Question de M. VOGEL Louis (Seine-et-Marne - Les Indépendants) publiée le 15/02/2024

M. Louis Vogel attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la récente étude d'impact de l'université de Wageningen, aux Pays-Bas, relative aux résultats à attendre de la stratégie agricole « de la Ferme à la fourchette » (Farm to Fork) de l'Union européenne pour parvenir à la neutralité carbone en 2050. Selon les conclusions de cette étude, une chute des productions et un doublement des importations alimentaires, et des conséquences néfastes pour l'environnement sont à prévoir. L'étude de Wageningen estime que les objectifs de Farm to Fork entraîneraient des pertes de rendement allant jusqu'à 30 % (pour la réduction des pesticides) et 25 % (pour les objectifs de réduction de la fertilisation). En combinant les effets économiques de la perte de production et de la baisse de qualité des produits agricoles, ils estiment à 12 milliards d'euros par an la perte de valeur de la production européenne qui résulterait de l'ensemble des objectifs de Farm to Fork (réduction de l'emploi des pesticides et des engrais, développement de l'agriculture sur 25 % des surfaces et retrait de 10 % des surfaces actuellement productives).
Considérant que la stratégie adoptée par le Parlement et la résolution présentée par ce dernier souligne l'importance de « l'évaluation d'impact basée sur la science » qui devrait s'appliquer à l'ensemble des aspects du dispositif, « qu'il s'agisse de la durabilité environnementale, économique et sociale ou du coût de l'inaction » il apparaîtrait utile, eu égard au contexte national et international impactant la souveraineté agricole européenne, que les propositions législatives européennes, et plus précisément la stratégie en question, soient construites sur des analyses d'impact et d'analyse a posteriori.
Aussi, dans la logique des conclusions issues du rapport d'initiative constitué par des membres des commissions parlementaires ENVI et AGRI, il lui demande donc quelles positions le Gouvernement français entend porter quant à la définition des contours d'un cadre de suivi et d'évaluation largement applicable aux plans stratégiques de l'Union.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 11/04/2024

La stratégie Farm to Fork, volet agricole du pacte vert européen, est issue d'une communication de la Commission européenne, publiée au mois de mai 2020, en même temps que la stratégie relative à la protection de la biodiversité d'ici 2030 qui a fait l'objet d'une communication distincte. L'étude publiée par l'université de Wageningen en janvier 2022, et ses différents scénarios, se fondent principalement sur les objectifs chiffrés proposés dans cette communication [notamment, d'ici à 2030 : réduction de l'utilisation et du risque des pesticides chimiques de 50 % et de l'utilisation des pesticides les plus dangereux de 50 % ; réduction des pertes de nutriments d'au moins 50 % entraînant une diminution du recours aux engrais d'au moins 20 % ; affectation de 25 % des terres agricoles de l'Union européenne (UE) à l'agriculture biologique]. Or la stratégie Farm to Fork ne se limite pas à ces cibles chiffrées, qui ne peuvent par conséquent fonder une évaluation exhaustive de son impact. En particulier, elle comporte également un ensemble d'objectifs portant sur la demande alimentaire et les pertes et gaspillages, et relève d'une approche cohérente du système alimentaire dans le contexte plus global du pacte vert européen. Par ailleurs, dans la perspective d'une analyse complète, des éléments comme l'amélioration des technologies agricoles et l'augmentation de l'efficience, ou l'impact du changement climatique doivent également être pris en compte. Il convient en outre de noter que cette communication n'a pas, en elle-même, de valeur contraignante sur le plan juridique. Ainsi, la Commission européenne a toujours insisté à l'époque de la publication de la stratégie sur le fait que les cibles chiffrées qui y figurent étaient aspirationnelles et fixées à l'échelle de l'UE comme des objectifs souhaitables, ne créant pas de droit directement applicable dans les États membres. La stratégie Farm to Fork est désormais en cours de déclinaison dans un ensemble de textes réglementaires européens (directives et règlements) qui reprennent les priorités identifiées et peuvent être amenés à rendre certaines des cibles chiffrées obligatoires à l'échelle de l'UE ou à les décliner par État membre en actant une méthode commune de partage de l'effort au sein de l'UE. Ces textes s'accompagnent d'un rapport d'analyse d'impact publié par la Commission européenne, visant notamment à décrire les incidences environnementales, économiques et sociales des dispositions envisagées, ainsi que les impacts budgétaires pour l'UE ou pour les États membres ou les opérateurs. De plus, chacun de ces textes prévoit ses propres modalités d'évaluation ainsi que, le cas échéant, de révision afin de tenir compte des enjeux liés à la mise en oeuvre ou à d'éventuelles mises à jour programmées des objectifs poursuivis (mise en oeuvre progressive, bilan à mi-parcours avant décision de relever le niveau de contrainte, élargissement du champ d'application, etc.). Ainsi, le cadre actuel intègre le suivi et l'évaluation des plans stratégiques de l'UE, et en particulier de la stratégie Farm to Fork, qui sont un enjeu primordial pour garantir l'atteinte, dans les meilleures conditions, des objectifs poursuivis.

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