Question de M. SAURY Hugues (Loiret - Les Républicains) publiée le 18/05/2023

M. Hugues Saury attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les règles d'éligibilité des directeurs de groupements d'intérêt public (GIP) dans le cadre d'élections municipales. Aux termes de l'article L. 231 du code électoral « Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois (...) les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental (...) ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président, du président de l'assemblée ou du président du conseil exécutif ». Ainsi, ces dispositions semblent faire obstacle à l'élection dans un conseil municipal de toute personne exerçant les fonctions de direction au sein des conseils régionaux, des conseils départementaux, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), mais également de leurs établissements publics créés à la demande des collectivités, tel un GIP, dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois.
En outre, il souhaite savoir si la notion de délégation de signature du président concerne uniquement les personnes exerçant au sein d'un cabinet et non les fonctions de direction des services d'administration. Par conséquent, il lui demande de préciser les limites du cadre d'éligibilité du directeur d'un GIP d'une région donnée en tant qu'élu municipal dans des communes de cette même région.

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Réponse du Ministère de l'intérieur et des outre-mer publiée le 28/12/2023

L'article L. 231 du Code électoral dispose que "ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois : […] 8°. Les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental, de la collectivité de Corse, de la collectivité de Guyane ou de Martinique, d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président, du président de l'assemblée ou du président du conseil exécutif ". Un groupement d'intérêt public (GIP) est au sens de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, une personne morale de droit public dotée de l'autonomie administrative et financière. Il est constitué par convention approuvée par l'État soit entre plusieurs personnes morales de droit public, soit entre l'une ou plusieurs d'entre elles et une ou plusieurs personnes morales de droit privé quel qu'en soit le domaine et les fins opérationnelles, pour une durée adaptée à ces activités. Si les GIP sont des personnes morales de droit public, ils sont soumis à un régime spécifique, distinct de celui des établissements publics (T.C. 14 février 2000 "GIP Habitat et Interventions Sociales pour les Mal-logés et les Sans-abris c/ Mme Verdier", n° 03170 ; solution non remise en cause par le chapitre II de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration du droit, dite "loi Warsmann", dès lors que les caractéristiques du régime juridique issues de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 qui ont fondé cette décision du Tribunal des Conflits ont été reprises dans la loi Warsmann), notamment en termes de contrôle exercé par d'autres collectivités publiques. Par ailleurs, les collectivités territoriales, notamment les communes, en leur qualité de personnes morales de droit public, peuvent participer à des groupements d'intérêt public, dans le cadre de l'exercice de leurs compétences. Toutefois, l'article 98 de la loi n° 2011-525 prévoit que les collectivités territoriales : "ne peuvent pas constituer entre eux des groupements d'intérêt public pour exercer ensemble des activités qui peuvent être confiées à l'un des organismes publics de coopération prévus à la cinquième partie du code général des collectivités territoriales (CGCT)." Ces organismes correspondent aux établissements publics de coopération intercommunale, aux syndicats mixtes ouverts et aux différentes modalités de coopération interdépartementale et interrégionale prévues aux articles L. 5411-1 à L. 5622-4 du CGCT. Les collectivités territoriales n'exercent donc en principe pas de contrôle exclusif sur les GIP. La seule exception concerne la gestion des programmes opérationnels interrégionaux des fonds européens, qui peut être confiée à des GIP constitués entre plusieurs régions (1° du I de l'article 78 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles). Le directeur d'un GIP n'exerce donc pas en principe de fonctions équivalentes à celles citée au 8° de l'article L. 231 du Code électoral, puisque les groupements d'intérêt public ne sont pas placés sous le contrôle exclusif d'une collectivité territoriale et qu'ils sont soumis à un régime distinct de celui des établissement publics. Dans un cas proche, il a déjà été jugé que celui qui exerce les fonctions de directeur général d'une association départementale de développement, créée à l'initiative du conseil départemental est éligible dès lors que les instances ne sont pas statutairement composées en majorité de membres du conseil départemental siégeant en cette qualité, que son financement n'est pas assuré par les seules subventions du département et qui malgré son objet exerce ses missions en lien avec les organismes consulaires et les entreprises privées (CE, 19 juin 1996, n° 173499). Sous réserve de l'appréciation souveraine du juge, un directeur de GIP doit donc être considéré comme éligible. En second lieu, s'agissant du champ d'application du critère de délégation de signature du président au sens du 8° de l'article L. 231 précité, des précisions sont apportées par le rapport du député Pascal Popelin fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République sur le projet de loi (N° 878), modifié par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral. Il est ainsi précisé au sujet de la modification du 8° de l'article L. 231 du Code électoral qui a abouti à sa version actuelle que : « en deuxième lecture, votre Commission a atténué les effets de cette extension en prévoyant que seul l'exercice, au sein du cabinet d'un président d'une collectivité territoriale ou d'un EPCI, d'une fonction de direction (directeur de cabinet, directeur-adjoint de cabinet, chef de cabinet) et d'un pouvoir d'engager la personne publique, qui se matérialise par l'existence d'une délégation de signature du responsable exécutif, justifie qu'une personne ne puisse se présenter aux élections municipales dans le ressort de la collectivité qui l'emploie. ». La condition de délégation de signature est donc applicable aux seuls membres de cabinets mentionnés par l'article L. 231 précité.

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