Question de Mme CARLOTTI Marie-Arlette (Bouches-du-Rhône - SER) publiée le 02/11/2023

Mme Marie-Arlette Carlotti souhaite rappeler l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le fait que le drame qui touche actuellement Israël ne doit pas nous faire oublier celui qui se joue en Arménie et dans le Haut-Karabagh. Une tragédie ne peut en cacher une autre !
C'est une chose étrange et terrifiante que de voir un pays disparaitre sous nos yeux. L'Artsark s'est vidé de sa population par une épuration ethnique qui revêt la forme d'un exode forcé sous la menace des armes.
Et nous savons que désormais c'est l'Arménie qui est en ligne de mire et que le pire peut encore arriver.
Notre commission a alerté depuis plusieurs années qu'une telle tragédie pouvait se produire (particulièrement depuis 3 ans, depuis la guerre de 2020).
Elle salue ses propos tenus à Erevan.
Oui, la France doit aider l'Arménie à accueillir les réfugiés et à renforcer ses capacités de défense pour assurer son intégrité.
Mais le Président de la République a déclaré à Grenade que le temps n'était pas aux sanctions. Elle ne le pense pas. Elle pense au contraire qu'avec les dictateurs, c'est d'abord un rapport de force qu'il faut établir.
Elle lui demande si elle envisage de bloquer les avoirs d'Aliev et de ses proches. Elle souhaite savoir ce qu'elle envisage pour obtenir la libération des dirigeants de la République d'Artsakh, arrêtés pour terrorisme alors qu'ils incarnent nos valeurs démocratiques. Elle lui demande enfin ce qu'elle envisage pour stopper la fourniture de gaz russe qui transite par l'Azerbaïdjan. N'est-il pas temps de mettre fin à cette hypocrisie insupportable !

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer publiée le 06/12/2023

Réponse apportée en séance publique le 05/12/2023

M. le président. La parole est à Mme Marie-Arlette Carlotti, auteure de la question n° 898, adressée à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Mme Marie-Arlette Carlotti. Si des drames se déroulent actuellement aux portes de l'Europe, en Ukraine, et au Proche-Orient, ils ne doivent pas nous faire oublier celui qui s'est joué en Arménie et au Haut-Karabagh. Une vraie tragédie ! Car c'est une chose étrange et terrifiante que de voir un pays disparaître sous nos yeux. L'Artsakh s'est vidé de sa population par une opération ethnique qui revêt la forme d'un exode forcé sous la menace des armes.

Nous craignons que le pire puisse encore arriver et que l'Arménie, dans son intégrité territoriale, soit désormais en ligne de mire. La France, terre d'accueil d'une importante diaspora arménienne - près de 80 000 Arméniens vivent à Marseille, par exemple - a affiché son soutien sans faille à ce pays. Nous avons annoncé la livraison de matériel militaire et la création d'une mission de défense à Erevan, pour appuyer plus efficacement les forces arméniennes face à l'Azerbaïdjan, plus riche, mieux armé et qui a entrepris des exercices militaires près de la frontière avec le soutien de la Turquie.

Nos engagements sont-ils en train d'être tenus ?

La France s'est également impliquée ces derniers mois dans la médiation entre les deux anciennes républiques soviétiques. Mais les pourparlers de paix n'ont guère progressé, malheureusement, même si les dirigeants respectifs ont déclaré qu'un accord de paix pourrait être signé d'ici à la fin de l'année. Nous y sommes et, le mois dernier, Aliyev a refusé de participer à un cycle de négociations en Espagne, invoquant une « position biaisée » de la France.

Pourriez-vous nous dire si la situation a des chances d'évoluer, notamment au sujet de la libération des dirigeants de la République d'Artsakh, arrêtés pour terrorisme ? En 2024 nous célébrerons l'année de l'Arménie en France, une occasion de montrer à nos amis arméniens combien notre pays les soutient.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Vigier, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer. Madame la sénatrice, je connais votre engagement pour cette cause. En recourant à la force, l'Azerbaïdjan a planifié et organisé l'exode des Arméniens du Haut-Karabagh, sous le regard complice de la Russie. Il s'agit - il faut le dire - de crimes qui ne peuvent pas rester sans réaction, et notre réaction est au rendez-vous.

Le temps n'est pas aux sanctions, comme l'a en effet déclaré le Président de la République, mais cela ne signifie pas qu'il soit à l'inaction, tant s'en faut ! Vous le savez, la France est, de loin, le pays le plus mobilisé en soutien à l'Arménie et aux Arméniens. Nous avons même du mal à entraîner la communauté européenne...

Cette mobilisation se traduit par nos efforts diplomatiques, notamment aux Nations unies, pour permettre le retour des populations arméniennes du Haut-Karabagh sur leurs terres ancestrales, en sécurité et sous supervision internationale, comme l'a encore demandé récemment la Cour de justice internationale.

Elle se traduit aussi par notre aide à l'accueil des réfugiés par l'Arménie, qui a été triplée pour atteindre 12,5 millions d'euros en 2023, et qui va continuer d'augmenter.

Elle se manifeste enfin par un engagement très clair en soutien à l'intégrité territoriale de l'Arménie, rappelé par la ministre Catherine Colonna le 3 octobre dernier, et confirmé par le Président de la République le 9 novembre, lors de son entretien avec le Premier ministre arménien.

Nous avons accepté de fournir à l'Arménie des équipements militaires à vocation défensive et travaillons, à Bruxelles, à un plan européen de soutien à une Arménie indépendante, souveraine et démocratique.

Nous disons aussi à l'Azerbaïdjan, sans esprit d'escalade, que nous n'accepterons jamais la moindre tentative de remettre en cause l'intégrité territoriale de l'Arménie et que nous ferons tout pour oeuvrer en faveur d'une paix durable dans la région, au bénéfice de toutes les populations, avec une solution négociée et, en tout cas, respectueuse du droit international.

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