévoit que le CEPS puisse fixer le prix des médicaments en tenant compte de l'impératif de sécurité d'approvisionnement du marché français, que garantit l'implantation des sites de production sur le territoire national.

Elle lui demande comment cette disposition est-elle aujourd'hui mise en oeuvre.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 22/03/2023

Réponse apportée en séance publique le 21/03/2023

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, auteure de la question n° 462, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Laurence Harribey. Ma question porte sur l'impact du prix des médicaments sur la situation des entreprises produisant, en France, des médicaments matures.

Aujourd'hui, ces entreprises sont doublement pénalisées. Non seulement l'inflation alourdit le coût des intrants et de l'énergie, mais une réglementation toujours plus contraignante renchérit les coûts de production.

Le prix des médicaments fixé par un accord-cadre conclu avec le Comité économique des produits de santé (CEPS). Or, chaque année, les budgets couvrant l'achat des médicaments matures sont revus à la baisse. De fait, la situation financière de ces entreprises est de plus en plus précaire.

Notre souveraineté sanitaire et l'accès de nos concitoyens aux médicaments dépendent beaucoup de ces entreprises.

Le CEPS est tenu de fixer le prix des médicaments en prenant en compte l'impératif de sécurité d'approvisionnement. Comment cette disposition est-elle effectivement mise en oeuvre aujourd'hui ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, le ministre François Braun regrette de ne pouvoir être présent ce matin.

La tarification d'un médicament s'appuie majoritairement sur sa valeur clinique, notamment sur son niveau d'amélioration du service médical rendu (ASMR). Un nouveau critère a toutefois été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 pour mieux prendre en considération la sécurité d'approvisionnement du marché français, qui garantit l'implantation industrielle.

Afin de l'appliquer concrètement, le CEPS a élaboré une doctrine de critères d'éligibilité et de niveau de valorisation. Récemment finalisée, celle-ci peut dorénavant être mise en pratique.

Pour les entreprises commercialisant des produits essentiels, lorsque le niveau de prix ne serait plus compatible avec la garantie d'un maintien sur le marché, l'article 28 de l'accord-cadre signé entre le CEPS et les industriels permet d'accéder à une hausse de prix dès lors que les critères d'éligibilité prédéfinis sont réunis.

Les postes de surcoût pris en compte sont ceux qui sont liés à la matière première. Toutefois, un élargissement de ce périmètre au surcoût lié à la production dans sa globalité pourrait être considéré pour des médicaments de forte criticité sanitaire et industrielle.

Une liste de médicaments stratégiques d'intérêt sanitaire est par ailleurs en cours d'élaboration avec les sociétés savantes, afin de définir les molécules pour lesquelles le levier du prix pourra être actionné s'il se révèle pertinent pour assurer leur maintien sur le marché.

Finalement, une mission interministérielle sur les mécanismes de régulation et de financement des produits de santé a été lancée en janvier dernier, sous l'égide de la Première ministre, dont les conclusions sont attendues pour l'été prochain. Ses principaux objectifs sont le renforcement de notre tissu productif, notamment pour les produits matures essentiels, dans un objectif de souveraineté sanitaire, l'attractivité des territoires pour les industriels et la relocalisation de produits de santé stratégiques.

Ainsi, le Gouvernement est pleinement mobilisé autour de l'enjeu prioritaire qu'est la régulation du prix du médicament pour répondre aux enjeux actuels comme à venir.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour la réplique.

Mme Laurence Harribey. Madame la ministre, je vous remercie des éléments que vous avez avancés.

Cependant, je souhaite souligner que l'accord-cadre entre le CEPS et les entreprises du médicament ne répond pas suffisamment à l'enjeu, en particulier son article 28. Celui-ci ne prévoit une hausse du prix des médicaments que lorsque l'arrêt de la production ou de la commercialisation empêcherait de couvrir un besoin thérapeutique, comme vous l'avez expliqué.

Or, dans le cas présent, il s'agit de garantir la diversification des approvisionnements. Lors d'une récente audition menée avec Pascale Gruny, mon interlocuteur m'a confié qu'une seule augmentation de prix avait été consentie, pour un montant de seulement 2 centimes la boîte.

Il est important de rappeler que le CEPS est placé sous la tutelle du Gouvernement ; il est donc de votre responsabilité d'agir à cet égard. J'espère que la mission à laquelle vous avez fait référence permettra d'aller beaucoup plus loin, car la question est importante.

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