Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 13/04/2023

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les impacts du changement climatique sur la production fruitière française.
D'ici 2030, les températures moyennes pourraient augmenter de 1,5° C, tandis que le nombre de vagues de chaleur pourrait être multiplié par quatre et les sécheresses s'avérer deux fois plus fréquentes.
Dans ce contexte, la fédération nationale des producteurs de fruits a mandaté AXA Climate pour évaluer les impacts du changement climatique sur seize cultures fruitières en France (pommes, poires, pêches, nectarines, abricots, cerises, prunes, noix, noisettes, amandes, framboises, myrtilles, cassis, groseilles, kiwis et raisins de table), dans vingt-cinq départements représentant 76 % des surfaces de production.
Les résultats indiquent que le cycle de croissance des fruits connaîtra un stress thermique chronique. En 2030, 45 % des zones de productions étudiées seront considérées comme à risque extrême ou élevé, principalement à cause des vagues de chaleur et du gel, contre seulement 22 % aujourd'hui. 86 % des départements étudiés subiront toujours des températures négatives en mars et 17 % en avril. Quant aux sécheresses et coups de chaleur de l'été, ils vont accroître le risque de grillures. Les abricots pourraient être les plus touchés, à hauteur de 60 %.
En conséquence, il lui demande comment accompagner au mieux les producteurs de fruits, afin qu'ils puissent mesurer précisément les risques et anticiper les nécessaires dispositifs d'adaptation au changement climatique.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 24/08/2023

L'accompagnement des producteurs de fruits s'inscrit pleinement dans la stratégie française d'adaptation au changement climatique, élaborée dès 2006 dans le cadre d'une large concertation menée par l'observatoire national sur les effets du réchauffement climatique et actualisée depuis lors. Cette stratégie s'est déclinée dans le plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC) dès 2011. Suite à la COP 21, le PNACC a été actualisé en 2017 en cohérence avec l'Accord de Paris. Cette deuxième version (PNACC-2) vise une adaptation effective dès le milieu du XXIe siècle à un climat régional en métropole et dans les outre-mer cohérent avec une hausse de température de + 1,5 à 2 °C au niveau mondial par rapport au XIXe siècle. Sur son volet agricole, au sein du domaine d'action « Filières économiques », le PNACC-2 repose sur la transition agro-écologique et une bioéconomie plus résiliente, et plus largement sur un développement des connaissances, ainsi qu'une évolution des politiques publiques pour accompagner la transition et développer une agriculture respectueuse de la biodiversité, des paysages et des sols, multi-performante et plus économe en eau. Le PNACC est en cours de révision et s'inscrit désormais dans le cadre de la planification écologique de la France, dont le Président de la République a confié la coordination à la Première ministre. Cette planification aborde une vingtaine de chantiers portant sur toutes les thématiques de la transition écologique ayant un impact direct sur la vie des français pour demain (à l'horizon 2030 et 2050), dont les thématiques « mieux protéger et valoriser nos écosystèmes », « mieux se nourrir », « mieux produire » et « mieux consommer ». Cette planification écologique permet de fixer les grandes orientations de la future stratégie française sur l'énergie et le climat tout au long de sa construction. Cette dernière regroupera la première loi de programmation sur l'énergie et le climat et les programmes stratégiques en matière d'énergie et de climat qui seront adoptés à son issue, dont le PNACC-3. L'adaptation au changement climatique est également inscrite formellement au titre des chantiers prioritaires du Gouvernement. Sur le volet agricole, ces enjeux d'adaptation se sont pleinement concrétisés par les travaux du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique (qui se sont déroulés de mai 2021 à février 2022) au travers de 24 actions à mettre en oeuvre collectivement. Plusieurs de ces actions concernent l'échelon territorial en lien avec l'irrigation et les spécificités locales. Les filières agricoles se sont toutes engagées, à travers la signature d'une charte, à décliner des plans d'actions à conduire d'ici 2025 afin d'adapter l'ensemble des exploitations et les entreprises et d'impliquer autant que possible les acteurs des territoires. Sept filières agricoles ont d'ores et déjà finalisé leur stratégie, dont la filière fruits et légumes, au travers de ses deux interprofessions, l'interprofession des fruits et légumes frais (INTERFEL) et l'interprofession des fruits et légumes transformés (ANIFELT). Il est également prévu de revoir les plans d'adaptation au changement climatique des bassins, sous l'autorité des préfets, pilotes des comités de bassin, et de les articuler avec les plans régionaux d'adaptation au changement climatique agricole impulsés par les chambres régionales d'agriculture (CRA). Une délégation interministérielle en charge du suivi des conclusions du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique est opérationnelle depuis septembre 2022. Elle a vocation à garantir la continuité de la dynamique du Varenne de l'eau, de coordonner et promouvoir l'action des services de l'État en faveur de l'adaptation des filières agricoles au changement climatique et d'une politique publique de l'eau en agriculture tout en veillant à associer l'ensemble des autres parties prenantes. Plusieurs dispositifs sont déployés et permettent d'accompagner financièrement les exploitations agricoles. C'est notamment le cas du dispositif d'aide aux agriculteurs, géré par FranceAgriMer, pour le financement d'outils d'aide à la décision en matière d'irrigation et de lutte contre la sécheresse. Un premier guichet doté de 20 millions d'euros (Meuros) a été ouvert en avril 2022 et un quatrième guichet en février 2023. Au sein du plan d'investissement France 2030, l'appel à manifestation d'intérêt « Démonstrateurs territoriaux des transitions agricoles et alimentaires », doté de 152 Meuros sur 5 ans, s'inscrit également dans cet objectif. Il est destiné à des acteurs de territoire portant des projets d'innovation tant technologiques qu'organisationnelles, dont la troisième et dernière relève a été fixée au 28 septembre 2023. Par ailleurs, les enjeux d'adaptation au changement climatique et de planification écologique font l'objet d'un travail spécifique du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire concernant les filières fruits et légumes, au travers du plan de souveraineté en fruits et légumes, annoncé lors du salon international de l'agriculture le 1er mars 2023. Ce plan, qui a fait l'objet d'un soutien unanime des professionnels, comporte quatre axes stratégiques (protection des cultures ; compétitivité ; recherche, expérimentation et formation ; communication et dynamisation de la consommation), qui traitent notamment de l'adaptation au changement climatique de la production fruitière au moyen d'actions concrètes (investissements dans des matériels de protection, diagnostics par bassin de production, recherche-expérimentation sur les variétés et la réduction des intrants, formation à l'adaptation…). Par ailleurs, les travaux relatifs au pacte et à la loi d'orientation et d'avenir agricoles, lancés par le ministre chargé de l'agriculture le 7 décembre 2022, en étroite concertation avec les régions et le monde agricole, s'articulent autour de quatre axes dont la transition et l'adaptation, en particulier face au changement climatique. La concertation s'est poursuivie tout au long du premier semestre 2023. Si elle est pilotée au niveau national par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, qui associe Régions de France, elle est réalisée en associant le niveau régional, aussi bien au travers des services de l'État que des régions et des CRA. Cette concertation aboutit prochainement à la rédaction d'un pacte et d'une loi d'orientation et d'avenir pour l'agriculture, qui déterminera le cap à suivre et les outils opérationnels à déployer.

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