Question de Mme LERMYTTE Marie-Claude (Nord - Les Indépendants) publiée le 15/02/2024

Question posée en séance publique le 14/02/2024

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte, pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Marie-Claude Lermytte. Monsieur le président, monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, mes chers collègues, la filière de la chicorée, comme celle de l'endive, fait partie intégrante du patrimoine des Hauts-de-France, notamment du département du Nord.

La maîtrise de ces cultures est assurée par une filière structurée, implantée majoritairement dans les plaines de Flandre. Les étapes de transformation de la plante sont réalisées par plus de 200 planteurs et torréfacteurs, possédant une technologie spécialisée et performante, gage de produits sains et de qualité. Ces filières représentent à elles seules la quasi-totalité de la production nationale et près d'un quart de la production mondiale.

Pourtant, leur avenir est devenu très incertain : le règlement d'exécution 2023/149 de la Commission européenne du 20 janvier 2023 ne renouvelle pas les produits à base de benfluraline, notamment le Bonalan, utilisé par ces filières pour lutter contre les chénopodes.

Les autorisations de mise sur le marché sont déjà retirées et l'utilisation des stocks n'est permise que jusqu'au 12 mai 2024, c'est-à-dire demain. Après cette date, plus rien ne sera possible. Aucune alternative n'a cependant encore été trouvée pour permettre aux producteurs de maintenir leur activité, si ce n'est un désherbage manuel extrêmement coûteux en main-d'oeuvre.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, comprenez l'angoisse de tous les acteurs de ces filières, dont la survie est menacée.

Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire affirmait hier dans cet hémicycle qu'il ne saurait y avoir d'interdiction sans solution. Monsieur le ministre, nous avons pu en discuter la semaine dernière, je sais que vous mesurez l'urgence de la situation.

Une dérogation pour surseoir à cette interdiction est-elle envisageable dans des délais rapides, le temps qu'un produit de substitution soit mis sur le marché ? Ne laissons pas ces filières historiques et traditionnelles françaises s'éteindre au profit d'une arrivée en masse de chicorée indienne, à mille lieues de nos normes et exigences environnementales.

Qu'adviendrait-il alors de notre souveraineté alimentaire ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 15/02/2024

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2024

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question sur la filière de l'endive et de la chicorée, qui représente à la fois un patrimoine et une force économique majeure, notamment dans les Hauts-de-France, où se concentrent 95 % de la production. L'inquiétude est donc légitime, nous en avons déjà parlé.

Notons tout d'abord que cette interdiction résulte non pas d'une surtransposition française, mais bien d'une décision européenne. Dès lors, seule une autre décision européenne pourrait revenir dessus. Or le processus est complexe : je n'ai jamais été témoin d'un tel retour en arrière. (Mme Sophie Primas s'exclame.)

Néanmoins, pour répondre à l'urgence de la situation, nous avons fait en sorte que cet herbicide puisse être utilisé au cours de la saison 2024, afin de couvrir le risque durant cette période. Si le mois de juin arrive vite, il en est de même pour janvier 2025.

C'est pourquoi des travaux ont d'ores et déjà été lancés au sein de la direction générale de l'alimentation (DGAL) pour examiner les solutions de substitution possibles parmi les herbicides autorisés. Des expérimentations seront mises en oeuvre dès cette année afin de dégager de nouvelles pistes pour 2025.

Par ailleurs, nous accompagnerons l'interprofession dans des programmes de recherche sur ce sujet. Pas d'interdiction sans solution, certes, mais il nous faut chercher des solutions pour ne pas nous retrouver dans l'impasse, d'autant que nous savions que ces molécules risquaient d'être interdites.

La réponse passera par le désherbage mécanique là où c'est possible ou par l'utilisation d'herbicides d'une autre nature.

Après avoir sécurisé l'année 2024, il nous revient d'ouvrir le plus vite possible une perspective pour 2025, puis de nous inscrire dans le temps long pour trouver les meilleures réponses à cette situation. Il n'y a pas d'autre solution pour ce type de produits. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI. - Mme Audrey Linkenheld s'exclame.)

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