Question de Mme RENAUD-GARABEDIAN Évelyne (Français établis hors de France - Les Républicains-R) publiée le 16/03/2023

Mme Évelyne Renaud-Garabedian attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la règle du non cumul des conventions de sécurité sociale en matière de retraite. La France a signé une quarantaine de conventions bilatérales de sécurité sociale permettant la prise en compte des périodes travaillées dans un de ces États pour le calcul du nombre de trimestres nécessaires pour une retraite à taux plein. Cette règle s'applique également pour les périodes travaillées au sein d'un pays de l'Union européenne, de l'Espace économique européen et en Suisse au nom des règlements communautaires. Si des périodes ont été effectuées à la fois dans un pays de l'Union européenne et dans un pays conventionné ou dans deux pays conventionnés, une seule convention sera retenue dans le calcul de la retraite française. La direction de la sécurité sociale justifie cette règle par le fait que les accords étant bilatéraux, ils ne peuvent s'appliquer qu'entre les deux pays signataires et ne peuvent inclure un pays tiers sans l'accord des différentes parties. Pourtant une jurisprudence de la cour d'appel de Caen de mars 2003 – confirmée par la Cour de cassation en septembre 2004 – indique qu'aucune règle de droit national, communautaire ou international ne s'oppose au cumul de conventions pour la comptabilisation des périodes travaillées à l'étranger. Les gouvernements successifs n'ont pas retenu l'interprétation des juges. Pour pallier le problème, ils ont signé ou renégocié des accords bilatéraux permettant que les périodes accomplies dans un État tiers puissent être retenues lorsque ce pays a également signé un accord avec les deux États signataires. C'est désormais le cas avec l'Inde, le Brésil, l'Uruguay, le Canada, le Maroc et la Tunisie. Elle souhaiterait connaître les règles de droit sur lesquelles s'appuie la direction de la sécurité sociale pour ne pas appliquer la jurisprudence susmentionnée.

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Transmise au Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion


Réponse du Ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion publiée le 18/05/2023

Les conventions bilatérales de sécurité sociale auxquelles la France est partie, tout comme les règlements européens de coordination des systèmes de sécurité sociale, définissent des champs d'application matériel, personnel et géographique propres à chacun des accords. C'est pourquoi le calcul de la retraite d'un pensionné qui aurait travaillé dans plus de deux Etats est opéré convention par convention, sauf accord avec l'Etat tiers. Ce correctif a néanmoins été apporté à l'occasion de certaines négociations récentes. Plusieurs accords bilatéraux prévoient en effet désormais explicitement une prise en compte de périodes effectuées dans un Etat tiers dès lors que la France et l'autre partie ont une convention avec cet Etat tiers : tel est le cas des conventions passées avec le Brésil, le Canada, l'Inde, le Maroc, la Tunisie et l'Uruguay. D'une part, l'ouverture de droits par totalisation de l'ensemble des périodes travaillées à l'étranger sans tenir compte des dispositions des conventions bilatérales de sécurité sociale existantes priverait d'effet ces accords et conduirait à une augmentation de la charge financière des régimes de sécurité sociale français. D'autre part, une telle totalisation n'est pas prévue en droit français. L'arrêt de la Cour d'appel de Caen de mars 2003 n'a d'ailleurs pas été confirmé par la Cour de cassation, celle-ci ayant statué uniquement sur l'appréciation régulière par la Cour d'appel de la demande de dommages et intérêts. En revanche, la Cour de cassation, par décision du 7 novembre 2019, a rappelé qu'en l'absence de "clause prévoyant la totalisation des périodes d'assurance validées en France et dans la principauté de Monaco avec celles validées dans un Etat tiers à cette convention, la cour d'appel en a exactement déduit qu'un ressortissant français qui aurait travaillé en France, à Monaco et dans un autre Etat membre de l'Union ne pourrait pas cumuler les périodes d'assurances acquises dans les trois Etats".

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