Question de M. HENNO Olivier (Nord - UC) publiée le 15/02/2024

M. Olivier Henno attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la potentielle inclusion de l'incinération dans le système d'échanges de quotas de carbone européen, qui interviendrait avant fin 2028, avec possibilité de dérogation jusqu'au 31 décembre 2030. Ainsi, pour une entreprise de pôle de valorisation énergétique des déchets comme le centre de valorisation énergétique Flamoval à Arques dans le Nord, les émissions de CO2 non biogéniques seraient soumises à une taxation à hauteur de 80 euros par tonne de CO2 émise. Le surcoût serait alors d'environ 40 euros par tonne de déchets entrants. Ce nouveau coût vient s'ajouter à celui subi du fait des augmentations successives de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) malgré la promesse de l'État de la maintenir à un niveau faible et constant pour l'incinération.

Compte tenu du surcoût projeté et des moyens de plus en plus limités des collectivités, il est fort probable que ce sera au citoyen de le supporter. Le syndicat mixte Flandre Morine (SMFM) alerte sur cette situation critique et sur l'incapacité de pouvoir assurer sa mission de service public à un coût acceptable.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer publiée le 08/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2024

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, auteur de la question n° 1095, adressée à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. (Mme Élisabeth Doineau applaudit.)

M. Olivier Henno. Madame la ministre, cette question concerne les quotas carbone. Je n'entends nullement les remettre en cause, car il s'agit d'un dispositif pertinent pour trouver le chemin de la croissance durable et apprécié par ce qu'on appelle le Sud global. Toutefois, il convient de prendre conscience des effets pervers, des abus, voire des profits illicites, auxquels ils peuvent donner lieu, comme la série D'Argent et de sang nous y invite d'ailleurs ces temps-ci...

Plus spécifiquement, je m'interroge sur les ajustements qui pourraient s'imposer vis-à-vis des incinérateurs, qui jouent un rôle important dans nos territoires, particulièrement du pôle de valorisation énergétique des déchets Flamoval. Cet incinérateur est situé à Arques, dans le Pas-de-Calais, mais une bonne partie des Flandres françaises, dans le département du Nord, a également recours à ses services.

Ces équipements représentent pour les collectivités des investissements lourds, pour une longue durée. Ils donnent évidemment lieu à des émissions de CO2 non énergétiques, qui seront taxés à un taux de 80 euros la tonne à compter de la fin de l'année 2028. Cette échéance peut paraître lointaine ; pourtant, ce n'est pas le cas pour des projets de cette envergure - une dérogation est d'ailleurs déjà prévue jusqu'en 2030. C'est au contraire dès aujourd'hui qu'il faut se préparer quand des équipements d'une telle ampleur sont concernés, afin d'anticiper les conséquences d'une telle taxation, qui entraînera un surcoût de 40 euros par tonne de déchets entrants, ce qui ne peut que fragiliser l'équilibre financier de ces incinérateurs, qui sont déjà astreints à la taxe générale sur les activités polluantes. Le syndicat mixte Flandre Morinie, chargé de la gestion de Flamoval, s'en inquiète.

Si nous ne voulons pas que les usagers supportent ce surcoût, il est nécessaire que l'État prenne en considération, dès à présent, ce problème qui affecte nos territoires.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Monsieur le sénateur Henno, Christophe Béchu m'a chargée de vous répondre.

Aujourd'hui, les incinérateurs ne sont pas inclus dans le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre, seules des obligations de récupération sont prévues.

De manière plus générale, les émissions de gaz à effet de serre de la gestion des déchets représentent près de 3 % des émissions nationales, soit environ 13,5 millions de tonnes de CO2 en 2023.

Une grande partie de ces émissions sont liées à la mise en décharge, le méthane et le protoxyde d'azote ayant des pouvoirs de réchauffement global plus importants que le dioxyde de carbone.

La récente révision du marché carbone européen a introduit de nouvelles obligations. Pour les incinérateurs, elles se limitent, à partir de 2024, à une surveillance et à une déclaration des émissions de gaz à effet de serre des installations.

À ce stade, la réglementation européenne ne prévoit pas d'obligation de restitution de quotas carbone, donc l'application d'un prix carbone pour les incinérateurs.

Les déchets sont néanmoins utilisables dans l'industrie, soumise au système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre, notamment sous forme de combustible solide de récupération.

L'article 30 de la directive prévoit une clause de revue d'ici au 31 juillet 2026. À cette échéance, la possibilité d'inclure pleinement les incinérateurs dans le système d'échange de quotas d'émission européen sera étudiée. La directive donne, à titre indicatif, la date de 2028 et permet aux États membres d'y déroger jusqu'en 2030.

Cette clause de revue n'est pas automatique et nécessitera, monsieur le sénateur, une proposition législative de la Commission européenne, ainsi qu'une discussion entre colégislateurs. Si cette proposition aboutit, le Gouvernement sera attentif aux implications économiques pour les incinérateurs et les collectivités.

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