Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - Les Républicains-A) publiée le 05/10/2023

Mme Agnès Canayer attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique à propos de l'injonction de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur les camemberts qui ne sont pas d'appellation d'origine protégée (AOP) fabriqués localement.

Le volume de camemberts non-AOP représente 70 % de la production française en Normandie ; ils emploient plus de 1 000 salariés et s'attachent à utiliser du lait auprès de 1 800 producteurs normands. Cependant, le 9 juillet 2021, la DGCCRF a émis un avis relatif à la protection de l'AOP « camembert de Normandie », interdisant toute mise en exergue de la mention « fabriqué en Normandie » sur un fromage ne répondant pas au cahier des charges de l'AOP, répondant ainsi aux attentes de certains producteurs AOP dénonçant cette mention, en ce qu'elle entraînerait une confusion avec l'AOP « camembert de Normandie ».

Malgré un recours pendant devant le Conseil d'État contre cet avis, plusieurs directions départementales de protection des populations vont au-delà de l'avis, interdisant aux producteurs non-AOP toute référence, directe ou indirecte, à la Normandie sur leur emballage.

Cette interdiction générale et absolue a des conséquences graves pour toute une région où le camembert non-AOP est produit et pour les producteurs de lait avec lesquels les fabricants de camembert travaillent quotidiennement. Elle va à l'encontre de l'attente des consommateurs qui privilégient le local et nuit aussi à l'exportation, dès lors que de nombreux pays interdisent le lait cru sur leur territoire et n'importent que du camembert non-AOP.

Enfin, alors les lois n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous et n° 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs visent à permettre une meilleure revalorisation de la rémunération des producteurs, cette position risque de produire l'effet inverse.

C'est pourquoi elle lui demande de bien vouloir clarifier cette situation et de suspendre cette procédure, dans la mesure où la position actuelle de la DGCCRF va au-delà des exigences du droit européen et considérant les graves conséquences évoquées pour les producteurs normands.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 11/04/2024

Depuis la reconnaissance de l'appellation d'origine protégée (AOP) « Camembert de Normandie », de nombreux camemberts, dont certains sont fabriqués dans des établissements implantés en Normandie, ne répondent pas au cahier des charges de l'appellation. Dès lors l'utilisation, sur leur étiquetage ou dans la publicité qui en est faite, de références à la Normandie est susceptible de conduire le consommateur à les confondre avec les camemberts AOP et peut donc constituer une usurpation de l'AOP « Camembert de Normandie ». Cette situation est de nature à remettre en cause la crédibilité du dispositif européen des systèmes de qualité au plan international. La Commission européenne a donc demandé à la France des actions concrètes pour faire cesser « l'utilisation étendue de l'indication « fabriqué en Normandie » et/ou d'autres symboles évocateurs du terroir normand sur les camemberts ne bénéficiant pas de l'AOP ». Après plusieurs années de concertation, l'échec des tentatives d'émergence d'une indication géographique protégée ou d'une AOP élargie a été définitivement acté en juillet 2020. Ceci a conduit les autorités françaises à faire appliquer les règles de protection européennes. Le 9 juillet 2020, un avis aux opérateurs économiques, publié parallèlement au Bulletin officiel du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation et au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, invitait les opérateurs, qu'ils soient affiliés ou non au syndicat normand des fabricants de camemberts, à se conformer à ces règles, en les alertant sur le fait qu'à l'expiration d'un délai de prévenance s'achevant au 31 décembre 2020, l'administration commencerait à relever les manquements constatés. L'avis précise que l'enregistrement de la dénomination « Camembert de Normandie » réserve toute référence à la Normandie aux fromages AOP. Dans ce contexte, la mise en exergue de la mention « fabriqué en Normandie », n'est pas possible sur un fromage ne répondant pas au cahier des charges de l'AOP car elle est de nature à constituer une violation de l'article 13 du règlement 1151/2012 et à l'article L. 722 du code de la propriété intellectuelle. Il ne s'agit pas cependant d'une interdiction générale et absolue. En effet, le contrôle de la légalité des étiquettes est réalisé par les autorités compétentes au terme d'un examen au cas par cas, sous le contrôle du juge. Ce contrôle se fonde sur l'analyse des références graphiques ou textuelles utilisées, leur agencement, et les modalités concrètes d'apposition sur l'emballage des produits. Il s'agit ainsi de procéder à une évaluation globale permettant de confirmer ou d'infirmer l'existence éventuelle d'une évocation répréhensible. Ces actions sont indispensables pour garantir le respect effectif de la réglementation européenne en matière d'étiquetage des produits sous signes officiels de la qualité et de l'origine (SIQO) et renforce la protection de ces produits en France, en Europe et dans les pays tiers.

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