Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 16/02/2023

M. Jean Louis Masson rappelle à M. le garde des sceaux, ministre de la justice les termes de sa question n°04277 posée le 08/12/2022 sous le titre : " Recouvrement des frais irrépétibles ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour. Il s'étonne tout particulièrement de ce retard important et il souhaiterait qu'il lui indique les raisons d'une telle carence.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 02/03/2023

Aux termes de l'article 11 du code de justice administrative, « Les jugements sont exécutoires. ». Selon les dispositions de l'article L.761-1 du même code, « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. ». Il en résulte que la partie condamnée au paiement de frais irrépétibles sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative est tenue de l'exécuter. L'action en recouvrement d'une créance pécuniaire non fiscale se prescrit dans le délai de droit commun prévu à l'article 2224 du code civil, selon lequel « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ». Ce délai de prescription n'est toutefois applicable qu'en l'absence de dispositions spéciales (CE, 4 octobre 2019, n° 418224). L'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose que « L'action des comptables publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes ». L'application de cet article est subordonnée à l'émission d'un titre de recettes par l'ordonnateur de la collectivité. Lorsqu'une commune se voit accorder des frais irrépétibles, la créance qu'elle détient ainsi sur la partie adverse résulte d'une décision de justice rendue par un tribunal administratif. Les dispositions du 1° de l'article L.111-3 du code des procédures civiles d'exécution prévoient que constituent des titres exécutoires « les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire ». Selon l'article L.111-4 du même code, « L'exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1° à 3° de l'article L. 111-3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long. / Le délai mentionné à l'article 2232 du code civil n'est pas applicable dans le cas prévu au premier alinéa ».   Sur le fondement de ces dispositions, il a été jugé que le recouvrement d'une astreinte prononcée par une juridiction administrative à l'encontre d'une personne privée suite à la non-exécution d'une de ses décisions de justice est soumis au délai de prescription de dix ans (Cour administrative d'appel de Marseille, 31 décembre 2021, n° 20MA01332). Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la commune est en possession d'un titre exécutoire au sens des articles L.111-3 et suivants du code des procédures civiles d'exécution et qu'elle dispose d'un délai de dix ans à compter du jugement du tribunal administratif pour obtenir le recouvrement de la somme qui lui a été allouée sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.  Par ailleurs, il ressort des travaux parlementaires de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile que la prescription décennale de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution a vocation à s'appliquer à toutes les décisions de justice rendues par les juridictions administratives, pourvu qu'elles soient dotées de la force exécutoire. Sous réserve de l'appréciation du juge en la matière, le Gouvernement estime que le délai de prescription prévu à l'article L.111-4 du code des procédures civiles d'exécution s'applique non seulement lorsqu'une personne privée a été condamnée au paiement de frais irrépétibles au profit d'une personne publique, mais également dans l'hypothèse où une personne publique a été condamnée au paiement de frais irrépétibles au profit d'une autre personne publique, par un jugement rendu par un tribunal administratif.

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