Question de M. SALMON Daniel (Ille-et-Vilaine - GEST) publiée le 23/03/2023

M. Daniel Salmon attire l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur la perspective d'une interdiction des chaudières à gaz dans les logements individuels et collectifs.
La hausse des prix de l'énergie qui a fortement affecté les ménages et les collectivités, ainsi que les tensions rencontrées sur l'approvisionnement électrique doivent interroger sur l'opportunité d'inciter à s'orienter sur du tout électrique.
En effet, sur le seul secteur de la maison individuelle, en supposant que soient installées en remplacement des pompes à chaleur performantes, l'abandon des chaudières engendrerait une pointe estimée à 15 GW supplémentaires (soit l'équivalent de 9 réacteurs pressurisés européens - EPR). Dans le secteur du logement collectif, aucune solution technique n'existe en dehors des radiateurs électriques pour remplacer les chaudières individuelles.
Le changement de source d'énergie pour le chauffage n'est pas l'élément premier de la transition écologique. Il est impératif d'accélérer la rénovation thermique pour diviser par cinq la consommation en kwh/m² quelle que soit la source d'énergie.
Cette décision entraînerait également des conséquences économiques importantes. En effet, les chaudières sont majoritairement produites en France et en Allemagne, à la différence des pompes à chaleur dont la valeur du marché est pour moitié située en Asie.
Il est entendu que la décarbonation des utilisations du gaz dans les bâtiments doit être une priorité. Néanmoins une mesure d'interdiction des chaudières serait contre-productive et viendrait impacter le développement du gaz renouvelable en limitant à terme la capacité d'intégration de ces gaz verts dans les réseaux ou obligerait à recourir à des systèmes couteux de rebours vers les réseaux de transport et de stockage. Plutôt qu'une interdiction des chaudières, il conviendrait de renforcer le soutien au développement de la filière française des gaz renouvelables, en favorisant notamment les boucles locales de consommation.
Pour ces raisons, il souhaiterait connaître les intentions réelles du Gouvernement sur ce sujet.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme publiée le 05/04/2023

Réponse apportée en séance publique le 04/04/2023

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, auteur de la question n° 532, adressée à Mme la ministre de la transition énergétique.

M. Daniel Salmon. Ma question, qui s'adressait à Mme la ministre de la transition énergétique, porte sur la perspective d'une interdiction des chaudières à gaz dans les logements individuels et collectifs.

La hausse des prix de l'énergie, qui a fortement affecté les ménages et les collectivités locales, ainsi que les tensions rencontrées en matière d'approvisionnement électrique doivent nous pousser à nous interroger sur l'opportunité d'inciter au tout électrique.

En effet, pour le seul secteur de la maison individuelle, l'abandon des chaudières engendrerait une pointe estimée à 15 gigawatts supplémentaires, soit l'équivalent de neuf EPR (European Pressurized Reactors) ; cela suppose qu'elles soient remplacées par des pompes à chaleur performantes. Dans le secteur du logement collectif, il n'existe aucune solution technique autre que les radiateurs électriques pour remplacer les chaudières individuelles.

Le changement de source d'énergie pour le chauffage n'est pas l'élément premier de la transition écologique. Il est impératif d'accélérer la rénovation thermique pour diviser par cinq la consommation en kilowattheure par mètre carré, quelle que soit la source d'énergie.

Cette décision entraînerait également des conséquences économiques importantes. En effet, les chaudières sont majoritairement produites en France et en Allemagne, à la différence des pompes à chaleur, dont la valeur de marché se situe pour moitié en Asie.

Il est entendu que la décarbonation des utilisations du gaz dans les bâtiments doit être une priorité. Néanmoins, une mesure d'interdiction des chaudières serait contre-productive et affecterait le développement du gaz renouvelable, en limitant à terme la capacité d'intégration de ces gaz verts dans les réseaux, ou obligerait à recourir à des systèmes coûteux de rebours vers les réseaux de transport et de stockage.

Plutôt que d'interdire les chaudières, il conviendrait de renforcer le soutien au développement de la méthanisation, en s'appuyant sur un modèle agricole résilient et durable et en favorisant notamment les boucles locales de consommation.

Je souhaite donc connaître les intentions réelles du Gouvernement. Plus particulièrement, j'aimerais savoir si l'interdiction des chaudières à gaz est réellement envisagée.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme. Monsieur le sénateur Salmon, comme vous le savez, le Président de la République a fixé des objectifs très ambitieux en matière de transition énergétique : être le premier grand pays industriel à se libérer de sa dépendance aux énergies fossiles et atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050.

Depuis le début de l'année 2022, la réglementation environnementale 2020 vous la connaissez, la fameuse RE2020 tend à imposer le recours à une part importante d'énergie décarbonée pour le chauffage et l'eau chaude sanitaire dans les logements neufs.

Cette première échéance a été imposée aux maisons individuelles. Elle sera progressivement étendue aux logements collectifs en 2025 et aux bâtiments tertiaires. Son objet est de poursuivre l'amélioration de la performance énergétique et du confort des constructions, tout en diminuant leur empreinte carbone. À ce jour, il n'y a donc pas d'interdiction d'installation de chaudières à gaz dans les logements existants.

Certaines aides, comme MaPrimeRénov', tirent les conséquences de cette évolution. Cette aide, qui a permis de rénover près de 700 000 logements en 2022, ne subventionne plus l'achat de chaudières au fioul ou au gaz.

Néanmoins, des solutions compétitives existent : les réseaux de chaleur, les énergies renouvelables (EnR), les systèmes solaires thermiques, etc.

Je rappelle les ordres de grandeur en matière de biogaz. Nous avons consommé 480 térawattheures de gaz en 2021. Notre capacité actuelle d'injection dans le réseau est de 10 térawattheures de biogaz. Le gisement global de biomasse reste limité, mais il sera fortement sollicité par l'industrie de la biochimie ou par des secteurs l'aéronautique ou le maritime qui ont peu de solutions alternatives pour leur décarbonation.

La réduction de notre consommation globale de gaz n'est donc pas incompatible avec le développement fort du biogaz au service des secteurs industriels et dans le cas où les solutions alternatives au gaz sont limitées. Nous devons faire les deux afin de sortir au plus vite des énergies fossiles.

Monsieur le sénateur, soyez rassuré, le Gouvernement continuera de contribuer au développement des énergies décarbonées et d'accompagner les différentes filières, dont celle des gaz renouvelables.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Salmon, pour la réplique.

M. Daniel Salmon. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, que nous partageons.

Sur ce point nous avons une vision commune, mais nous devons faire attention à la pointe d'électricité, très coûteuse et très difficile à effacer.

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