Question de Mme DOINEAU Élisabeth (Mayenne - UC) publiée le 18/05/2023

Mme Élisabeth Doineau attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les soignants oubliés des accords du Ségur de la santé.
Son prédécesseur affirmait en juillet 2020 : « Tout le monde est concerné par le Ségur de la santé, que vous soyez secrétaire médicale, ambulancier, médecin, brancardier, infirmier, aide-soignant, sage-femme. Le Ségur de la santé est une réforme importante, la plus importante des 40 dernières années, c'est une réforme historique » précisait-il.
Historique, elle l'était pour un bon nombre d'entre eux. Les augmentations de salaire ont été constatées, allant de 180 euros net par mois à plus de 500 euros pour certains.
Pour autant, les accords Ségur ont été incomplets et insuffisants. Paradoxalement, ils ont déclenché une profonde déception, voire une réelle frustration pour une partie du personnel soignant.
A priori, 60 000 personnes n'ont jamais profité d'aucune revalorisation.
Un sentiment d'injustice règne en particulier chez les soignants en catégorie active placés dans un corps en voie d'extinction. Ils n'ont bénéficié d'aucune revalorisation, le Ségur les a oubliés. Ils l'ont prévenu de leur situation et l'ont interpellé sur leur condition d'oubliés. En octobre 2021, aucun des 4 décrets promulgués ne recouvraient les soignants en catégorie active placés dans un corps en voie d'extinction. Il avait pourtant été convenu, entre le ministre et les organisations syndicales, que ces soignants seraient revalorisés à hauteur de leurs homologues de catégorie sédentaire.
Des collectifs se sont mobilisés pour en informer le ministre de la santé, une lettre écrite lui a été adressée mais aucune suite n'y a été donnée. Deux recours au Conseil d'État, l'un pour les soignants de catégorie A, l'autre pour les soignants en catégorie B, ont été rejetés au motif que les accords du Ségur étaient un « exposé d'intentions » sans valeur juridique contraignante. Les écarts de salaire sont désormais considérables entre deux soignants ayant le même diplôme et exerçant la même profession, avec les mêmes responsabilités. Une légitime indignation et un sentiment de mépris règnent chez ces soignants.
Nous avons chanté les louanges des soignants durant la covid. Ils étaient nos héros, tous sans distinction.
Alors elle lui demande quand compte-t-il proposer une revalorisation juste des soignants en catégorie active placés dans un corps en voie d'extinction.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 07/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 06/06/2023

à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Élisabeth Doineau. Madame la ministre, permettez-moi de me faire aujourd'hui la porte-parole d'un corps en voie d'extinction, les soignants classés dans la catégorie active.

Historiquement, tous les professionnels de santé de la fonction publique hospitalière relevaient de cette catégorie. Or il se trouve que, à partir de 2010 et du protocole Bachelot, les soignants ont dû choisir entre la catégorie active et la catégorie sédentaire.

Évidemment, de moins en moins de professionnels sont régis par ce statut, dans la mesure où les personnels recrutés aujourd'hui ne le sont plus du tout sous cette forme.

Lors du Ségur de la santé qui s'est déroulé en 2020, Olivier Véran a promis - je tiens à le rappeler aux uns et aux autres - que tous les soignants à l'hôpital, des ambulanciers aux secrétaires médicales, bénéficieraient d'une revalorisation salariale.

Tout cela est très bien et, sur le moment, tout le monde a été très satisfait. On peut même dire aujourd'hui que cette mesure a marqué une vraie avancée sur le plan des rémunérations.

Pour autant, on n'a pas cessé de parler des oubliés du Ségur et, finalement, c'est cette injustice qui restera. Encore aujourd'hui, en effet, les soignants en catégorie active sont victimes d'une injustice puisque, alors qu'ils ont les mêmes diplômes, qu'ils exercent la même profession, et qu'ils font preuve du même engagement et de la même responsabilité que les autres, ils ne bénéficient toujours pas de la même revalorisation salariale.

Madame la ministre, il est grand temps de régler le problème des oubliés du Ségur. J'attends beaucoup de la réponse que vous allez apporter à ce sujet.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, le volet relatif aux ressources humaines du Ségur de la santé a conduit à la revalorisation des grilles indiciaires de l'ensemble des personnels paramédicaux de la fonction publique hospitalière. C'est inédit et historique.

Comme l'ensemble des agents de la fonction publique hospitalière exerçant au sein des établissements sanitaires, des services sociaux et médico-sociaux rattachés à un établissement sanitaire ou à un Ehpad, les personnels en catégorie active relevant des corps placés en voie d'extinction bénéficient du complément de traitement indiciaire (CTI) de 183 euros net par mois. Cette prime s'élève même à près de 189 euros net depuis la revalorisation du point d'indice intervenue le 1er juillet 2022.

Les écarts constatés au sommet des grilles entre les populations en catégorie active et celles en catégorie sédentaire s'expliquent essentiellement par des perspectives de carrière différentes, qui sont inhérentes à la composition de ces cohortes.

Les agents relevant des corps de la catégorie active sont très majoritairement en fin de carrière et se trouvent sur les échelons les plus élevés de leur grille indiciaire.

Par contraste, les personnels relevant des corps de la catégorie sédentaire sont majoritairement en début de carrière : ils sont donc peu nombreux à bénéficier des échelons élevés de leur grille indiciaire. Les sommets de grilles, qui atteignent désormais des niveaux élevés en catégorie A « sédentaire », leur seront accessibles après plusieurs années.

Enfin, les établissements ouvrent aussi des concours réservés aux personnels de la catégorie B « active » qui le souhaitent, afin qu'ils intègrent leur corps analogue de catégorie A, lequel propose ces perspectives de carrière renforcées.

Mme le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour la réplique.

Mme Élisabeth Doineau. J'entends bien la distinction que vous faites entre le début et la fin de carrière de ces agents. Cependant, quelle que soit leur évolution professionnelle, ils ressentent cette différence comme une vraie injustice. Rappelez-vous que nous les avons tous applaudis durant la crise sanitaire...

Madame la ministre, réunissez-les autour d'une table pour discuter ensemble de la question si vous y tenez, mais faites quelque chose !

Cessons de leur donner le sentiment qu'ils sont discriminés et qu'ils doivent se regarder comme une catégorie à part. Il faut aller à leur rencontre, leur expliquer les choses et réfléchir à la meilleure manière d'atteindre une véritable équité. C'est une nécessité si l'on veut que le Ségur de la santé soit considéré comme réellement positif.

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