Question de M. IACOVELLI Xavier (Hauts-de-Seine - RDPI) publiée le 16/03/2023

M. Xavier Iacovelli interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice au sujet de la répartition des compétences concernant les mineurs non accompagnés (MNA).
L'évaluation de la minorité des jeunes se présentant comme MNA est aujourd'hui à la charge des départements. Il s'agit pourtant d'un sujet relevant du régalien en rapport avec les mouvements migratoires internationaux.
Les départements ont également la compétence en matière de protection de l'enfance.
En 2021, le rapport conjoint des commissions des affaires sociales et des lois préconisait une réforme de la gouvernance de cette politique. Les rapporteurs plaidaient pour le transfert à l'État de l'évaluation et de la mise à l'abri des personnes se présentant comme MNA, qui donne lieu à des dépenses indues pour les collectivités.
Cette modification impliquerait donc que cette problématique ne soit plus traitée dans le cadre du code de l'action sociale et des familles, mais dans celui du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tant que la minorité n'est pas établie.
Financièrement, cette mesure n'engendrerait pas une aggravation de la charge publique, étant entendu que l'État compense aux départements, le coût financier de la procédure d'évaluation et la mise à l'abri afférente. Si l'État reprenait à sa charge le processus d'évaluation, li n'aurait plus à en compenser le coût et cela n'induirait donc pas de dépenses supplémentaires.
De plus, les personnes se prétendant mineures non accompagnées alors qu'elles sont majeures s'engouffrent dans ces dispositifs destinés aux enfants et viennent demander protection. Ainsi, pour ce qui concerne le seul département des Hauts-de-Seine sur l'année 2022, les majeurs représentent en réalité 51,7 % de tous les MNA pris en charge.
D'autre part, lorsque les MNA se déplacent d'un département à un autre, les dossiers justifiant de leur minorité ou non, ne sont pas toujours transmis. Ils sont alors souvent dans l'obligation de se soumettre à un nouvel examen. La centralisation d'un fichier par l'État semblerait alors opportune.
À l'occasion du prochain examen du projet de loi « immigration » , il souhaiterait donc connaître sa position sur cette potentielle répartition des compétences au sujet des MNA.

- page 1820


Réponse du Ministère de la justice publiée le 03/08/2023

La loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 consacre une protection spécifique permettant à toute personne se présentant comme mineure non accompagnée (MNA) d'être mise à l'abri. En effet, il existe une présomption de minorité et d'isolement jusqu'à ce que la situation du jeune soit évaluée. Aussi, cet accueil provisoire d'urgence dédié à ce public des plus vulnérables dépend de la compétence exclusive des départements conformément à l'article L221-4-2 du code de l'action sociale et des familles. Ce dispositif repose sur le droit fondamental de l'enfant à être protégé, en application également de la convention internationale des droits de l'enfant. Toutefois, l'État vient en soutien des conseils départementaux en prenant en charge financièrement un double forfait : - un forfait dit « évaluation » pour la réalisation des entretiens en vue d'évaluer la minorité et l'isolement de la personne à hauteur de 400 euros (coût estimé des entretiens par les professionnels formés) et pour la réalisation d'une première évaluation des besoins en santé à hauteur de 100 euros ; - un forfait pour la mise à l'abri à hauteur de 90 euros par jeune par jour dans la limite de 14 jours puis de 20 euros par jeune par jour dans la limite de neuf jours complémentaires. L'amélioration de la qualité des évaluations ainsi que le déploiement du fichier d'appui à l'évaluation de la minorité (AEM), défini par le décret du 30 janvier 2019, favorisent l'identification des majeurs. En effet, ce fichier centralisé tend à éviter le nomadisme administratif en identifiant les jeunes étrangers déjà évalués par d'autres départements et le cas échéant, les tentatives d'utilisation du dispositif de protection de l'enfance par des majeurs. Ainsi, durant la mise à l'abri, la personne se présentant comme MNA est reçue en préfecture pour la collecte de ses données personnelles et empreintes digitales afin d'interroger l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF2) et VISABIO, l'équivalent français du système d'information sur les visas appelé « VIS » (Visa Information System), base de données biométriques des demandeurs de visas à l'échelle européenne. L'article 40 de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants a pour objectif de généraliser pour tous les départements le recours au fichier AEM. Les modalités d'application de cette disposition sont en cours d'élaboration et seront fixées par décret en Conseil d'État. Cette même loi prévoit d'inclure dans le calcul de la clé de répartition nationale des MNA le nombre de jeunes majeurs pris en charge par les départements afin de reconnaître leur engagement en matière de politique d'accompagnement vers l'insertion et l'autonomie des anciens MNA devenus majeurs. A cet égard, il convient de souligner que le département des Hauts-de-Seine est particulièrement engagé dans la continuité des parcours et la poursuite de l'accompagnement des MNA devenus majeurs. Ainsi, 625 jeunes majeurs étaient suivis par les services du conseil départemental au 31 décembre 2022.

- page 4789

Page mise à jour le