Question de M. UZENAT Simon (Morbihan - SER) publiée le 01/02/2024

M. Simon Uzenat interroge Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur l'avenir du centre hospitalier du Centre Bretagne (CHCB). Depuis de nombreuses années, cet établissement, qui couvre un bassin de vie de plus 140 000 habitants connaissant un vieillissement marqué, fait face à une lourde dette et une pénurie de moyens financiers liée notamment à un modèle de financement de l'hôpital public qui est à bout de souffle.
De surcroît, le CHCB rencontre des difficultés majeures en matière de recrutement de personnels soignants avec des conséquences en chaîne sur la dégradation du fonctionnement des services (en particulier des urgences) et la disponibilité des lits. Toutes les composantes de l'hôpital sont touchées sans exception, de la naissance (maternité) jusqu'à la fin de vie en établissement d'hébergement pour personnes âgées et dépendantes (EHPAD), en passant par les services de médecine et de chirurgie. Si son objectif initial pouvait apparaître louable, la loi n° 2023-379 du 19 mai 2023, portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, a quant à elle amplifié le phénomène en réduisant considérablement le vivier des médecins intérimaires, qui représentaient jusqu'à 40 % des médecins employés par le CHCB.
Le CHCB est aujourd'hui en péril et la mobilisation au plan local désormais générale (élus, soignants, syndicats, citoyens) pour garantir la qualité et la continuité du service public de santé en Centre Bretagne.
Il l'interroge donc sur les moyens humains et financiers que l'État compte déployer dans les plus brefs délais pour être à la hauteur des besoins de santé des habitants et habitantes et permettre à chacun de naître, de bien vivre et de bien vieillir en Centre Bretagne.

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Réponse du Ministère auprès du Premier ministre, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations publiée le 07/02/2024

Réponse apportée en séance publique le 06/02/2024

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, auteur de la question n° 1047, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Simon Uzenat. Madame la ministre, ma question porte sur l'avenir du centre hospitalier du Centre Bretagne (CHCB), dont le bassin de vie compte plus de 140 000 habitants et est classé comme désert médical.

Pour illustrer la singularité de ce territoire, nous avons coutume de dire que le Centre Bretagne est une île verte et qu'il appelle donc des moyens spécifiques. Or c'est l'inverse qui se produit ! L'espérance de vie y est plus faible qu'ailleurs, ce qui entraîne des pertes de chances pour les citoyens ruraux : nous ne pouvons pas l'accepter dans notre République garante de l'égalité.

Depuis de nombreuses années, le CHCB fait ainsi face à une pénurie de moyens, en raison notamment du fait que notre modèle de financement de l'hôpital public est à bout de souffle.

Il a également été l'un des grands oubliés des crédits d'investissement du Ségur, puisque seulement 1,5 million d'euros lui ont été accordés sur les 42 millions qui étaient demandés.

De surcroît, le CHCB rencontre des difficultés majeures en matière de recrutement de personnels soignants, ce qui a des conséquences en chaîne sur le fonctionnement des services et aboutit à leur dégradation. Toutes les composantes de l'hôpital sont touchées, de la maternité jusqu'aux établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), en passant par la médecine, la chirurgie et les urgences.

Si son objectif initial pouvait apparaître louable, la loi Rist a amplifié le phénomène en réduisant considérablement le vivier des intérimaires, lesquels représentaient 40 % des médecins - jusqu'à 70 % de ces derniers aux urgences du CHCB.

Le centre hospitalier est aujourd'hui en péril et la mobilisation est générale, à l'échelon local, pour garantir la qualité et la continuité du service public de santé en Centre Bretagne.

Il convient, une nouvelle fois, de souligner l'engagement sans faille et le dévouement incroyable des équipes de direction, des soignants et des praticiens hospitaliers, qui portent le CHCB à bout de bras.

Madame la ministre, au regard de la gravité de la situation, quels moyens humains et financiers spécifiques l'État compte-t-il déployer dans les plus brefs délais pour permettre à chacun de naître, de bien vivre et de bien vieillir en Centre-Bretagne ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Aurore Bergé, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur l'accès aux soins, enjeu qui se pose dans votre territoire comme partout en France. Il s'agit, je le crois, de l'une des premières préoccupations des Français, si ce n'est parfois la première. Vous soulevez également la question de la force de notre hôpital public, qui constitue souvent le premier accès aux soins, ou qui en est, en tout cas, l'une des premières portes d'entrée pour de nombreux Français.

En ce qui concerne la situation spécifique du groupement hospitalier de territoire (GHT) Centre Bretagne, j'aborderai deux points : la question des urgences et celle de la restructuration, que vous avez évoquée.

L'accès aux urgences, vous le savez, est aujourd'hui régulé ; c'est une bonne chose : cela répond à une demande des professionnels eux-mêmes, afin d'en sécuriser le fonctionnement. Le service mobile d'urgence et de réanimation (Smur) fonctionne bien : 7,5 équivalents temps plein (ETP) y sont présents et 88 patients y passent en moyenne chaque jour.

Toutefois, étant donné les difficultés récurrentes, celles que vous avez vous-même évoquées, monsieur le sénateur, l'agence régionale de santé (ARS) a proposé à l'établissement de diligenter une mission d'appui, pour analyser les difficultés rencontrées et surtout pour proposer des améliorations dans l'accès aux soins et l'organisation.

Cette mission, dont la création a été acceptée par la direction, a entamé ses travaux le 3 décembre dernier : vous comprendrez donc, monsieur le sénateur, que je ne puisse pas vous en donner les conclusions aujourd'hui.

Son but est de répondre concrètement à la question de l'organisation des soins sur le territoire et de s'intéresser évidemment à l'avenir d'un établissement hospitalier auquel non seulement votre commune, mais aussi toute la Bretagne sont attachées.

J'en viens au second point. Vous avez évoqué la loi Rist. Celle-ci visait à répondre à une attente très forte. Je sais que sa mise en oeuvre a suscité des inquiétudes, mais ses dispositions permettent d'éviter des dérégulations ou des dysfonctionnements trop importants, ceux que l'on pouvait connaître quand nos établissements ne reposaient presque plus que sur des intérimaires, situation qui engendrait des surcoûts considérables et une concurrence entre les professionnels de santé eux-mêmes.

Cette loi a donc pu, en effet, susciter des doutes au tout début, mais elle répond à des attentes et ses dispositions sont extrêmement bien déployées sur l'ensemble du territoire.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour la réplique.

M. Simon Uzenat. Merci de votre réponse, madame la ministre, mais nous ne pouvons pas partager le constat que vous faites : quarante lits de soins médicaux et de réadaptation (SMR) et trente lits d'Ehpad ont été fermés. Faute de lits disponibles, les urgences deviennent un service d'hospitalisation.

Vous évoquez l'audit en cours, mais le temps n'est plus aux audits ! Il faut donner les moyens aux services de bien fonctionner. Je rappelle d'ailleurs, au passage, que le rapport de la mission aurait dû être rendu en janvier de cette année.

Le plan blanc a été déclenché. Le Smur ne fonctionnait pas hier soir. Il convient de prendre des mesures spécifiques et pérennes, de revaloriser les praticiens hospitaliers et les personnels soignants, de travailler avec les médecins militaires.

Madame la ministre, il y a urgence pour le Centre Bretagne !

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