Question de Mme CONWAY-MOURET Hélène (Français établis hors de France - SER) publiée le 20/04/2023

Mme Hélène Conway-Mouret attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les difficultés persistantes entourant les demandes de visa pour la France, en Afrique du Nord et subsaharienne.
Au Cameroun plus particulièrement, la situation ne cesse de s'aggraver. Le chiffre suivant est édifiant : seules 50 places sont proposées, pour 500 demandes par jour. Afin d'apurer les retards, le poste diplomatique a sollicité des renforts auprès du ministère et fait le choix de passer par un prestataire externe chargé de la gestion des prises de rendez-vous. Or, de nombreuses personnes ne parviennent pas à joindre le numéro de téléphone dédié. À Yaoundé, des officines privées continuent à bloquer des créneaux et à les revendre à des tarifs exorbitants à des personnes qui, pour des raisons professionnelles, familiales ou médicales, doivent impérativement se rendre en France. Il apparaît donc que les mesures prises par le ministère en matière de lutte contre la revente de rendez-vous par des intermédiaires extérieurs, annoncées en décembre 2022, n'ont pas les effets escomptés. Elle-même ainsi que les conseillers des Français de l'étranger de la circonscription sont encore régulièrement saisis de cas de compatriotes binationaux ou français dont le conjoint camerounais ne parvient pas à obtenir de rendez-vous pour un visa de court séjour.
Au Maroc, en dépit de la normalisation de notre politique des visas décidée en fin d'année, les mesures de rétorsion que la France avait adoptées ont laissé des stigmates, peut-être indélébiles, puisque l'institut français de Tanger a d'ores-et-déjà observé une baisse de 30 % du nombre d'apprenants.
Au-delà de la nécessaire et urgente augmentation des effectifs chargés des visas au sein de nos consulats, il serait souhaitable d'accroître la dématérialisation des procédures et d'inverser le processus. Il s'agirait de permettre, a minima pour les demandes de visa de court séjour, le dépôt du dossier par voie électronique, puis de consacrer l'entretien avec un agent à l'observation des originaux et à la vérification de la conformité des pièces.
Elle lui demande donc si cette solution, qui permettrait à la fois d'alléger la charge de travail des personnels, de limiter les délais d'attente des demandeurs et de réduire les opportunités des officines privées, pourrait être envisagée.

- page 2559


Réponse du Ministère auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger publiée le 17/05/2023

Réponse apportée en séance publique le 16/05/2023

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteure de la question n° 628, adressée à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le ministre, en octobre dernier, je vous interrogeais déjà sur les conséquences délétères pour les relations franco-africaines de la réduction massive des visas alloués aux ressortissants du Maghreb.

En dépit de l'annonce de la normalisation de notre politique des visas décidée en fin d'année, les mesures de rétorsion que la France avait adoptées ont laissé des stigmates. La situation ne semble toujours pas stabilisée.

Un exemple : la baisse de 30 % du nombre d'apprenants à l'Institut français de Tanger illustre la lente dégradation de nos liens d'amitié et le profond ressentiment de familles pourtant francophones et francophiles qui préfèrent, pour certaines d'entre elles, se tourner vers d'autres pays qui leur octroient sans difficulté un visa Schengen.

Six mois se sont écoulés et c'est d'un autre pays que je voudrais vous parler, qui va servir d'exemple concret - je pourrais malheureusement en citer beaucoup d'autres. Il s'agit du Cameroun, où les difficultés entourant les demandes de visa pour la France ne cessent de s'aggraver.

Elles commencent par l'impossibilité d'obtenir un rendez-vous, puisque seules 50 places sont proposées pour environ 500 demandes par jour. Afin d'apurer les retards, le poste a sollicité des renforts et fait le choix de passer par un prestataire pour la gestion des prises de rendez-vous dont le numéro de téléphone dédié semble injoignable...

À Yaoundé, des officines privées continuent de bloquer des créneaux, qu'elles revendent à des tarifs exorbitants à des personnes qui doivent impérativement se rendre en France pour des raisons professionnelles, familiales ou médicales.

Il semble donc que les mesures annoncées par votre ministère en décembre dernier n'aient pas les effets escomptés. Tout comme les conseillers des Français de l'étranger de la circonscription, je suis régulièrement saisie par des compatriotes dont le conjoint ou la conjointe ne parvient pas à obtenir de rendez-vous pour un visa de court séjour en France.

Monsieur le ministre, je vous alerte régulièrement sur le besoin urgent de renforcer les équipes consulaires, afin d'alléger la surcharge de travail des agents que je constate à chacun de mes déplacements.

Je voudrais vous faire une proposition : ne serait-il pas envisageable de permettre, a minima pour les demandes de visa de court séjour, le dépôt du dossier par voie électronique, puis de consacrer l'entretien avec un agent à l'observation des originaux et à la vérification de la conformité des pièces ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice Conway-Mouret, vous avez raison de pointer la situation d'engorgement de certains services des visas. Nous la suivons avec la plus grande attention et cherchons à l'améliorer.

Ses causes sont multiples : à la hausse des demandes consécutive à la sortie de la crise sanitaire, notamment pour les longs séjours, s'ajoutent l'exigence accrue en matière de lutte contre la fraude, demandée par le ministère de l'intérieur, mais aussi l'intervention des officines que vous évoquez dans certains pays.

Le ministère se mobilise contre ce dernier phénomène en communiquant auprès du public et par la mise en place d'obstacles techniques à cette captation en masse de rendez-vous - la limite étant que ces officines ne sont pas illégales dans les pays concernés.

Enfin, je ne méconnais pas les enjeux d'organisation et de fonctionnement de notre réseau consulaire. La ministre de l'Europe et des affaires étrangères et le ministre de l'intérieur ont confié une mission d'expertise à Paul Hermelin, assisté des corps d'inspection des deux ministères. Son rapport vient d'être remis et des conclusions en seront rapidement tirées.

Mon ministère déploie des personnels temporaires pour réduire au mieux les délais. Il s'agit également de prioriser les publics cibles de notre politique d'influence.

L'externalisation de la collecte des dossiers de demande est en place dans quarante-six pays, dont le Maroc ; elle sera en vigueur au Cameroun dès l'automne prochain.

En récupérant en amont les données biométriques et en assurant que le public soit correctement informé et accueilli, la procédure d'externalisation permet aux agents consulaires de se concentrer sur leur tâche régalienne d'instruction des demandes.

En ce qui concerne la dématérialisation des procédures, France-Visas, l'un des cinquante projets stratégiques de l'État dans le domaine des systèmes d'information, tend précisément à moderniser la gestion des demandes de visas tout en renforçant sa sécurité.

Ce projet doit permettre à l'usager, comme vous l'appelez de vos voeux, une transmission dématérialisée du dossier. Cette possibilité, déjà accessible pour les demandes de visa pour études, sera progressivement étendue.

Enfin, l'adoption prochaine d'un règlement européen sur la numérisation des visas permettra au traitement des demandes de court séjour de franchir une nouvelle étape vers la dématérialisation.

- page 4234

Page mise à jour le