Question de M. BRISSON Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) publiée le 11/05/2023

M. Max Brisson appelle l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, à propos des mesures complémentaires de nature à réduire l'incidence des activités de pêche dans le golfe de Gascogne à la suite de la décision du Conseil d'État du 20 mars 2023.

Les tempêtes qui se sont récemment abattues sur les pêcheurs français sont nombreuses. En effet, si le Brexit a généré de grandes difficultés quant à l'obtention des licences d'exploitation affectées aux professionnels de la mer, la crise sanitaire a quant à elle particulièrement frappé les gens de mer. S'ajoute à ces conjoncture la dépendance aux produits pétroliers qui affecte fortement le domaine de la pêche dans le contexte inflationniste actuel.

Par ailleurs, le plan d'action pour « la protection et la restauration des écosystèmes marins en faveur d'une pêche durable et résiliente », présenté par la Commission européenne le 21 février 2023, dessine un avenir encore plus contraignant pour les professionnels de la pêche avec notamment l'interdiction progressive du chalutage de fond dans toutes les aires marines protégées entre 2024 et 2030.

C'est dans ce contexte particulièrement défavorable à la pêche française que le Conseil d'État à travers sa décision du 20 mars 2023 enjoint l'État d'adopter « des mesures complémentaires de nature à réduire l'incidence des activités de pêche dans le golfe de Gascogne sur la mortalité accidentelle des petits cétacés [...] de fermeture spatiales et temporelles de la pêche appropriées. »

La demande formulée au Conseil d'État est d'enjoindre l'État à une interdiction de la pêche au chalut pélagique, au chalut à grande et très grande ouverture verticale et au filet maillant quatre mois par an. De telles mesures affecteront directement 500 navires et près de 3 000 marins et leurs familles. Les marins concernés estiment à près de 50 % les pertes engendrées sur leur chiffre d'affaires par une interdiction de cette ampleur. Cette décision est donc une menace durable pour l'emploi dans le secteur de la pêche.

Les restrictions spatio-temporelles fragiliseront durablement le modèle de la pêche française en augmentant significativement la part des indemnités et subventions dans le chiffre d'affaires des marins-pêcheurs. La défense de la filière pêche induit d'envoyer le signal aux jeunes qu'il est encore possible de vivre du métier de pécheur. Le déclin du secteur agricole en France devrait inciter l'État à ne pas reproduire les mêmes erreurs. Sous le poids des contraintes et des normes, le nombre d'agriculteurs a été divisé par 4 en 40 ans.

Premiers protecteurs des ressources maritimes, les pêcheurs équipent progressivement leur matériel de répulsifs acoustiques qui ont prouvé leur efficacité. L'observatoire Pélagis note que l'équipement de chalutiers pélagiques en répulsifs acoustiques a permis une baisse des captures accidentelles, de près de 65 %. Par conséquent, il semblerait bénéfique que le secrétariat d'État chargé de la mer accompagne ces résultats de toute la pédagogie et la communication nécessaires face à la stigmatisation croissante de la profession de pêcheur.

Il s'agirait en outre d'une erreur considérable au regard de la balance commerciale de notre pays. En effet, la réduction du volume de poissons, crustacés, mollusques et autres animaux aquatiques pêchés engendrera des importations supplémentaires alors que la France importe déjà plus des deux tiers de poissons qu'elle consomme.

Aussi, pour répondre à la détresse et colère des marins concernés par pareilles décisions, il l'interroge à propos de la position du Gouvernement sur la décision rendue par le Conseil d'État et sur les mesures que celui-ci envisage pour défendre la pêche française.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer publiée le 08/06/2023

Des échouages importants de petits cétacés sont observés en hiver depuis 2016 sur la côte atlantique avec une prise de conscience publique et politique de la problématique. Un groupe de travail a été créé en 2017 afin d'améliorer les connaissances et prendre des mesures concertées avec l'ensemble des acteurs pour réduire significativement les mortalités de dauphins communs en mer. Le 15 juillet 2022, la Commission européenne a jugé insuffisantes les mesures mises en place par la France pour la conservation du dauphin commun. Un plan d'urgence a ainsi été décidé par le Gouvernement en septembre 2022. C'est la première fois qu'un plan de ce type est mis en place avec d'importants financements publics, à hauteur de 17,8 millions d'euros. Ce plan vise à tester des solutions techniques à grande échelle et l'amélioration des connaissances sur la population de dauphins et leurs interactions avec les engins de pêche. Ainsi, dès 2023, une liste des fileyeurs les plus actifs dans le Golfe de Gascogne, 213 navires, a été définie par arrêté ministériel afin de participer à une expérimentation à grande échelle de solutions techniques. Trois dispositifs ont été identifiés à la suite de premiers résultats expérimentaux encourageants, menés avec les scientifiques et les pêcheurs. Le premier, le pinger « répulsif », est fixé à la coque du navire, et émet seulement lors de la mise à l'eau du filet. Le deuxième, une balise acoustique « informative » est fixée sur les filets. Le troisième, des réflecteurs acoustiques sur les filets droits permettent d'augmenter la visibilité des filets pour les dauphins. Un protocole scientifique doit permettre d'évaluer l'efficacité de ces solutions. Un bilan des mesures est prévu au deuxième semestre 2024, en s'appuyant notamment sur les travaux du programme scientifique DELMOGES, porté par l'Ifremer et l'Université la Rochelle-CNRS. Dans sa décision du lundi 20 mars 2023, le Conseil d'État demande à ce que l'État prenne tous les dispositions pour garantir l'efficacité du plan d'action. Ce jugement implique une nouvelle concertation avec tous les acteurs, les professionnels de la pêche et les scientifiques, avec trois objectifs : réduire les captures accidentelles de cétacés, ne pas déstabiliser la filière pêche et renforcer l'acquisition de connaissances scientifiques sur les cétacés.

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