Question de Mme CONCONNE Catherine (Martinique - SER) publiée le 16/03/2023

Question posée en séance publique le 15/03/2023

M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Catherine Conconne. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Haïti pleurant tous les jours ses morts et ses blessés par dizaines, Haïti affamé, Haïti livré aux mains de gangs, Haïti assistant au viol de ses femmes, Haïti voyant ses enfants recrutés par des groupes armés, Haïti sans gouvernement, sans État, s'enfonce inexorablement dans le chaos.

Pourtant, pas un mot de l'État sur la situation de ce pays auquel nous sommes tant redevables, ce pays envers lequel nous avons une « dette morale », comme le disait si légitimement François Hollande en 2015. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)

Première colonie noire à prendre son indépendance en 1804, Haïti, à bien des égards, a ouvert des chemins, repoussé les limites du possible, et ce, alors même qu'il a été dès le départ affublé du fardeau indigne d'une dette insoutenable pour acheter sa liberté.

La résolution adoptée par l'ONU au mois d'octobre dernier constitue un pas symbolique, mais elle ne peut servir de refuge pour justifier notre inaction collective.

Certains pays, comme le Canada, ont fait le choix d'une politique plus active. Que fait la France, alors qu'Haïti n'est qu'à une heure trente de vol des pays français d'Amérique ? Que fait l'Europe ?

Il faut désormais aller plus loin que des sanctions face au massacre des Haïtiens. Pour pallier le retrait des organisations humanitaires qui baissent les bras une à une, il faut organiser la coopération dans le bassin caribéen. Face au massacre quotidien de civils haïtiens, face à la terreur et à la famine dans lesquelles vit la population, il faut oser l'envoi d'une force de maintien de la paix pour venir en aide à cet État inexistant.

Dois-je rappeler qu'à la suite de l'assassinat du président Moïse en 2017 Haïti n'a plus de gouvernement ?

Combien de temps encore allons-nous attendre ? Combien de morts, combien d'horreurs, combien de viols, combien de drames avant d'agir ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE.)

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Réponse du Ministère auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger publiée le 16/03/2023

Réponse apportée en séance publique le 15/03/2023

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger.

M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice Conconne, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Nous sommes d'accord sur un point : la situation à Haïti est très grave du point de vue humanitaire, sécuritaire et politique.

En revanche, je ne partage pas vos propos sur l'inaction de la France.

Le France est en effet, aux côtés des États-Unis et du Canada, l'une des nations les plus actives pour tenter d'aider les Haïtiens. (Mme Catherine Conconne manifeste son scepticisme.)

Cela passe par le soutien que nous apportons à la police nationale haïtienne, que nous allons d'ailleurs renforcer.

Cela passe également par les moyens que nous déployons au titre de l'aide humanitaire, d'un montant de 8,5 millions d'euros : 5 millions d'euros d'aide alimentaire bénéficient directement aux Haïtiens.

Comme vous l'avez indiqué, madame la sénatrice, nous agissons également dans le cadre diplomatique. Cela s'est notamment traduit par la résolution 2653 de l'Organisation des Nations unies prévoyant des sanctions envers les criminels, notamment les gangs, responsables des faits que vous dénoncez.

Enfin, nous sommes à l'écoute de nos partenaires en ce qui concerne le projet de force internationale d'appui à la police nationale haïtienne, auquel nous pourrions envisager d'apporter un soutien matériel.

Comme vous le savez, madame la sénatrice, la sortie de crise implique un accord inclusif entre les acteurs politiques haïtiens. La mise en place récente du Haut Conseil de la transition doit permettre d'avancer vers des élections, conformément au document du 21 décembre dernier intitulé Consensus national pour une transition inclusive et des élections transpartisanes. C'est en tout cas ce que nous nous souhaitons, pour le bien d'Haïti. (M. Ludovic Haye applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour la réplique.

Mme Catherine Conconne. Je ne peux que déplorer la très grande discrétion des actions que vous venez d'énumérer, monsieur le ministre.

Il est vrai qu'Haïti n'a ni pétrole ni gaz… (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)

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