Question de M. STANZIONE Lucien (Vaucluse - SER) publiée le 29/02/2024

M. Lucien Stanzione attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur le désarroi des producteurs face aux alcaloïdes pyrrolizidiniques.

La filière des plantes à parfum aromatiques et médicinales (PPAM) est confrontée à un défi émergent : l'aval de la filière constate en effet une hausse de la concentration en alcaloïdes pyrrolizidiniques dans les préparations pour la cosmétique ou l'aromathérapie, les compléments alimentaires issues de productions comme la mélisse, le thym et la menthe poivrée en particulier, mais aussi beaucoup d'autres. Ces niveaux de contamination en hausse vont de pair avec la disparition des solutions chimiques de désherbage, conjuguée à des conditions climatiques de hausse des températures. Les alternatives non chimiques sont quasiment inexistantes, ou en tout cas inefficaces et économiquement non viables.
Les conséquences sanitaires et économiques sont importantes, avec des surcoûts liés à l'élimination des mauvaises herbes qui n'enrayent pas une moyenne entre 20 et 30 % des lots refusés, alors même que les productions les plus sensibles font partie de plus de la moitié des systèmes de production aujourd'hui.
Les producteurs réclament un investissement dans la recherche de moyens de lutte efficaces contre les mauvaises herbes pour lutter contre les alcaloïdes pyrrolizidiniques.
Il faut agir vite. Selon les producteurs, une vingtaine d'espèces majeures pourraient ne plus être cultivées en France. Le maraîchage est également concerné.
Il lui demande quelles mesures il souhaite prendre pour aider les producteurs.

- page 711


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 10/04/2024

Réponse apportée en séance publique le 09/04/2024

M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, auteur de la question n° 1120, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Lucien Stanzione. Madame la ministre, la filière des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM) est confrontée à un nouveau défi : les exploitants constatent une hausse de la concentration en alcaloïdes pyrrolizidiniques dans les préparations pour les cosmétiques, l'aromathérapie, les compléments alimentaires et la pharmacie issues de productions comme la lavande, la mélisse, le thym, la menthe poivrée et bien d'autres.

La hausse des niveaux de contamination s'explique par la suppression des solutions de traitement chimique de désherbage. Les conséquences sanitaires et économiques sont énormes, l'élimination des mauvaises herbes entraînant des surcoûts sans pour autant réduire le taux de lots refusés, qui varie entre 20 % à 30 %.

Or les solutions de remplacement au désherbage chimique dont nous disposons actuellement ne sont pas viables économiquement, surtout pour les petites structures, et entraînent une très forte hausse des prix.

Les producteurs réclament un investissement massif dans la recherche de moyens de lutte efficaces contre les mauvaises herbes et les alcaloïdes pyrrolizidiniques. De tels programmes de recherche, du fait de leur caractère urgent et complexe, nécessitent des moyens financiers importants. Il faut agir vite, car, selon les producteurs, une vingtaine de plantes phares des PPAM pourraient ne plus être cultivées en France. Encore plus grave : le maraîchage est également concerné.

Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre, madame la ministre, d'abord pour doter la recherche de réels moyens, et pour quel montant, ensuite pour aider les producteurs, et à quel niveau ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Lucien Stanzione, vous mettez le doigt sur un sujet très intéressant, à savoir les conséquences de la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires et de l'interdiction d'un certain nombre de molécules. L'écologie n'est pas si simple : interdire certains produits signifie affronter de nouvelles problématiques, qui peuvent être d'ordre sanitaire.

Vous évoquez dans votre question les alcaloïdes pyrrolizidiniques, qui sont des substances naturellement présentes dans certaines plantes, principalement des adventices, pouvant contaminer les récoltes.

L'exposition à ces contaminants suscite des préoccupations sanitaires depuis une dizaine d'années. Vous le savez, dans l'avis qu'elle a publié, en 2017, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a confirmé le caractère cancérigène et génotoxique de ces substances, que l'on peut trouver dans les miels, les tisanes et les compléments alimentaires.

C'est la raison pour laquelle des mesures de gestion des risques ont été mises en place. Des teneurs maximales réglementaires ont été adoptées et publiées dès le mois de décembre 2020.

Face à ces risques, nous continuons d'autoriser l'emploi de certains produits pour lutter contre les adventices susceptibles de produire ce type d'alcaloïdes : il s'agit de spécialités à base de pyridate, de 2,4-D (acide 2,4-dichlorophénoxyacétique), de métazachlore, qui peuvent être utilisées seules ou en association avec d'autres produits à base de clomazone, aclonifen et pendiméthaline. Par ailleurs, une demande d'autorisation pour un produit à base de pyridate est expertisée en 2024.

Néanmoins, les difficultés que vous mentionnez soulèvent la question du « Pas d'interdiction sans solution ». Dans cette optique, nous avons investi massivement - 250 millions d'euros - dans le cadre du Plan d'action stratégique pour l'anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (Parsada) afin de proposer de nouvelles solutions innovantes.

Pour répondre à la question que vous avez posée, un conventionnement direct de la direction générale de l'alimentation (DGAL) est prévu dans le cadre de projets ciblés, à hauteur de 4 millions d'euros. Par ailleurs, le ministère de l'agriculture est en train d'étudier la proposition de projet ciblé de l'Institut technique de cette filière.

En parallèle, j'ai récemment mis en place un comité des solutions, qui vise à trouver des solutions à ces situations d'impasse en recherchant dans toute la panoplie qui est à notre disposition, et à réglementation constante, des autorisations de mise sur le marché qui n'auraient pas été étendues ou des reconnaissances mutuelles de produits utilisés dans d'autres pays européens de manière sécurisée.

M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour la réplique.

M. Lucien Stanzione. Madame la ministre, je prends acte de votre réponse. Cela étant, vous n'avez pas précisé de quelle manière vous comptez venir en aide aux producteurs de plantes PPAM qui sont actuellement touchés. En attendant que des crédits soient octroyés à la recherche et que cette dernière produise des effets, ces producteurs sont dans une situation délicate. Il faut réfléchir à leur indemnisation.

- page 2468

Page mise à jour le