Question de Mme DUMONT Françoise (Var - Les Républicains) publiée le 28/09/2023

Mme Françoise Dumont attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la mise en péril de la vocation agricole de biens ruraux varois, dans le cadre de certaines réalisations de baux emphytéotiques.

Le droit de préemption (prévu par les dispositions de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, qui met en place l'institution d'un droit de préemption au profit des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural - SAFER) permet aux SAFER de mener une action cohérente dans le cadre de leur mission, puisqu'elles sont systématiquement informées des projets de vente de biens ruraux et qu'elles peuvent acheter prioritairement le bien, en lieu et place de l'acquéreur initial.

Dans ce contexte, de nombreuses conventions ont été nouées entre communes, établissements publics de coopération intercommunale et SAFER afin d'éviter la surenchère du prix des terrains agricoles.

Ces partenariats visent également à préserver la vocation agricole de ces mêmes terrains. L'intervention quasi-systématique de la SAFER limite la vente de biens agricoles à des personnes non-agricultrices et freine en conséquence le phénomène de « cabanisation ».

Toutefois, le droit de préemption ne s'applique qu'en cas d'aliénation, à titre onéreux, de biens immobiliers ou de terrains nus à vocation agricole.

Ce droit n'est donc pas opposable à la conclusion de baux emphytéotiques.

Or, plusieurs communes rurales varoises constatent la signature de baux emphytéotiques de longue durée (99 ans) au bénéfice de personnes qui ne sont pas des agriculteurs et qui utilisent ces terrains à des fins éloignées de leur but agricole initial, comme pour la réalisation des sites de campements pour les gens du voyage, de cabanisation ou encore de caravaning.
Dans ces situations, la SAFER n'est pas informée de ces transactions et ne peut donc pas intervenir ; le bien est donc (temporairement) perdu pour l'agriculture.

Aussi, elle lui demande donc ce que le Gouvernement entend faire pour faire respecter la vocation agricole des biens ruraux, en France, dans le cadre de réalisations de baux emphytéotiques, au même titre que dans le cadre de la vente de bien immobiliers ou de terrains nus à vocation agricole (cette dernière permettant un droit à préemption de la SAFER).

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 26/10/2023

Les installations et constructions illicites en zone naturelle ou agricole, aussi désignées sous le vocable de « cabanisation », constituent un phénomène complexe qui revêt des contours extrêmement variés, de l'habitat léger de loisirs à l'extension illégale de constructions existantes en passant par des problématiques d'habitat précaire. L'exercice par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de leur droit de préemption au titre des articles L. 143-1 et suivants et R. 143-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, leur permet d'acquérir en priorité un bien agricole ou rural pour le rétrocéder, sous cahier des charges annexé à l'acte de vente, à un agriculteur présentant toutes les garanties en matière de maintien de l'usage agricole du bien à l'avenir. Pour autant, le droit de préemption n'est susceptible de s'exercer qu'à réception de la déclaration d'intention d'aliéner s'appliquant à des mutations à titre onéreux des biens, et non en cas de passation d'un bail, quelle que soit sa nature, et notamment un bail emphytéotique. Il est difficile d'exciper a priori du caractère frauduleux d'un bail emphytéotique. Le juge rappelle cependant que si ce bail prévoit un transfert du droit réel de propriété à la fin du contrat, ce dernier sera, lui, soumis au droit de préemption. Il appartient donc au notaire, chargé d'établir le bail, de déterminer si ce dernier est soumis au droit de préemption, selon l'effectivité du transfert de la propriété à la date d'expiration du bail. À cet égard, il est recommandé à l'ensemble de la profession, représentée par le conseil supérieur du notariat, la plus grande vigilance. Par ailleurs, la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, a ouvert des moyens nouveaux à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, bien souvent le maire, afin de dispositif pénal et de permettre une action rapide pour traiter les infractions en matière d'urbanisme. C'est ainsi que les articles L. 481-1 à L. 481-3 du code de l'urbanisme prévoient un mécanisme de mise en demeure de régulariser sous astreinte les constructions, travaux et installations réalisés en infraction au code de l'urbanisme. Concrètement, une fois le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme dressé, l'autorité compétente a la faculté de mettre en demeure l'auteur de cette infraction de procéder aux travaux nécessaires à la mise en conformité de sa construction ou de déposer une demande d'autorisation visant à les régulariser a posteriori. Cette mise en demeure peut être assortie d'une astreinte d'un montant de 500 euros maximum par jour de retard dont le produit revient à la collectivité compétente en matière d'urbanisme. Il s'agit donc là d'un moyen supplémentaire mis à disposition des collectivités pour traiter les installations et constructions illégales.

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