Question de M. HINGRAY Jean (Vosges - UC) publiée le 02/03/2023

M. Jean Hingray attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports sur la sécurité dans les transports ferroviaires de voyageurs.
Le 23 janvier 2023, à la gare de Neufchateau dans les Vosges, une jeune femme montait dans le train express régional (TER) n° 836355 de 9 h 58 en direction de Nancy. Elle était alors victime de faits totalement intolérables. À peine installée, elle subissait des menaces répétées de la part d'un homme au comportement extrêmement inquiétant, qui ne cessait de lui répéter des phrases évoquant « une mort dans la douleur ».
Elle tentait alors d'envoyer des messages au 3117 7, numéro donné par la Sncf pour que les usagers puissent signaler la commission d'une agression. Malheureusement, le réseau était nettement insuffisant (voire inexistant) et ces messages ne pouvaient être transmis. Elle ne pouvait pas non plus utiliser la fonction téléphone de son appareil car son agresseur s'arrêtait fréquemment dans un coin pour l'observer.
Ce dernier s'énervait et renouvelait alors des menaces explicites : «Tu te sens seule, tu as peur, là. Tu te caches derrière ton appareil, on va voir si je te le retire. » Il tenta alors de s'en saisir, ce que l'infortunée réussit à empêcher. Elle réussit alors à prévenir la police qui put intervenir.
Cette scène choquante n'est malheureusement pas un cas isolé dans la vie des usagers des transports ferroviaires.
Le récit de ces évènements révèle un nombre important de dysfonctionnements. En premier lieu, cette jeune femme s'était retrouvée totalement livrée à elle-même, ne pouvant envoyer de message au service dédié de la SNCF du fait de l'absence de réseau. Elle n'avait pas non plus pu compter sur l'intervention d'agents de la sureté ferroviaire ou de contrôleurs, ceux-ci n'étant pas en nombre suffisant.
En effet, force est de constater que peu de moyens sont déployés pour préserver la sécurité des usagers des services ferroviaires, notamment ceux de la ligne susmentionnée. Pourtant, en matière de sécurité, le transporteur interne de voyageurs est débiteur vis-à-vis de ces derniers d'une obligation de résultat.
Ainsi, la jurisprudence reconnait depuis de nombreuses années que la responsabilité du transporteur de voyageurs peut être engagée en cas d'agression d'un passager par un autre passager. La Cour de cassation a même estimé que « la SNCF viole son obligation de sécurité de résultat lorsqu'elle n'établissait pas que des rondes avaient été effectuées par les contrôleurs pour assurer la sécurité de voyageurs et qu'au moment des faits l'agresseur avait été contrôlé » (Cass. 1re civ., 12 déc. 2000). Les manquements à ces obligations sont flagrants. De plus, cette absence de personnel dédié au respect de la sécurité des voyageurs est d'autant plus regrettable qu'une grande partie de la zone traversée par le TER reliant Neufchâteau à Nancy est une zone dite « blanche », c'est-à-dire dépourvue de réseau téléphonique.
Ainsi, s'il est nécessaire de saluer la mise en oeuvre d'un dispositif de signalement d'un comportement dangereux par le biais d'un sms depuis le 14 décembre 2015, il est impossible de ne pas constater sa totale inefficacité lors d'évènements survenant dans ces zones blanches.
Au regard de tous ces éléments et de l'obligation de résultat de la SNCF, l'absence d'agents de la SNCF chargés d'assurer la sécurité des voyageurs interpelle et ce d'autant que des organisations syndicales réclament depuis longtemps le déploiement de personnels dédiés.
La légitime attente de sécurité des usagers des transports en commun ne pouvant s'effacer derrière des logiques strictement comptables, il lui demande de lui faire connaître les dispositions qui seront prises pour rendre cette obligation de sécurité définitivement effective.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports publiée le 25/05/2023

En complément des moyens susceptibles d'être engagés par les forces de l'ordre, la SNCF dispose, afin d'assurer la sûreté dans les trains, d'un service interne, la Sûreté ferroviaire (la « SUGE »), qui compte actuellement environ 3 000 agents opérationnels en civil et en tenue, armés, assermentés selon le code des transports et disposant de prérogatives spécifiques. Le service est implanté sur l'ensemble du réseau ferré national. Pour la sécurisation des TER, la SUGE travaille en lien avec les forces de sécurité intérieure. Afin de renforcer ses effectifs et d'assurer une meilleure couverture du réseau, la SNCF prévoit de recruter de nouveaux agents en nombre en 2023 (près de 500 postes sont à pourvoir). Des conventions ont été signées entre la SUGE et les forces de sécurité intérieure (police nationale, gendarmerie nationale, polices municipales). Ces dernières sont engagées dans une démarche de coordination et de collaboration avec l'ensemble des parties prenantes au continuum de sécurité au service de la sécurité des transports. Au-delà de ce partenariat, le ministre de l'Intérieur a récemment annoncé un renforcement des moyens dédiés à la sécurité dans les transports en commun, avec la création à venir de 77 unités dédiées à la sécurisation des transports qui seront réparties sur l'ensemble du territoire. Pour chacune d'entre elles, entre 60 et 90 policiers assureront des missions de sécurisation des gares, stations de transports en commun et réseaux de transports en commun. Ainsi, 8 nouveaux services inderdépartementaux de sécurisation des transports en commun (SISTC) viendront s'ajouter aux 3 existants. Le dispositif du 3117, déployé par la SNCF, bénéficie de moyens importants avec une double redondance : opérationnelle qui permet un soutien de la plate-forme centrale aux plates-formes délocalisées afin de permettre la prise en charge des appels en cas de pic de charge ; et technique par le centre d'appels de Lyon qui supplée le centre national de Paris. Toutefois, le dispositif du 3117 demeure tributaire de la couverture du réseau téléphonique pour que les usagers puissent appeler le numéro. Parallèlement, le ministère chargé des transports soutient les démarches entreprises par les exploitants pour mettre en oeuvre des actions de prévention et de lutte contre les violences à caractère sexuel et sexiste. L'information aux voyageurs en cas d'incident dans les transports ainsi que les gestes à suivre en situation d'agression ou de violence sont une priorité pour lutter contre ce type de comportements au quotidien. Le ministère chargé des Transports financera à cet égard une campagne de communication à hauteur d'un million d'euros pour prolonger la mobilisation tout au long de l'année 2023 dans les réseaux SNCF et RATP. Enfin, un comité d'action qui réunira les services de l'État, les autorités organisatrices, les opérateurs de transports en commun, les représentants des autres modes de transports ainsi que les associations défendant les droits des femmes dans les transports et les usagers a été créé et vient de tenir sa première réunion le 11 mai dernier.

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