Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - Les Républicains-A) publiée le 05/10/2023

Mme Agnès Canayer attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les problèmes soulevés par l'accord bilatéral signé entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande, permettant l'accès facilité au marché pour les produits agricoles sans exigence de respect des normes européennes dans ce domaine.

En effet, la présidence française de l'Union européenne a ouvert la voie vers la réciprocité des normes face aux importations de produits agricoles issus de pays tiers qui ne respectent pas les même règles de production. Néanmoins, la production agricole néo-zélandaise qui représente 80 % des exportations totales du pays, menace l'équilibre économique, agricole et sanitaire européen.

Les secteurs de production sensibles tels que la viande bovine, viande ovine et les produits laitiers ne doivent pas être les victimes d'importation qui dérèglent les marchés. En effet, la Nouvelle-Zélande continue à utiliser des produits tels que l'atrazine qui est interdit en Europe.

Ce puissant herbicide a été classé « produit nocif » et est interdit en Europe depuis 2003. Il y aussi le cas du diflubenzuron qui est un pesticide classé cancérigène et interdit par l'Union européenne en janvier 2021. Enfin, la Nouvelle-Zélande est le premier importateur mondial de tourteaux de palmistes dont les cultures sont responsables de la déforestation.

L'interdiction de ces matières n'étant pas prévu dans le traité, il est indispensable que l'Union européenne applique la réciprocité des normes.

Aussi, elle entend donc interpeller le Gouvernement pour lui rappeler la dynamique mise en oeuvre par la présidence française sur la lutte contre les distorsions de concurrence.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 16/11/2023

Assurer la cohérence de la politique agricole commune, du pacte vert pour l'Europe et de la politique commerciale commune est essentiel afin de répondre aux attentes de la société civile européenne et de prévenir les effets négatifs indésirables, liés notamment au phénomène de fuites environnementales vers les pays tiers. C'est pourquoi le Gouvernement a fait de la réciprocité des normes une des priorités de la présidence française du Conseil de l'Union européenne (UE) au premier semestre 2022 et continue de porter des initiatives et des propositions sur ces sujets avec la même détermination. L'accord de libre-échange conclu entre l'UE et la Nouvelle-Zélande le 30 juin 2022 présente une avancée significative en matière de cohérence des politiques européennes, dans la mesure où le contingent bilatéral de viande bovine est assorti d'une conditionnalité tarifaire qui exclut les produits issus de bovins élevés en parcs d'engraissement (feedlots). En effet, cette forme d'élevage, dans sa forme intensive -au sens où elle est associée à un recours important aux intrants (notamment des antiparasitaires à base de substances interdites dans l'UE) du fait d'un déséquilibre entre les potentialités du milieu et le chargement animal par unité de surface- a des impacts environnementaux majeurs. Cette avancée n'aurait pas été possible sans la mobilisation du Gouvernement en faveur de l'introduction de conditionnalités tarifaires relatives aux modes de production durables dans les accords commerciaux. Par ailleurs, le règlement (UE) 2019/6 du 11 décembre 2018 relatif aux médicaments vétérinaires est entré en application le 28 janvier 2022. L'article 118 de ce texte prévoit que l'interdiction de l'utilisation d'antimicrobiens favorisant la croissance ou le rendement des animaux et d'antimicrobiens réservés au traitement de certaines infections chez l'homme s'applique aux produits importés, en interdisant l'importation depuis les pays tiers d'animaux et de produits animaux ayant reçu de tels antimicrobiens. Pour que cet article entre en application de manière effective, des actes secondaires sont en cours d'élaboration et d'adoption par la Commission européenne. Un premier acte délégué a été publié en mai 2023. Un premier acte d'exécution a été notifié à l'organisation mondiale du commerce (OMC) et le Gouvernement continue à insister auprès de la Commission européenne pour obtenir la publication la plus rapide du deuxième acte d'exécution qui rendra cette mesure effective à l'issue d'un délai de deux ans. Dans l'attente de l'adoption de ces actes secondaires par la Commission européenne, le Gouvernement a renouvelé, le 2 mars 2023, l'arrêté interministériel portant suspension d'introduction, d'importation et de mise sur le marché en France de viandes et produits à base de viande issus d'animaux provenant de pays tiers à l'UE et ayant reçu des médicaments antimicrobiens pour favoriser la croissance ou augmenter le rendement. Concernant les produits phytopharmaceutiques interdits dans l'UE mais autorisés dans certains pays tiers, le Gouvernement continue à intervenir auprès de la Commission européenne en faveur de la poursuite et de l'accélération des travaux de révision globale des limites maximales de résidus et des tolérances à l'importation. Le Gouvernement insiste également auprès de la Commission européenne et de l'OMC pour la prise en compte des aspects environnementaux dans les réglementations sur les produits phytopharmaceutiques. Dans ce cadre, la Commission européenne a adopté, le 2 février 2023, au titre de la protection des pollinisateurs, la mise à zéro des limites maximales de résidus de deux substances insecticides de la famille des néonicotinoïdes (clothianidine et thiamethoxam). Enfin, le règlement de lutte contre la déforestation est entré en vigueur au printemps 2023, et qui permet de s'assurer qu'à partir de décembre 2024, les produits couverts, dont la viande bovine, mis sur le marché européen ne soient pas issus de la déforestation ou de la dégradation forestière. Le Gouvernement agit de manière déterminée en matière de cohérence des politiques dans le contexte du déploiement du pacte vert européen, et continuera d'agir pour la réciprocité des normes de production agricole, à travers le déploiement des outils pertinents, qu'il s'agisse des mesures miroirs ou des conditionnalités tarifaires dans les accords commerciaux bilatéraux.

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