Question de M. BARROS Pierre (Val-d'Oise - CRCE-K) publiée le 15/02/2024

M. Pierre Barros appelle l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur la situation alarmante du service public de la pédopsychiatrie dans le département du Val-d'Oise. Ce territoire est un des plus jeunes de France métropolitaine. Pourtant, alors que la santé mentale des enfants et des adolescents a été érigée comme une priorité gouvernementale, les moyens manquent dramatiquement.

Le secteur comprenant la ville de Cergy-Pontoise et une partie du Vexin français, représentant un bassin de population de plus de 230.000 habitants, est en grande difficulté. Il accueille des femme en périnatalité, des enfants et des adolescents dans 11 unités d'amont et d'aval. Le manque de professionnels de santé déséquilibre l'offre de soins dans ce territoire. Les actions déployées par les différentes unités de pédopsychiatrie sont assurées par 1,8 équivalent temps plein de pédopsychiatre praticien hospitalier sur les 10 postes prévus, un interne quittant son poste à la fin de l'année et 6 équivalents temps plein psychologues et neuropsychologues sur les 14 pérennisés. Les conditions de travail sont extrêmement difficiles pour les soignants.

Ces effectifs sont largement insuffisants, dans un territoire où les demandes de consultations et de prises en charge ne cessent d'augmenter, notamment depuis la pandémie de Covid-19. Les délais de demande de rendez-vous deviennent infernaux pour les familles. D'après les données des professionnels, ils sont de 7 mois chez les 0 à 4 ans et de 3 ans dans les centres médico-psychologique (CMP). De même, les places dans les établissements médico-sociaux sont bien trop rares. Près de 600 enfants sont en attente en institut médico-éducatif (IME) et près de 900 enfants sont en attente en service d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD). Ils peuvent même patienter jusqu'à 5 ans avant une admission. Dans ces conditions, comment les accompagner au mieux et leur permettre de s'épanouir ? Ces jeunes ont besoin de soins précoces, qu'ils ne peuvent recevoir dans les conditions actuelles, au grand dam des soignants.

Aujourd'hui, les personnels redoutent une fermeture de ces structures, faute d'effectifs en nombre suffisant pour leur permettre de fonctionner de manière optimale. Des décisions similaires ont été prises dans certaines structures du département, comme avec la fermeture temporaire de l'unité psychiatrique François-Villon de Cergy qui assurait un suivi médico-psychologique de jeunes souffrant de troubles psychotiques. Ces décisions mettent en danger les jeunes concernés, qui se retrouvent du jour au lendemain sans prise en charge. Elles laissent sur le carreau une population précaire, qui ne peut bien souvent s'offrir un parcours de soins dans le privé faute de moyens financiers suffisants. Elles marquent enfin l'arrêt de tout un travail de prévention mené avec d'autres acteurs extérieurs : écoles, protection maternelle et infantile (PMI), crèches, aide sociale à l'enfance (ASE)...

La psychiatrie et la pédopsychiatre sont les parents pauvres de notre système de santé. Une nouvelle fermeture, même temporaire, d'un service de pédopsychiatrie serait intolérable. Il demande donc au Gouvernement de détailler les moyens, humains et financiers, qui seront mis en oeuvre pour assurer la continuité de ce service essentiel dans le Val-d'Oise.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé des personnes âgées et des personnes handicapées publiée le 08/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2024

M. le président. La parole est à M. Pierre Barros, auteur de la question n° 1101, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Pierre Barros. Madame la ministre, la santé mentale des enfants a été érigée comme une priorité du Gouvernement. Pourtant, dans le Val-d'Oise, l'un des territoires les plus jeunes de France métropolitaine, les moyens manquent.

Le secteur comprenant la ville de Cergy-Pontoise et une partie du Vexin rencontre d'immenses difficultés. Seuls deux médecins répondent aux besoins d'une population de 68 000 mineurs dans onze unités d'amont et d'aval.

À Argenteuil, ville de 110 000 habitants, les actions déployées en pédopsychiatrie sont assurées par 1,6 équivalent temps plein.

Ces effectifs sont largement insuffisants, dans un territoire où les demandes de consultations et de prises en charge ne cessent d'augmenter, en particulier depuis la pandémie de covid-19. Les délais de demande de rendez-vous deviennent infernaux pour les familles.

Les places dans les établissements médico-sociaux sont bien trop rares. Dans ce secteur, 600 enfants attendent pour entrer en institut médico-éducatif (IME). Comment les accompagner au mieux et leur permettre de s'épanouir ?

Aujourd'hui, les professionnels - certains sont d'ailleurs présents dans nos tribunes - redoutent également la fermeture de certaines structures, faute d'effectifs, comme ce fut brutalement le cas, au mois de décembre 2022 pour l'unité psychiatrique François-Villon de Cergy, qui assurait un suivi médico-psychologique de jeunes souffrant de troubles psychologiques et psychotiques.

La psychiatrie et la pédopsychiatre sont les parents pauvres de notre système de santé.

Madame la ministre, quels moyens humains et financiers seront mis en oeuvre pour assurer la continuité de ce service public et répondre à votre priorité gouvernementale dans le Val-d'Oise ?

Mme Cathy Apourceau-Poly. Bravo !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées. Monsieur le sénateur Barros, le secteur de la pédopsychiatrie est confronté à des problèmes de démographie des professionnels de santé. C'est indéniable et c'est particulièrement le cas en Île-de-France et dans le département du Val-d'Oise.

Les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie, qui se sont tenues au mois de septembre 2021, ont été l'occasion de rappeler les enjeux pour les projets d'investissement en psychiatrie.

Dans le cadre du Ségur de la santé et pour réduire les inégalités d'accès aux soins qui persistent dans nos territoires, l'agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France a soutenu tous les projets présentés par les établissements ayant une activité de psychiatrie.

De nombreux leviers sont aussi mis en place pour attirer les professionnels de santé dans le département. Je pense à l'amélioration de leurs conditions de travail, à l'attribution d'aides ciblées pour les internes ou encore au cofinancement des initiatives des établissements publics en faveur du logement de leur personnel soignant.

Par ailleurs, l'amélioration de la prise en charge des Franciliens en santé mentale, en particulier des plus jeunes, constitue une priorité d'intervention du nouveau projet régional de santé de l'ARS d'Île-de-France.

En 2023, le département du Val-d'Oise, reconnu prioritaire, a ainsi pu bénéficier de 800 000 euros de financement pour les trois projets majeurs venant renforcer l'offre en psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent.

Enfin, concernant l'accompagnement des enfants en situation de handicap, pour lesquels vous connaissez mon engagement, l'ARS a lancé le 12 octobre 2023 le plan Inclus'IF 2030, financé à hauteur de 310 millions d'euros par la région.

Conformément aux ambitions fixées par le Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap (CNH), ce plan vise la création des fameuses 50 000 solutions nouvelles, l'appui de l'école inclusive et, bien sûr, le repérage précoce de ces jeunes.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous travaillons à apporter des réponses concrètes sur ces sujets aux Franciliens, en particulier aux Val-d'Oisiens.

M. le président. La parole est à M. Pierre Barros, pour la réplique.

M. Pierre Barros. Madame la ministre, votre réponse n'est pas satisfaisante. Il y a la priorité et il y a la réalité.

La réalité du terrain est que, malgré tous les dispositifs et priorités que vous pouvez mettre en oeuvre, le manque de professionnels de santé est cruel.

J'en discutais juste avant mon intervention avec les professionnels présents dans nos tribunes : les médecins doivent se déplacer d'un endroit à un autre et, dans une sorte de dumping social, les territoires s'arrachent les professionnels de santé.

Malheureusement, la réponse que vous apportez n'est pas à la hauteur des enjeux. Nous serons naturellement attentifs à ce que les choses se passent en bon ordre dans les territoires.

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